Même tenus par un serment, certains avocats peu scrupuleux ne respectent pas les règles déontologiques du métier. Pis encore, par leurs agissements à vouloir arnaquer à nimporte quel prix leurs clients, ils portent atteinte à une profession dont les pratiquants sont censés défendre les droits des victimes. La révision du règlement professionnel saura-t-elle mettre fin à des pratiques qui ternissent limage des défenseurs de la loi ? Amina est une simple femme qui, après le décès de son père devait recourir au tribunal dans le cadre dun litige, relatif à un héritage, layant opposée à ses frères. Lhéritage, estimé à 6 MDH, ne laissa pas sans saliver son avocat. En véritable escroc et profitant de la crédulité de sa cliente, il lui fit signer des documents quelle prit pour une simple procuration, étant une femme illettrée. Grand fut son étonnement quand vint le jour où elle devait toucher sa part de lhéritage : le document signé par ses soins était en fait une reconnaissance selon laquelle elle cédait à son avocat sa part de lhéritage, chiffrée à 1 MDH, pour la modique somme de 2000 DH. Selon nos dernières informations, suite à léchec de son recours au bâtonnier de sa ville, elle a adressé un courrier au procureur du Roi. Elle attend toujours louverture dune enquête. Le cas de cette femme nest pas isolé. En effet, nombreux sont les clients qui ont été lésés par des avocats malhonnêtes. Ces derniers ne reculent devant rien pour semparer des sous de leurs clients. Tout y passe : pension alimentaire, héritage, primes dassurances Que faire en cas darnaque ? Pour Mohamed H. avocat au barreau de Casablanca, «bien que la très grande majorité des avocats offre des services professionnels de qualité, il est possible que lun deux ait fait preuve dincompétence à votre égard, quil ait enfreint la loi, ou un règlement professionnel, ou quil vous ait causé un dommage. Vous disposez alors dun droit de recours». Il affirme à cet égard que durant 2004, quatre avocats ont été radiés du barreau de Casablanca pour des motifs de ce genre. Pour porter plainte contre un avocat, il faut adresser un courrier au bâtonnier de la ville où exerce lavocat en question. Le Barreau de Casablanca, par exemple, a comme principal mandat dassurer la protection du public. Ainsi, il doit veiller à la discipline au sein de la profession, au respect de la déontologie ainsi quà la vérification de la compétence tant de ses membres que de ceux qui veulent rejoindre ses rangs. Il faut toutefois savoir quune plainte auprès de lOrdre ne peut pas aboutir à des dommages et intérêts. Si le client estime quil doit être indemnisé pour les dommages subis, il devra sadresser directement au tribunal et au procureur du Roi. Théoriquement, pour quune enquête soit ouverte, il faut adresser un courrier au Barreau de la ville où est domicilié lavocat concerné en mentionnant les motifs de la plainte. Il est recommandé aussi de joindre à la plainte tout autre document utile pouvant étayer les accusations du client lésé. Si les accusations sont vérifiées, lavocat risque de se voir interdire lexercice de la profession pendant un an. Si la faute est grave, la radiation du registre des avocats doit être de mise. Les sanctions sont en fait dures. A vrai dire, il y a de quoi. Cependant, dans la réalité, les choses ne sont pas aussi claires et simples. Les litiges ternissent limage dune profession qui compte un effectif très important au point que certains avocats ne se gênent pas délire domicile même dans des cafés. De fait, le contrôle devient dautant plus difficile que des «clients, ignorant leurs droits, encouragent de manière indirecte certains avocats peu scrupuleux à accomplir leur forfait», souligne Mohamed H. Un avocat de Casablanca a même osé falsifier un jugement ; cela lui a valu juste une mutation au Barreau de Benslimane. Dautres nhésitent pas à mettre dans leurs poches les primes dassurances ou les pensions alimentaires de leurs clientes. Les moins scrupuleux investissent largent des clients quelques mois pour les rembourser après : un crédit sans intérêt en somme, mais qui relève de la malhonnêteté. Cet état de fait durera-t-il? Une révision récente de la réglementation régissant le métier davocat a essayé dy mettre fin. Ainsi, «un avocat ne peut plus se présenter à la cour pour défendre un client sans autorisation spéciale». La révision prévoit aussi que les primes, ou toute somme dargent perçue suite à un procès, doivent être déposées au tribunal dans un délai maximum de 15 jours. Passé ce délai, lavocat est sommé daviser son client pour que ce dernier vienne récupérer la somme en question auprès du tribunal. Létau se resserre donc de plus en plus autour de ces avocats qui ont souillé cette profession. Est-ce pour autant gagné ? «Les clients doivent bien connaître leurs droits, mais également sadresser à des avocats spécialisés et non à des touche-à-tout», rétorque H. Mohamed.