Sa Majesté le Roi Mohammed VI , accompagné de SAR le Prince Héritier Moulay El Hassan et de SAR le Prince Moulay Rachid, a reçu, dimanche à Al Hoceima, M. Driss Jettou, Président de la Cour des Comptes, qui a présenté au Souverain le rapport annuel relatif aux activités des juridictions financières au titre des années 2016-2017 et ce, conformément aux dispositions de l'article 148 de la Constitution et l'article 100 de la loi 62.99 formant code des juridictions financières. Présentant ce rapport, M. Jettou a indiqué que les juridictions financières ont mené 160 missions de contrôle dans le domaine de la gestion, et rendu 2.677 décisions et jugements au sujet des comptes produits par les comptables publics et 215 décisions et jugements disciplinaires dans le domaine du budget et des affaires financières. Après avoir rappelé que la Constitution du Royaume a confié à la Cour des comptes la mission d'exercer le contrôle supérieur de l'exécution de la loi de finances, M. Jettou a souligné que la Cour a entamé la réalisation d'une mission de contrôle chaque année concernant l'exécution du budget. La première mission de ce genre a été réalisée au titre de l'année 2016 et la Cour se penche actuellement à achever la mission de contrôle du budget 2017, a-t-il fait savoir. Il a mis l'accent sur l'importance des crédits allouées par l'Etat à l'investissement en général et au financement des stratégies sectorielles en particulier, relevant, dans ce cadre, l'effet limité de cet effort sur le développement de manière globale et la création de l'emploi plus précisément. Dans ce sens, M. Jettou a recommandé l'efficacité et le rendement dans le choix des programmes et le ciblage d'un développement durable et équilibré bénéficiant à toutes les couches sociales et les différentes régions du territoire national. Il a, à cet égard, ajouté que, sur instructions de SM le Roi, la Cour a réalisé une mission d'évaluation de l'action des Centres régionaux d'investissement (CRI), qui a donné lieu à plusieurs remarques et recommandations soumises à SM le Roi le 11 décembre 2017. La Cour a mis l'accent également sur certains facteurs qui pourraient constituer des risques sur la durabilité des finances publiques, dont le niveau élevé de la dette publique et son rythme croissant, ainsi que la problématique des arriérés de l'Etat au profit de certains établissements publics et entreprises privées et qui concernent plus précisément la restitution de la TVA. Il a souligné aussi la persistance de la problématique de la durabilité des régimes de retraites, relevant, dans ce cadre, que malgré la réforme du régime des pensions civiles, lancées en 2016, le déficit financier de ce régime s'est aggravé. Eu égard à l'importance du domaine social, M. Jettou a indiqué que la Cour des comptes a intensifié le contrôle des organes publics assurant la gestion des secteurs de l'éducation et la formation et de la santé publique. Dans le domaine de l'enseignement, plusieurs missions de contrôle ont été menées, dont des missions d'évaluation des résultats du Programme d'Urgence de l'Education et de la Formation 2009-2012. L'Etat s'est engagé à exécuter ce programme en mobilisant une enveloppe budgétaire de 43,124 milliards de dirhams (MMDH) (sans compter les dépenses de fonctionnement). Sur la base de ce budget, des projets ont été programmés pour des engagements à hauteur de 35,056 MMDH, tandis que la somme des paiements exécutés a atteint 25,165 MMDH. Au niveau des réalisations, la Cour a enregistré l'absence chez les administrations concernées d'un bilan, global et précis aux niveaux financier et quantitatif, de tous les projets et mesures de ce programme. Toutefois, les missions de contrôle réalisées par la Cour ont fait ressortir que les objectifs fixés par ce programme n'ont pas été atteints, a-t-il souligné. Ainsi, nonobstant l'amélioration de certains indicateurs quantitatifs, la Cour relève la non-généralisation de l'enseignement pré-scolaire, la non-couverture de l'ensemble des communes rurales en enseignement collégial et en internats, l'aggravation de l'encombrement, le maintien de la déperdition scolaire à des niveaux élevés, l'exploitation d'établissements