La loi 49-16 a institutionnalisé les pas-de-porte. Le nouveau texte introduit également une homogénéité avec d'autres dispositions juridiques récentes. La loi 49-16 concernant l'encadrement juridique des baux commerciaux au Maroc est très attendue. Elle entrera en vigueur à partir du mois de février 2017. Mais ce texte juridique si important reste peu assimilé par les usagers. Dans ce cadre, la Chambre française de commerce et d'industrie du Maroc (CFCIM) a organisé une conférence-débat pour présenter et expliquer cette loi. Elle a été animée par Nesrine Roudane, associé-gérant au cabinet Nero Boutique Law Firm. «Ce nouveau cadre juridique vient clarifier les droits et obligations des bailleurs et des locataires, et préciser des points sur lesquels le dahir du 24 mai 1955 restait silencieux, comblant ainsi les nombreuses failles contenues dans ce dahir, notamment l'article 112 du code de commerce», explique Roudane. Le nouveau texte introduit également une homogénéité avec d'autres dispositions juridiques récentes et prend en considération l'évolution de la jurisprudence dans le secteur. Les nouvelles dispositions ont apporté des clarifications sur les contrats de bail qui entrent dans son champ d'application et ceux qui en sont exclus. «La loi 49-16 a institutionnalisé les pas-de-porte. Elle exige que les contrats de bail soient établis par écrit, datés et signés par les parties contractantes. Le loyer est négocié entre les parties et ne peut être révisé qu'au-delà d'une période de trois ans dans la limite du taux légal de 10%», souligne l'intervenante. Les tribunaux regorgent de plusieurs dossiers ayant trait à la revalorisation de la valeur du loyer. Certains propriétaires voulant expulser le locataire à tout prix cherchent à le perturber à travers des demandes à répétition d'augmentation du loyer. Concernant le renouvellement du contrat, le texte est plus clair. Il précise qu'«à l'expiration du bail, le locataire a le droit de demander son renouvellement. Pour cela, il doit prouver que le local a été exploité de manière effective pendant deux ans au minimum. Si le bailleur refuse le renouvellement, il doit verser au locataire une indemnité égale au préjudice occasionné par l'éviction». Elle correspond à la valeur marchande du fonds de commerce, aux frais d'aménagement et travaux réalisés par le locataire et aux frais normaux de déménagement. Toutefois, le locataire peut être privé de cette indemnité s'il ne respecte pas certaines clauses du contrat comme le non-payement ou s'il a opéré des modifications sur le local sans le consentement du bailleur, lorsque ces changements compromettent la sécurité de la construction. «L'indemnité n'est pas due également lorsque l'immeuble menace ruine et la faute n'est pas due au bailleur concernant les travaux d'entretien ou lorsque le locataire utilise le bail à des activités non conformes à celles stipulées dans le contrat. Pour les professionnels, cette réforme assure plus de visibilité, mettra un terme au harcèlement des propriétaires et permettra aussi de booster l'offre du marché en baux commerciaux», affirme Roudane. En effet, dans certaines zones d'activité, les offres deviennent quasi-inexistantes alors qu'il y a plusieurs locaux fermés. Leurs détenteurs exigent des sommes injustifiées qui ne correspondent pas à la moyenne du marché. Cela perturbe la machine économique et impacte la création d'emplois et des affaires. Pour ce faire, la nouvelle loi se veut catégorique quant à l'abandon du local par le locataire sans payement. Au-delà de six mois, le bailleur peut saisir le président du tribunal de première instance, lequel statue en référé sur l'ouverture du local et sa récupération par le propriétaire. Le tribunal de commerce est compétent pour se prononcer sur tous les conflits juridiques liés aux baux d'immeubles ou de locaux loués à usage commercial, industriel ou artisanal. Outre le non-payement, le texte traite aussi le retard de payement. La loi autorise le bailleur de résilier le contrat s'il cumule trois mois d'impayés. Mais cette résolution n'est pas automatique. Le bailleur doit d'abord mettre en demeure son locataire par lettre recommandée avec accusé de réception. Il doit saisir le juge des référés et lui prouver que sa mise en demeure est restée vaine. Il doit prouver aussi que le montant des loyers dus correspondent au moins à trois mois. Avec ces nouvelles dispositions, on évite les longues et coûteuses batailles judiciaires. Plusieurs plaignants se découvrent parfois à leur insu des jugements inattendus et injustifiés.