* 2002, 2005 et nous voilà en 2007 toujours à parler du projet de libéralisation de lélectricité. * La libéralisation simpose, mais les amendements actuels suscitent beaucoup de remarques. * Une nouvelle réunion sest tenue la semaine dernière. La modernisation et la libéralisation de lélectricité encore une fois sur la table ! Le projet de loi a fait lobjet dune récente réunion entre les Directeurs de lAdministration centrale, notamment du ministère des Finances, de lIntérieur, de lEnergie et des Affaires générales pour passer en revue les amendements au projet de loi sur la libéralisation de lélectricité. Les prémices dun dénouement dun projet qui traîne depuis 2002 ? Espérons-le, puisque cette libéralisation est fortement réclamée par le secteur de lénergie qui y voit la possibilité de lémergence de nouveaux marchés au sein de la chaîne de valeur. Un schéma basé sur la création de deux pôles d'approvisionnement selon les usagers, domestiques ou professionnels, devait être mis en place en 2005, et à la mi-2007, le projet est remis à lordre du jour. Il intervient dans une année où lOffice National de lElectricité accuse un déficit de 1,7 milliard de DH. Il a dailleurs suscité beaucoup de remarques, notamment de la part de la Fédération de lEnergie qui a mis en exergue les expériences de libéralisation réussies à travers le monde. «Quelle que soit la région ou le pays, les libéralisations qui ont réussi ont exigé un engagement et une détermination des autorités politiques. Elles ont été accompagnées dune large concertation et de limplication de tous les acteurs du secteur», rappelle demblée Moulay Abdallah Alaoui, Président de la Fédération de lEnergie. Le transport doit rester entre les mains de lEtat La concertation est donc de mise avec les différents intervenants sur le secteur de lénergie, notamment les investisseurs potentiels. Les expériences réussies ont en général préconisé la restructuration du secteur en dissociant distinctement chaque maillon de la chaîne de valeurs de lélectricité (unbundling), à savoir production/transport/distribution. Avec la présence dun organisme de régulation fort, crédible et indépendant. Afin de garantir que ses missions seffectuent en toute transparence et sans discrimination, lactivité transport doit être contrôlée par un régulateur de lénergie. Ce régulateur, autorité administrative indépendante, sera en charge de veiller au bon fonctionnement du marché et darbitrer les contentieux entre les utilisateurs et les différents exploitants. Cest également elle qui fixe les tarifs dutilisation du réseau de transport délectricité. Cest un monopole naturel de lEtat qui doit assurer à tout instant léquilibre production-consommation sur tout le territoire marocain pour quil ny ait aucune perturbation de la vie économique et domestique. Une fois lactivité de transport séparée du reste de lindustrie, la question majeure qui se pose est celle du market design : quel est le mode dorganisation des marchés de lélectricité à mettre en place de façon à ce que les flux physiques et commerciaux entre les producteurs et les consommateurs puissent fonctionner de façon efficace et concurrentielle ? La libéralisation aux yeux de la Fédération de lEnergie La Fédération de lEnergie a sa petite idée derrière la tête pour y parvenir. Le recours au mécanisme de marché favorisant lefficacité économique de la chaîne et fournissant un référentiel transparent des prix est de mise. Il faut également assurer un accès non discriminatoire et transparent aux réseaux de transport et de distribution. Et surtout avoir un marché spot pour fournir un référentiel transparent des prix, explique My Alaoui. Lexpérience des libéralisations montre quil est prudent de déployer les instruments de ce processus par phases et quil est important dafficher les échéances de mise en application des différents paliers longtemps à lavance pour que les différents acteurs aient la visibilité nécessaire pour sy préparer, souligne My Alaoui. Il estime dailleurs que les investisseurs producteurs devraient avoir la possibilité de vendre leur production non seulement sur le marché local, libre et réglementé, mais également via linterconnexion sur le marché européen et africain. Partenaire incontournable sur les questions énergétiques, la Fédération Nationale de lEnergie a émis un certain nombre de suggestions, notamment que lONE continuera à opérer sur toute la chaîne de lélectricité dans des fonctions totalement incompatibles et présentant un risque trop grand de distorsion de la concurrence. Il sagit des cumuls de fonctions dopérateur système, dopérateur du marché et dacheteur unique. «Nous préconisons la constitution dunités juridiques et sociales indépendantes pour opérer dans ces différentes fonctions», propose le Président de la Fédération de lEnergie. Il a également été relevé que la cohabitation de deux types de producteurs est susceptible dintroduire une confusion chez les investisseurs éventuels : ceux qui peuvent vendre leur production sur le marché libre et ceux qui doivent écouler leur production sur le marché réglementé. «Nous préconisons de mettre la totalité du parc de production non ONE sur le marché libre et de mettre en place un système de compensation pour la part de production qui opère sous la forme dun contrat de concession. Les distributeurs pouvant moduler leur courbe de charge par la tarification doivent pouvoir acheter la totalité de leur énergie sur le marché libre». «Enfin, il nous semble important que la loi donne un calendrier de lévolution des seuils déligibilité et prévoie le retour des clients éligibles sur le marché réglementé pour ceux qui lont quitté», ajoute le Président de la Fédération. Il souligne par ailleurs que dans les pays en développement, où les besoins dinvestissements sont élevés, le mode de financement préconisé depuis les années 80 par la Banque mondiale est lappel au capital privé international.«Cest ainsi que lon a vu se multiplier les producteurs indépendants privés (Independent Power Producers) qui revendent en général lélectricité produite aux opérateurs historiques locaux à travers des contrats de vente à long terme (Power Purchasing Agreements ou PPA)», ajoute-t-il. Une chose est sûre, la libéralisation est un projet qui simpose durgence, surtout que le Maroc est très à cheval sur le développement du gaz naturel. Donc autant avoir un schéma déjà prêt à même de favoriser un bon développement du secteur. Et surtout que le Maroc est essentiellement entouré de marchés libéralisés, que ce soit ses partenaires en Europe ou en Afrique, de même quil doit se mettre en conformité avec les directives de Bruxelles. «En plus de ces conditions, lidée davoir un marché concurrentiel sur lequel sétablit, en temps réel, un équilibre instantané entre loffre et la demande, est des plus séduisantes», conclut My Abdellah Alaoui.