scolaires dans une situation précaire et la non-prise en considération des besoins du système d'enseignement en ressources humaines. S'agissant de la santé, M. Jettou a indiqué que le rapport annuel contient les conclusions des missions d'audit de sept établissements hospitaliers réalisées en partenariat avec les conseils régionaux. Ces audits ont fait ressortir les mêmes observations qui ont été enregistrées durant les années passées, à savoir que la gestion des établissements hospitaliers souffre de dysfonctionnements structurels au niveau de la planification stratégique, la programmation, la gouvernance hospitalière, la gestion des services médicaux, la facturation et le recouvrement des recettes, outre la gestion des médicaments et des fournitures médicales, a noté M. Jettou. Le fait d'accorder de l'importance à quelques secteurs qui concernent de près les citoyens et les prestataires n'empêche pas la Cour des comptes de s'intéresser à d'autres organes stratégiques et importants pour le pays, a relevé M. Jettou, précisant dans ce cadre, que la Cour avait effectué une mission à la Caisse de dépôt et de gestion (CDG). A cet effet, la Cour a recommandé la révision du cadre juridique et institutionnel régissant la Caisse de sorte à lui permettre d'être en phase avec les meilleures pratiques en matière de gouvernance et d'appuyer les choix stratégiques à travers des plans réalisables conformément à des agendas bien définis, a rappelé M. Jettou. Le président de la Cour des comptes a également recommandé la révision du positionnement de la Caisse dans certains métiers ainsi que la restructuration des filiales s'activant dans divers secteurs, voire la possibilité d'abandonner certaines d'entre elles, outre le respect des engagements et objectifs sur la base desquels les autorisations ont été accordées s'agissant de la gestion du portefeuille des filiales et des actions. Dans le cadre du suivi de l'exécution des recommandations émises, la Cour des Comptes a reçu les procédures entreprises par la CDG afin de mettre en oeuvre ces recommandations et note la réactivité de son administration à l'égard des propositions de la Cour, a précisé M. Jettou. La Cour des comptes a réalisé en 2017 une mission d'audit au niveau du groupe OCP, qui a porté essentiellement sur les activités liées à l'extraction des phosphates et leur traitement via lavage et flottation, aussi bien qu'à leur transport par train ou pipeline à partir des sites d'extraction vers les unités chimiques pour leur valorisation ou exportation, a-t-il expliqué. La Cour des comptes s'est aussi arrêtée sur plusieurs observations intéressant la planification à moyen et long termes des activités minières, la programmation de la production à court terme, le traitement des phosphates, l'utilisation et l'entretien des équipements d'extraction et de traitement, ainsi que les impacts environnementaux de l'activité minière, a-t-il ajouté. Sur la base de ces observations, la Cour a émis des recommandations qui ont été favorablement accueillies par l'administration de l'OCP et appliquées sur le terrain, a-t-il fait savoir, ajoutant que la Cour va mener d'autres missions dans la même institution qui seront liées au volet industriel, ainsi qu'aux domaines de distribution, d'exportation, de transport, de logistique et de partenariats à caractère commercial. La Cour a également réalisé plusieurs missions d'audit dans d'autres domaines, a indiqué M. Jettou, citant à titre d'exemple le Crédit Agricole du Maroc, le plan "Halieutis", les mécanismes du logement social, les services sur internet destinés aux administrés ainsi que les objectifs de développement durable pour la période 2015-2030. Le rapport annuel de la cour des comptes est le fruit des efforts de tous les magistrats et personnels des juridictions financières qui s'inspirent des Hautes orientations éclairées de SM le Roi qui ne cessent d'inciter à la consécration des principes de reddition des comptes et de transparence et de la bonne gouvernance pour une gestion rationnelle des deniers publics, l'amélioration du rendement de la gestion publique et de son efficacité et la modernisation de ses modes, a-t-il conclu.