* Un tour d'horizon sur les principaux résultats enregistrés par l'industrie marocaine en 2005, les principales tendances et les perspectives à venir, avec Mohssine Semmar, Directeur des Etudes et de la Planification au ministère de l'Industrie, du commerce et de la Mise à niveau de l'économie. Finances News Hebdo : Globalement, quelle lecture faites-vous des résultats enregistrés par l'industrie marocaine en 2005 ? Mohssine Semmar : Le secteur des industries de transformation a enregistré durant l'année 2005 de bonnes performances au niveau de la majorité de ses grandeurs économiques, comparativement à l'année 2004. Le secteur industriel représente près de 19,6% du PIB national, soit près de 3 points de plus par rapport à l'exercice 2004, ce qui dénote du dynamisme que vit ce secteur et qui confirme le potentiel dégagé à travers la nouvelle feuille de route du secteur, à savoir le programme Emergence. Le PIB industriel, après une stagnation en 2004, a connu cette année une progression notable, soit une croissance nette de 18%. Aussi, l'investissement et la production ont marqué cette année la poursuite de leur expansion et ont enregistré des taux d'accroissement importants, soit 12% chacun. Quant à l'exportation, elle a évolué positivement mais à un rythme moins élevé qu'un an auparavant, en diminution d'un point avec un taux de 5% par rapport à l'année passée. La seule variable qui a été affectée cette année par une baisse est le nombre d'employés dans le secteur industriel qui a diminué de 6% contre une légère hausse de 1% en 2004. En fait, à part le secteur du textile et du cuir, tous les autres secteurs d'activité ont connu une amélioration notable au niveau de la majorité de leurs grandeurs économiques. En effet, viennent au premier rang le secteur agroalimentaire et le secteur métallique et mécanique qui ont enregistré les meilleurs résultats comparativement à l'an 2004. Par ailleurs, les industries agroalimentaires est le secteur qui a contribué le plus cette année à la création de valeur ajoutée après le secteur chimique et parachimique en marquant en 2005 une augmentation de 5 points de sa contribution au PIB industriel, à savoir 37% après 32% en 2004. Le deuxième secteur qui a connu de bonnes performances est le secteur métallique et mécanique qui a enregistré des résultats très importants au niveau de la majorité des variables économiques, à savoir 24% pour la production, 195% pour l'investissement, 69% pour les exportations et 11% pour la valeur ajoutée. L'emploi a connu un recul de 5%. Pour le secteur des industries électriques et électroniques, ses principales grandeurs ont marqué de bonnes performances comparativement à l'an précédent. Ainsi, après des augmentations de 10%, 1% pour la production et la valeur ajoutée, celles-ci ont connu des évolutions plus importantes, à savoir 13% et 14%, au moment où l'investissement et l'emploi ont enregistré des hausses considérables respectives de 42% et 8% après des chutes de 2% chacun en 2004. De même, le secteur chimique et parachimique qui a enregistré des résultats satisfaisants l'an passé a fait preuve cette année d'un bon élan et a poursuivi son dynamisme. Seul l'investissement a accusé un recul de 14% après une progression remarquable de 60% en 2004. Pour ce qui est du secteur du textile et cuir, la contre-performance en 2005 reflète le recentrage que ce secteur est en train de connaître ces dernières années. F. N. H. : En 2005, l'industrie du textile et du cuir a enregistré un léger recul dans sa contribution au PIB national avec une évolution de moins de trois millions de DH en terme de production. À quoi imputez-vous cela ? M. S. : Les industries du textile & du cuir occupent la troisième place dans l'industrie marocaine après les industries chimiques & parachimiques et les industries agroalimentaires. Elles ont participé en 2005 à hauteur de 3% du PIB national et 14% du PIB industriel. Pour cette année, les établissements industriels opérant dans ce secteur ont enregistré des contre-performances à l'instar de l'année antérieure mais leur contribution au PIB national s'est maintenue au même niveau en 2005 par rapport à l'année