* Avec lavènement de la nouvelle circulaire sur le contrôle interne pour les compagnies dassurance, lALM est en cours de mise en place de façon implicite et progressive. * Par le biais de lALM, la caisse pourra revoir à temps sa politique de placements en vue déviter les éventuels gaps de trésorerie futurs en re-paramétrant, par exemple, son régime de retraite. * Siam Barki, actuaire, manager au cabinet ARM Consultants, cabinet de conseil en Actuariat et Risk Management, livre son point de vue. w Finances News Hebdo : En quoi consiste la gestion Actif-Passif, en particulier au sein des caisses de retraite ? w Siam Barki : La gestion Actif-Passif est un ensemble de techniques actuarielles et financières permettant la vérification de ladéquation future entre les engagements dune caisse de retraite et ses actifs. En langage plus clair : dun côté, la caisse de retraite encaisse des cotisations quelle investit dans des supports financiers et, de lautre côté, elle doit payer des prestations à des échéances futures. LALM consiste à optimiser le choix des supports dinvestissements et à faire coïncider leur durée avec les sorties des prestations. Ceci passe à travers une projection du passif de la caisse représentant, sur un horizon longtermiste, ses engagements pour chaque année. Cette projection est ensuite confrontée à celle des cash flows futurs des actifs de la caisse (valeurs mobilières, immobilier ), en vue danticiper les gaps futurs entre les engagements et les ressources de la caisse. Ainsi, le management de la caisse sera en mesure daméliorer sa politique de gestion dactifs, voire la transformer en une nouvelle stratégie dallocation dactifs dans le but dassurer un meilleur équilibre annuel entre les engagements (pensions à servir) et les actifs de la caisse. w F.N.H. : Aujourdhui, où en est la gestion ALM au sein des régimes de retraite nationaux qui, il faut lavouer, sont confrontés à un problème de taille quest la pérennité ? w S. B. : A ma connaissance, la majorité des régimes de retraite nationaux réalise des études ALM via leur département Actuariat ou Etudes. Dailleurs, plusieurs dentre eux ont engagé ces dernières années des consultants pour la réalisation détudes ponctuelles dALM, ou même pour la mise en place dune cellule ALM. Toutefois, en labsence dune exigence réglementaire pour des rapports ALM, ces derniers demeurent un besoin interne de pilotage, et sont également communiqués aux gestionnaires dactifs de la caisse pour adapter leur allocation tactique aux conclusions de ce rapport. w F.N.H. : Quels sont les risques que doivent gérer au quotidien les caisses de retraite ? Et comment la gestion actif-passif peut-elle répondre à cette problématique ? w S. B. : Dans le cas dune caisse de retraite, ce sont essentiellement les risques démographiques (vieillissement de la population) et économique comme lévolution des assiettes de cotisation qui ont un impact crucial sur ses engagements. Ces paramètres déterminent, en grande partie, la valeur et la maturité du passif de la caisse. La gestion Actif-Passif napporte pas de réelles solutions pour corriger le passif. Puisque ce dernier est, au sens pur, un engagement vis-à-vis des adhérents de la caisse. Cependant, elle peut à un certain degré dexactitude localiser, dans le temps, les difficultés de trésorerie futures que peut rencontrer la caisse et évaluer leur ampleur. Cest ainsi que la caisse pourra revoir sa politique de placements en vue déviter les éventuels gaps de trésorerie futurs, voire revoir la structure de ses engagements, en re-paramétrant par exemple son régime de retraite. w F.N.H. : Quelles sont les étapes importantes dans la construction dune ALM ? Et quels en sont les apports ? w S. B. : Pour rappel, lALM est dabord un exercice technique qui est souvent confié à des actuaires. En effet, la gestion Actif-Passif requiert des compétences statistiques, actuarielles et financières (finance de marché). En plus de ces compétences spécifiques, elle nécessite également une connaissance transversale de lensemble de lactivité de la caisse, notamment par la personne qui supervisera ce travail et validera les valeurs des paramètres et hypothèses de projections. LALM ne peut être réalisée sans une forte synergie entre léquipe ALM et dautres départements de la caisse, comme en particulier celui des gestionnaires dactifs. Ce besoin favorise alors la constitution dune commission de pilotage incluant des représentants des différents départements contribuant dans lalimentation des inputs dun logiciel de calculs ALM. A ce titre, cet outil devrait être connecté au système dinformation global de la caisse de telle sorte quil puisse salimenter en temps réel des informations sur les adhérents, les cotisations, les prestations et les actifs de la caisse. Dautres modèles moins sophistiqués peuvent être mis en place lors du démarrage de lALM, sur la base dune application extrasystème qui doit être alimentée manuellement de façon ponctuelle. Cependant, ce type doutils nécessite plus de vigilance lors de son utilisation. w F.N.H. : Pourquoi, à votre avis, lALM nest-elle pas encore standardisée ? w S. B. : Il convient de noter que sur le plan national, les caisses de retraite et les compagnies dassurance sont en retard dans lexercice ALM par rapport aux banques. En effet, ces dernières sont, depuis quelques années, tenues de présenter des reporting ALM et sont, à ce titre, mieux outillées sur le schéma organisationnel. Cependant, avec lavènement de la nouvelle circulaire sur le contrôle interne pour les compagnies dassurance, qui exige certains résultats sur la solvabilité proches de ceux de lALM, cet exercice est en cours de mise en place de façon implicite et progressive. Peut-être que lapplication des mesures prudentielles du projet Solvency II apportera, à moyen terme, une pratique standardisée de lALM au niveau des caisses de retraite et compagnies dassurance marocaines.