Quelque 5.369.892 Tunisiens sont appelés dimanche à se rendre aux urnes pour élire les premiers conseils municipaux pluralistes et démocratiques depuis la chute du régime de Zine El Abidine Ben Ali. Les électeurs devront élire leurs représentants dans 350 circonscriptions municipales et 24 conseils régionaux, répartis sur l'ensemble du pays. Par rapport aux élections législatives et présidentielle de 2014, ce scrutin municipal se distingue par le nombre important de circonscriptions et de listes candidates. Les candidats, dont plus de 50 pc sont âgés de moins de 35 ans (contre seulement 4,41 pc pour les plus de 60 ans) concourront pour pourvoir 7.177 sièges dans 350 circonscriptions. Le scrutin se déroulera dans 11.185 bureaux de vote dans plus de 4000 centres à travers les différentes régions et circonscriptions électorales. Selon le calendrier électoral établi par l'Instance Supérieure Indépendante des Elections (ISIE), l'annonce des résultats aura lieu le 7 mai et les résultats définitifs seront proclamés le 9 mai prochain après l'examen des recours. Pour le vote des sécuritaires et militaires au nombre de 36.050 auxquels l'ISIE a réservé entre 350 centres et 359 bureaux de vote, il avait eu lieu le 29 avril dernier. Quelque 2074 listes candidates, 860 listes indépendantes, 159 listes de coalition et 1055 listes partisanes, sont en lice pour ces élections. Les femmes sont en tête de 33,30% des listes. Environ 1700 observateurs seront déployés sur l'ensemble des circonscriptions électorales pour contrôler le déroulement de la campagne électorale des municipales qui seront supervisés par 350 coordinateurs locaux. De son côté, l'Union européenne a déployé une Mission d'Observation Electorale (MOE) composée de plus de 80 observateurs et de 7 analyses électoraux. La mission observera toutes les phases du processus électoral. Malgré l'importance de ce rendez-vous, certains observateurs ont émis des craintes quant au taux de participation qui a avoisiné seulement 12 % lors du vote des sécuritaires et des militaires. Selon le journaliste et politologue Soufiane Ben Farhat, cette désaffection est due à "l'absence flagrante et lourdement ressentie des réformes politiques et sociales, toujours en suspens ou renvoyées aux calendes grecques". Ce taux d'abstention participe aussi de la désaffection d'une classe politique, toutes tendances confondues, dont l'incompétence et l'inconsistance sautent aux yeux, fait-il observer. Il souligne qu'il s'agit d'une classe politique qui plus est, s'abîme dans des querelles oiseuses et des rivalités aux antipodes des préoccupations du citoyen lambda, fourvoyé par le surinvestissement de la politique politicienne et des inextricables querelles de chapelle. La campagne électorale qui a pris fin vendredi en est témoin, les partis et leurs séides, qui sont à court d'arguments, se contentent de brasser le vide, relève-t-il, expliquant qu'ils s'ingénient, dans leurs tentatives d'accaparer les faveurs de l'électeur potentiel, à promettre à tout-va et à user du miroir aux alouettes. Dans ce sens, les membres de l'ISIE ont exhorté les électeurs à participer en masse à ces élections municipales pour "consacrer la démocratie et concrétiser dans les faits le pouvoir local stipulé par la Constitution". "La participation aux élections municipales est un engagement pour le pouvoir local, fixé par le code des collectivités locales et constitue la deuxième constitution de la république tunisienne", a souligné Anouar Ben Hassan, membre de l'Instance. Dans des déclarations à la presse, M. Ben Hassan a affirmé que l'organisation du pouvoir local et de la vie politique "ne peut se faire sans contrôle des fonds politiques des partis, des associations et organisations actives dans le pays". Il a assuré que l'ISIE "s'est bien préparée au plan logistique pour ce grand événement". Pour Anis Jarboui, membre de l'Instance, l'ISIE est "à 100%" prête pour cette échéance électorale, notamment, sur les plans technique et logistique. Selon lui, le vote du 29 avril 2018, réservé aux sécuritaires et militaires a été "un essai réussi" pour l'ISIE en termes de préparation pour les procédures à suivre dimanche prochain. Pour ce qui concerne la préparation logistique, Jarboui a indiqué que les bulletins de vote pour les élections municipales ont été réalisés en 13 modèles et dans différents formats de manière à tenir compte du nombre des listes candidates dans chaque municipalité. "Ces bulletins de qualité supérieure, se présentent en différents formats : un bulletin de grand format comportant 14 listes et un bulletin de petit format comportant 2 listes", a-t-il expliqué. Et d'ajouter que les bulletins de vote ont été distribués par les unités de l'Armée nationale sur les instances régionales des élections accompagnés des procès-verbaux de dépouillement et de collecte. En ce qui concerne la campagne électorale et la sensibilisation, les analystes politiques considèrent que ces élections feront office de véritable baromètre de la popularité des partis en Tunisie, particulièrement ceux détenant le pouvoir. Selon eux, la campagne électorale sera un facteur déterminent dans la compétition engagée entre candidats indépendants et candidats d'un parti. Les indépendants ont, en effet, créé la surprise du point de vue nombre des listes candidates. Pour encourager les Tunisiens à se rendre aux urnes surtout après la faible affluence des sécuritaires et des militaires (taux d'abstention de 88 %), une campagne de sensibilisation et de mobilisation a été initiée par l'ISIE avec le concours des composantes de la société civile, à l'instar de "ATIDE" et "Mourakiboun". A ce sujet, le président de l'association "Kolna Tounes", Moez Attia, estime que l'ISIE a lancé sa campagne de sensibilisation avec du retard, expliquant que cette courte campagne qui a démarré 12 jours avant la date des élections, n'aura, selon les experts, aucun impact sur le citoyen.