* Le dialogue social enclenché cette semaine se veut tripartite et le Patronat reste confiant dans la mesure où toutes les parties sont conscientes de la difficulté de la conjoncture actuelle. * Dun point de vue économique, laugmentation du SMIG ne saurait se faire au détriment de la compétitivité du Maroc sur la scène internationale. * Préserver lemploi, améliorer le pouvoir dachat et assurer une performance économique, telle est la délicate équation que le Maroc doit résoudre. La hausse subite des cours des matières premières a provoqué une érosion sans précédent du pouvoir dachat du consommateur marocain. Cétait donc une réaction tout à fait normale et attendue des syndicats de revendiquer une hausse du SMIG. Mais est-ce aussi facile quon peut le croire ? Rien nest moins sûr. Le gouvernement Abbas El Fassi a entamé une série de rencontres avec les syndicats et plus tard avec le Patronat pour étudier léventualité dune révision à la hausse du SMIG. Mais jusquà ce jour, les quelques déclarations faites à la presse et aux médias officiels ne laissent rien augurer de lissue de cette première épreuve de ce gouvernement en terme de dialogue social. Aura-t-il plus de chance que son prédécesseur qui a cédé face aux revendications syndicales, sattirant ainsi les critiques des institutions économiques internationales ? Il faut dire que la conjoncture économique actuelle constitue un vrai boulet. Dabord, tous les paramètres à la base desquels a été élaboré le Budget de lannée sont biaisés par une flambée sans précédent des matières premières et du cours du baril de pétrole. Au Maroc, les hypothèses dun taux de croissance de 6,8 %, un taux dinflation de 2 % et une année agricole moyenne de 60 millions de quintaux, battent en brèche. Autre contrainte dont souffre le Maroc et que personne névoque : la dégradation permanente de la balance commerciale. Pour Driss Benali, économiste, deux issues sont possibles en pareil cas : acheter la paix sociale en sacrifiant la croissance et en exposant léconomie à une stagnation permanente, ou avoir le courage politique de poursuivre le train des réformes entamées par le Maroc. «La conjoncture actuelle ajoutée aux conditions de constitution de ce gouvernement, laissent supposer que ce dernier optera pour la paix sociale. Il y a tout de même lieu de signaler une note positive dans ce décor : la situation financière positive du Maroc grâce aux transferts des MRE, aux entrées touristiques et aux IDE», poursuit Benali. Ce nest pas pour autant quil faille grignoter sur cette bulle doxygène. Concernant le cahier revendicatif des syndicats, notamment un SMIG de 3.000 DH, Driss Benali estime que le Maroc nest pas en mesure doffrir un pareil SMIG puisquil est aux prises avec une compétition mondiale rude. Seule alternative pour le pays : faire montre dune croissance forte avec une productivité et une compétitivité plus importantes. Cest pratiquement le même son de cloche du côté du Patronat marocain. Interpellé sur la question par nos soins, Moulay Hfid Elalamy, le Président de la CGEM, estime quil sagit dun dialogue social tripartite marqué par la conscience de chacune des parties de la conjoncture actuelle. «Il faut se rendre à lévidence que lorsquon a fait le choix dune économie libérale ouverte sur léconomie internationale, il faut assumer ce choix que lorsque léconomie internationale est impactée, léconomie nationale nest pas épargnée. Mais par rapport à ce qui se passe en Europe ou en Amérique, qui connaissent des difficultés énormes, léconomie nationale se porte plutôt bien», explique-t-il. Cela na pourtant pas empêché les syndicats de monter au créneau pour réclamer une hausse du SMIG à 3.000 DH. En guise de réponse, le patron des patrons estime que : «La cherté de la vie nest pas uniquement commune au Maroc, puisque tout le monde se plaint de la flambée des cours des matières premières et le SMIG nest quune composante dun processus global. Il ne faut pas perdre de vue quil faut préserver les emplois, et quon ne peut pas jouer de manière inconsidérée avec la compétitivité économique du Maroc. Là-dessus, la marge de manuvre est très limitée. Au-delà dun certain seuil, on tue le patient», faisant référence à cette compétitivité concurrencée par dautres pays. Par ailleurs, Moulay Hfid Elalamy résume la situation en trois points. Dabord, faire face à la cherté de la vie en augmentant le pouvoir dachat. Deuxièmement, lamélioration de ce pouvoir dachat ne passe pas forcément par une augmentation du SMIG, car cette augmentation ne sert à rien si les matières premières poursuivent leur hausse. Dernier point, cest la préservation de la situation financière positive. Il reste néanmoins confiant que tous les partenaires de ce dialogue sont conscients de ces paramètres, cest pourquoi il demeure optimiste quant à laboutissement de ce dialogue.