* La problématique des assurances obligatoires au Maroc se pose pratiquement dans les mêmes termes qu'au sein d'autres pays. * La France, considérée comme «championne» du monde de l'assurance obligatoire, nous sert toujours de référence. Lesprit juridique qui a donné naissance à l'assurance obligatoire a été souvent animé par un souci de mieux protéger les personnes et les biens contre les aléas de l'avenir. Pour Luc Mayaux, directeur de l'Institut des assurances de Lyon, «sur les 100 types d'assurances existantes en France, ce sont pratiquement quelque 95 qui sont de nature obligatoire». Autrement dit, le législateur français s'est toujours efforcé de trouver des «garanties obligatoires» pour tous les domaines et secteurs d'activité que couvre actuellement l'Assurance obligatoire. Le premier point important que soulève cette grande panoplie des régimes d'assurances est relatif à la question de savoir s'il «faudrait trouver un régime de droit commun pour toutes ces catégories d'assurances obligatoires ou bien se contenter de les réglementer de manière isolée». Des règles communes à toutes les assurances obligatoires impliqueraient en fait de savoir comment mettre en place une assurance de ce type, au même titre que celui de «l'autorité habilitée à le faire». Pour Luc Mayaux, l'expérience française se caractérise dans ce registre par une certaine souplesse. Car «une assurance obligatoire pourrait être édictée aussi bien par une loi, un règlement ou un arrêté ministériel». C'est dire que la question de son champ d'application ainsi que les exigences qu'elle comporte sont souvent objet de discussion. Que ce soit entre assureurs et assurés ou entre les professionnels de l'assurance et les pouvoirs publics. Il faut remarquer que d'importants problèmes procéduraux éclatent lors de l'évaluation des garanties dites «obligatoires». Un lien doit donc être trouvé entre le risque couvert et les fonds de garantie servant à le couvrir. Car ce n'est pas toujours une chose évidente. C'est ainsi qu'un Fonds de garantie est normalement institué «pour indemniser les victimes des dommages résultant de l'acte de personnes demeurant inconnues ou qui ne sont pas assurées». D'un autre point de vue, la logique des assurances obligatoires continue de nourrir le débat «classique» sur la place réservée à la concurrence lorsque les pouvoirs publics imposent des contrats-types auxquels non seulement les assurés sont tenus de se conformer, mais aussi les professionnels. Souvent dans ce genre de situations réglementaires, la marge de manuvre des opérateurs pour attirer la clientèle est minime. «C'est une atteinte à la concurrence, estime Luc Mayaux, du moment que les tarifs sont strictement réglementés et que ni les assureurs ni les assurés ne peuvent y déroger». Le paradoxe vient en fait de l'amalgame «voulu» des pouvoirs publics de faire intervenir des considérations d'ordre public pour une activité ou des contrats typiquement de droit privé. Ceci «a produit, toujours selon le Directeur de l'Institut des assurances de Lyon, une assurance obligatoire dérogatoire à la technique assurantielle. On peut dire que c'est une assurance dénaturée». L'évolution juridique en France montre aussi que l'assurance facultative a fait preuve de son échec. «C'est cela qui a amené le législateur à instaurer le caractère obligatoire pour la couverture de certains risques auxquels les assurés sont toujours indifférents». Actuellement, la formule des contrats collectifs est plus invoquée pour rédiger les contrats d'assurance obligatoire. Elle aura l'avantage de mieux mutualiser les risques et donc d'assurer la solvabilité de l'assureur en cas de sinistre. C'est ce que Luc Mayaux a appelé «les contrats-parapluies, souscrits par les associations professionnelles telles celles des avocats et des notaires qui permettent de protéger tous les membres». Il reste à souligner que l'analyse de Luc Mayaux est restée quand même prisonnière des soucis des opérateurs d'assurance ; omettant par là le rôle essentiellement de «justice sociale» confié à l'assurance obligatoire. Certes, la logique du droit privé reste opérante pour mettre au jour certaines «contradictions» dans la philosophie juridique du législateur français, mais cela n'empêche pas de constater que l'assurance obligatoire obéit d'abord à une logique de solidarité, qui dépasse de loin celle de «l'autonomie de la volonté» ou de «la libre-concurrence» entre les opérateurs.