* Sur un périmètre de plus de 20 kilomètres autour de Tanger Med, il nexiste que des écoles primaires et un seul collège. * Les opérations dexpropriation de terrains nont pas favorisé limplantation des entreprises, notamment celles susceptibles doffrir des services : restauration, hôtellerie... Après des décennies de marginalisation du Nord, le pouvoir a initié des projets qui auront un effet structurant et à forte valeur ajoutée dans la région, en particulier, et pour léconomie nationale, en général. Sur la liste des mégaprojets entamés, le port Tanger Med occupe le haut du podium. Il sagit effectivement dun nouveau moteur de création de richesses faisant de la région un pôle international des investissements. Lobjectif principal, selon les autorités compétentes, est la création demplois. Ils tablent sur 140.000 postes de travail. La formation, priorité absolue A la question avez-vous bénéficié de ce projet en terme de création demplois ? Malheureusement, les habitants de la région de Ksar Sghir répondent : non. «Il est vrai que le nouveau port impliquera une véritable métamorphose dans la région. Pourtant, le faible niveau de formation résultant de labsence de centres de formation ne favorise pas lemploi des habitants de cette région. Seuls ceux qui disposent dun permis de conduire poids lourd ont pu décrocher un emploi», affirme un chauffeur de taxi qui connaît très bien la région. Effectivement, sur un périmètre de plus de 20 kilomètres autour de ce port, il nexiste que des écoles primaires et un seul collège. Cela a engendré un faible niveau de formation, ce qui a poussé les jeunes de la région vers des activités illégales telles que la contrebande et le trafic de drogue. Actuellement, la forte présence des autorités a provoqué une chute libre du chiffre daffaires réalisé par ces activités. Pour remédier à la situation, lOFPPT a lancé vers la fin de lannée précédente les travaux de construction dun centre de formation professionnelle dans la région de Melloussa. Sagissant des deux grandes villes de la région, elles disposent de plus en plus de centres de formation. À titre indicatif, Tanger, à elle seule, compte au moins six centres de formation professionnelle qui forment environ 1.000 diplômés par an. En outre, la Faculté des sciences techniques (FST), lEcole nationale des sciences appliquées (ENSA) et lEcole nationale de commerce et de gestion (ENCG) alimentent chaque année le marché de lemploi par des ingénieurs et des cadres. Mais vu laccélération fulgurante de la demande de diplômés, les établissements de formation sont appelés à accroître le nombre de leurs lauréats. Il est à signaler que certains établissements comme la Faculté des sciences juridiques, économiques et sociales de Tanger (FSJEST) susceptibles dassurer la formation dune part importante de cadres, noffrent même pas un diplôme détudes approfondies dans la branche économie et gestion dentreprises. Selon un étudiant à la FSJEST, «il ny a que des DESS privés, cest plus du business que de la formation». Le prix de limmobilier bat tous les records La mise en place du port, de lautoroute, du chemin de fer a nécessité un opration dexpropriation des terrains. Ce qui est tout à fait normal. En contrepartie, lEtat a promis doctroyer aux personnes touchées par cette opération des terrains disposant dune infrastructure de base, notamment la fourniture deau et délectricité. Cependant, les habitants de Bni Mathar concernés par les opérations dexpropriation ont bénéficié dun terrain à Aïn Chouka qui ne dispose daucune infrastructure. Par ailleurs, malgré la mise en place dun réseau de transport, les opérations dexpropriation nont pas pris fin. Cela a poussé les propriétaires de terrains à revendiquer plus de transparence. «Nous avons contacté même les hautes institutions judiciaires telles que Diwan Al Madalim... Finalement, nous avons pu amortir cette vague croissante dexpropriation inexplicable», déclare un propriétaire terrien à Ksar Sghir. Les opérations dexpropriation ont poussé les opérateurs immobiliers à être très vigilants. «Personne ne peut saventurer à acheter des terrains puisquil risque une expropriation pour cause dutilité publique. Néanmoins, je connais des gens qui ont vendu des dizaines dhectares à des propriétaires non connus. Je pense que ce sont de grandes entreprises», affirme, par ailleurs, un propriétaire de terrain. Cela na pas favorisé limplantation des entreprises, notamment celles susceptibles doffrir des services. En effet, jusquà présent, Ksar Sghir compte seulement trois petits restaurants et quatre épiceries, au moment où cette région est appelée à connaître dans un an une hausse massive de la demande des services. Actuellement, et suite à la clarification des opérations dexpropriation de terrains pour utilité publique, les prix de limmobilier de la zone qui entoure le port ont enregistré une hausse flagrante. Lautre constat qui simpose en analysant le développement de limmobilier, mais cette fois-ci dans la ville même de Tanger, est la montée en puissance des projets immobiliers, notamment dans la région de Boukhalef. En fait, des complexes immobiliers des groupes Addoha, Jamaï et notamment des opérateurs immobiliers régionaux poussent comme des champignons dans cette partie de Tanger située à moins de deux kilomètres de lautoroute qui mène directement de Tanger vers le nouveau port. De tels projets permettront dembaucher de plus en plus de main-doeuvre tout en diminuant la forte pression sur limmobilier à Tanger qui se dresse en véritable obstacle aux investissements. En fait, la demande exacerbée sur limmobilier, alimentée par une spéculation acharnée, pousse les prix du mètre carré au-delà de 50.000 DH dans certains quartiers de la ville du Détroit. Bref, il est vrai que le port Tanger Med représente une première dans le développement de la région du Nord, cependant les problèmes relatifs au secteur immobilier et à la formation adéquate constituent une entrave à lévolution économique équilibrée de la région.