précédente, malgré la baisse de croissance observée au niveau de l'ensemble des agrégats économiques du secteur, hormis l'investissement. Les raisons de ces contre-performances s'expliquent par le processus de modernisation compétitive que le secteur est en train de vivre pour se repositionner au niveau du marché international. F. N. H. : L'autre tendance enregistrée est la baisse de 6 % de l'emploi créé par les grands secteurs de l'industrie, et cela semble être une tendance générale, à l'exception de l'industrie électrique et électronique. Qu'est-ce qui justifie cette tendance ? M. S. : La population employée dans le secteur manufacturier en 2005, soit près de 474.000 personnes, a accusé une baisse de 6 % comparativement à l'année 2004. Cette évolution négative est attribuée notamment aux baisses enregistrées au niveau des secteurs de l'industrie agroalimentaire et l'industrie textile et du cuir qui emploient ensemble 61% de l'effectif global. Ces deux secteurs ont accusé des baisses respectives de 22% et 5% par rapport à l'année 2004. De même, le secteur des industries métallique et mécanique a connu un recul du niveau de l'emploi de 5%. Quant au secteur des industries chimiques et parachimiques et le secteur des industries électrique et électronique, ils ont marqué des hausses de 5% et 8% cette même année. Le recul de l'emploi au niveau des industries de transformation peut être également expliqué par la conjugaison de l'effet des chutes de l'effectif permanent de 2% (représentant 94% de l'emploi industriel) et 45% de l'effectif saisonnier. D'autres paramètres peuvent expliquer ce recul; on peut citer la modernisation de l'outil productif à travers l'introduction de nouvelles technologies et l'automatisation croissante dans ce secteur, impératif de la compétition internationale. F. N. H. : En terme d'investissement, l'industrie métallique et mécanique a connu un grand rush avec 195 % d'évolution des investissements. Quels sont les facteurs ayant participé à cette évolution ? M. S. : Le secteur des industries métalliques et mécaniques a marqué en 2005 de meilleurs résultats comparativement à l'an 2004. Ainsi, et à l'exception de l'emploi, il a enregistré des taux de croissance positifs dans la plupart de ses grandeurs économiques, allant de 195% pour l'investissement à 69% pour l'export, 24% pour la production et 11% pour la valeur ajoutée. En effet, la croissance remarquable du montant investi dans ce secteur est attribuable notamment à l'augmentation notable de l'investissement dans la branche de la métallurgie qui représente près de 72% de l'investissement total dudit secteur et dont le niveau d'investissement a augmenté de presque 8 fois comparativement à l'année précédente. L'examen approfondi de cette évolution fait ressortir une croissance considérable de la sous-branche de la sidérurgie et production de ferro-alliages qui a vu son investissement se multiplier durant l'année 2005 par près de 13 fois. Cette sous-branche représente en fait plus de 91% de l'investissement de la branche de la métallurgie et 65% de celle du secteur métallique et mécanique. F. N. H. : Peut-on avoir une idée sur le comportement, en général, de l'industrie en 2006 ? M. S. : Nous disposerons des données définitives sur l'exercice 2006 de l'enquête annuelle sur les industries de transformation vers le troisième trimestre 2007. Mais déjà par rapport aux données primaires disponibles, nous pouvons signaler que l'année 2006 devrait enregistrer une tendance favorable eu égard au nombre important de projets d'investissements industriels engagés cette année, dans le cadre de conventions avec l'Etat, et qui se sont matérialisés par un investissement de plus de 15 milliards de DH, générant une création de 3.800 emplois supplémentaires et qui permettrait aussi de stimuler la croissance et dynamiser le tissu productif. Cet élan devrait se consolider à travers les différents chantiers structurants initiés autour des secteurs à forts potentiels identifiés dans le cadre du programme Emergence, à savoir l'off-shoring, l'automobile, l'aéronautique, l'électronique, le textile et cuir, l'agroalimentaire et les produits de la mer.