Les engagements des fédérations professionnelles totalisent déjà 83% de l'objectif du PAI, soit 427.000 emplois engagés sur la période 2014-2020. 160.000 emplois ont d'ores et déjà été contractualisés. Le ministère a été profondément chamboulé avec la mise en place d'une Direction générale de l'industrie et une autre du commerce, et la création d'une super Agence de promotion. La charte d'investissement a, elle aussi, été révisée, avec de nouvelles incitations fiscales. Le bilan de Moulay Hafid Elalamy à la tête du ministère de l'Industrie était attendu au tournant par ses détracteurs et par les sceptiques. Il faut dire que les objectifs affichés en 2014 par le ministre au moment du lancement du Plan d'accélération industrielle (PAI), censé redynamiser un tissu industriel moribond, étaient pour le moins ambitieux : la création de 500.000 emplois, une hausse de 9 points de la contribution de l'industrie au PIB et une balance commerciale à l'équilibre. C'est dans ce contexte que Moulay Hafid Elalamy (MHE) a esquissé devant la presse nationale un premier bilan chiffré de sa stratégie, 2 ans après son lancement. Et si l'on se fie aux chiffres présentés, il semblerait qu'il soit en passe de réussir son pari. A la mi-juin 2016, 41 écosystèmes ont été lancés, rassemblant 19 fédérations professionnelles et couvrant 12 secteurs. Surtout, en termes d'emplois, les engagements des fédérations professionnelles totalisent déjà 83% de l'objectif du PAI, soit 427.000 emplois engagés sur la période 2014-2020. «Au lieu des engagements de 500.000 emplois sur 7 ans, nous en sommes à 427.000 en 2 ans. C'est une grande fierté», souligne le ministre. Mieux, 160.000 emplois ont d'ores et déjà été contractualisés. «Durant les dix dernières années, l'industrie n'a créé que 70.000 emplois, ce qui démontre qu'une dynamique est bien enclenchée», tient-il à préciser. Sur le plan du soutien financier de l'Etat, ce sont près de 17 milliards de DH qui ont été engagés dans le cadre du Fonds de développement industriel doté de 20 milliards de DH, tandis que pas moins de 1.147 hectares ont été mobilisés au service de l'industrialisation. Pour MHE, la moisson est plus que bonne, et à en croire ses paroles, ce ne serait qu'un début. Il prend l'exemple de la florissante industrie automobile pour nous donner un avant-goût de ce qui nous attend. «Aujourd'hui, avec 50 milliards de DH d'exportations et 30% de taux d'intégration, la valeur ajoutée (VA) qui reste au Maroc est de 15 milliards de DH. En 2020, avec 100 milliards de DH d'exportations et un taux de 65%, ce seront pas moins de 65 milliards de DH qui resteront au Maroc, soit un différentiel de 55 milliards de DH de VA en plus. A titre de comparaison, la campagne agricole exceptionnelle de 2015 a généré 22 milliards de DH. Vous voyez donc la puissance de l'industrie», argumente-t-il. Mais au-delà de ces chiffres encourageants qui doivent encore faire l'objet d'une analyse plus fine, la plus grande réussite du ministère réside dans l'adhésion et la mobilisation des fédérations sectorielles, notamment les plus grandes d'entre elles (AMICA, GIMAS, etc.), au PAI. D'ailleurs, une partie importante d'entre elles ne tarissent pas d'éloges sur leur ministre de tutelle. Ministère de l'industrie S.A Un ministre qui n'hésite pas à appliquer ses méthodes d'ancien PDG au département qu'il dirige. Celui qui se définit lui-même comme un «ex-futur opérateur» a procédé à une profonde réorganisation de son super ministère qui va de plus en plus ressembler à une véritable entreprise, avec la mise en place de plusieurs directions générales. C'est ainsi qu'une Direction générale de l'industrie a été créée avec pour mission de chapeauter l'ensemble des stratégies sectorielles. Une Direction générale du Commerce est également mise sur pied. Elle devra porter la stratégie Maroc Commerce 2020 qui sera détaillée prochainement. Dans son allocution, MHE a précisé que le «commerce a besoin d'être accompagné parce qu'il est pris en tenailles entre la grande distribution et les marchands ambulants». De plus, précise le ministre, les moyens mis en oeuvre auparavant étaient minimes. Visiblement, cela va changer avec la création de la nouvelle direction générale qui réunira et le commerce intérieur et le commerce extérieur. «Ce changement n'interviendra pas avant la prochaine législature», nous précise par téléphone Mohamed Abbou, ministre délégué en charge du Commerce extérieur. Naissance d'une super agence de promotion Maroc Export, l'Agence marocaine de développement des investissements (AMDI) et l'Office des foires et expositions de Casablanca (OFEC) ont fait long feu. Les 3 agences de promotion qui fonctionnaient chacune de son côté, fusionnent en une seule super agence sobrement intitulée l'Agence marocaine de développement des investissements et des exportations (AMDIE). Il s'agit avant tout de mutualiser les efforts, parfois dispersés, de ces trois organes de promotion pour plus de cohérence et d'efficacité. En réalité, l'idée de rassembler les agences de promotion en une seule super agence n'est pas nouvelle. Un projet allant dans ce sens, appelé ONIX, croupissait depuis près de 20 ans dans les tiroirs du ministère. Il vient donc d'être concrétisé. MHE justifie cette réorganisation par un souci de cohérence et d'optimisation. «On se retrouvait parfois dans les Salons avec 3 stands qui présentaient des chiffres différents», affirme le ministre, qui a décidé de mettre un terme à cette «déperdition de moyens». Concernant l'OFEC, le ministre a eu des mots durs et un certain sens de la formule : «la foire de Casablanca date à peu près d'avant Jésus Christ», a-t-il notamment fait savoir. Bref, vous l'aurez compris, MHE a passé un grand coup de balai dans la maison qu'il occupe depuis 2 ans, sous peine de faire grincer les dents de certains fonctionnaires, peu habitués à pareil chamboulement. A. Elkadiri Nouvelle charte d'investissement : Toujours plus de mesures incitatives La Charte d'investissement actuelle n'a pas été révisée depuis 20 ans. Il était temps de l'actualiser et d'y apporter de profonds changements. Les nouvelles mesures annoncées par Moulay Hafid Elalamy touchent l'ensemble des stratégies sectorielles du Royaume, auquelles s'y ajoute une dimension régionale. «Il est important de réaliser un rattrapage pour les régions les moins favorisées et de mieux répartir l'investissement», justifie MHE. Cette nouvelle Charte doit permettre une clarification du cadre législatif pour catalyser l'initiative. «Parfois, l'investisseur est un peu perdu, d'où notre volonté de réorganiser tout cela pour plus de clarté», explique le ministre. Au final, 5 mesures phares ont été annoncées par le ministre, répondant aux désidératas des industriels. 1. Impôt sur les sociétés (IS) à 0% pendant cinq ans pour les nouvelles entreprises industrielles. 2. Mise en place d'une zone franche par région. 3. Octroi des avantages «zone franche» aux grandes entreprises exportatrices sans que celles-ci soient implantées dans une zone franche. 4. Reconnaissance du statut de l'exportateur indirect. Une mesure destinée aux sous-traitants des grands groupes exportateurs. 5. Appui soutenu aux régions les moins favorisées. MHE aura donc réussi à convaincre le ministère des Finances de valider ces avantages fiscaux, en dépit d'une conjoncture morose. Reste à savoir si ces mesures rapporteront plus qu'auparavant à l'Etat marocain.