* En tant quacteur incontournable au sein de lopposition, lavis du P.J.D a souvent suscité lintérêt et beaucoup de réactions. * Après le demi-échec lors des élections du 07 septembre, le parti tente encore de faire entendre sa voix et surtout ses critiques. * Lahcen Daoudi, n° 2 du parti, commente ainsi les sujets brûlants de lactualité, à cur ouvert Finances News Hebdo : Le gouvernement nest pas homogène. Ne croyez-vous pas que cette même remarque est valable aussi pour lopposition ? Lahcen Daoudi : Dabord, on a un semblant de gouvernement. On na pas encore un gouvernement. On lattend toujours. Abbas El Fassi sest retrouvé avec des gens quil na jamais croisés de sa vie. Je ne pense pas que Abbas El Fassi ait eu déjà loccasion de travailler avec Touria Jabrane ! Dire quon a un gouvernement homogène, cest du nimporte quoi. Abbas El Fassi doit dire que dici 3 à 4 mois, on va travailler ensemble pour rendre ce gouvernement homogène. Mais quil parle maintenant dun gouvernement homogène ( ), il veut tromper qui ? Les Marocains connaissent la réalité. F.N.H.: Quid de lopposition? L.D. : Lopposition nest pas censée être homogène. Pourquoi voulez-vous quelle soit homogène dans la mesure où elle soppose au gouvernement ? Ce sont les positions prises par chacune de ses composantes qui fait quelle converge ou diverge sur certains points. Il nest pas demandé à lopposition dêtre homogène. Au contraire, chacun doit se positionner de son côté. Comme ça, le gouvernement naura pas face à lui une seule tendance, mais sera entouré de tendances diverses. Il sera attaqué de tous côtés (gauche, droite, PJD ). Et je pense quil sera dans lincapacité de répondre à tout le monde vu la diversité de lopposition. Le gouvernement va être harcelé de tous côtés. F.N.H. : Prévoyez-vous des alliances avec certains groupes de lopposition? L.D. : La notion dalliance est une stratégie pour faire face au gouvernement. Et à chaque occasion, il faut choisir la tactique la plus opportune à adopter. On va voir, par exemple, quelle est la tactique quon va adopter au niveau de la Loi de Finances. Si aujourdhui on se met daccord sur un recours constitutionnel, on sera obligé de se mettre ensemble pour avoir le quorum nécessaire. Cest évident. F.N.H. : Quelques zones dombre planent encore sur la relation du PJD avec les hommes daffaires . L.D. : On a eu beaucoup déchos lorsquon a présenté notre programme économique. La CGEM a été très sensible à nos propositions. Loccasion nous est offerte maintenant avec les discussions menées au sujet de la Loi de Finances prochaine. Je ne pense pas quon ait pris une proposition fiscale qui nest pas commune en dehors de celle du PJD. Tout le monde a parlé de baisse de lIS. Tout le monde a parlé de TVA. On est le seul parti à avoir proposé le relèvement de la taxe sur les profits des actions de 10 à 20%. On était donc les seuls à avoir fait cette proposition et qui a été retenue comme vous lavez certainement constaté au niveau de la mouture actuelle du projet de loi. F.N.H. : Vous ne croyez-pas que cest une disposition qui va nuire au marché boursier ? L.D. : Vous pouvez dire que le PJD ne connaît pas la réalité du marché. Mais si les gens du Fisc nous emboîtent le pas, cest que la proposition est bonne ! F.N.H. : Que pensez-vous du projet de Loi de Finances ? L.D. : Cest un projet qui nappartient à personne vu quil est à cheval entre deux législatures. Il est entre deux gouvernements. Il est à la fois le projet du MP et devient aujourdhui celui de lIstiqlal et du RNI parce quapparament lUSFP ne sengage pas corps et âme. Le PPS, faut-il encore le considérer comme «parti» bref, cest un projet de loi un peu bâtard. Il table sur des chiffres, espérons quon les verra sur le terrain. Les investissements par exemple vont augmenter de 37,5%. On ne peut pas dire non. On est preneur. Il ne faut pas cependant quon nous fasse le coup des 50% de taux de réalisation. Cest là le grand problème. On vous amène des choses un peu arrondies et quand vous arrivez à la Loi de Finances de règlement, vous trouvez quon vous a dupé au moment de la proposition. F.N.H. : Vous allez voter «Oui» pour ce projet de loi ? L.D. : Non. Beaucoup de problèmes persistent. Surtout quand on va au niveau sectoriel : agriculture, enseignement La Loi de Finances napporte rien. Au niveau de la TVA, on a prévu une baisse de 20 à 18%. Pour moi, cest honteux de baisser la TVA sur le caviar et le marbre italien. Cest honteux. Que la baisse concerne certains produits qui touchent la classe moyenne, je peux comprendre, mais quand ça touche les produits de luxe, cest une honte! On a augmenté la TVA à 14% pour certains produits de base, y compris les fournitures scolaires, et ce gouvernement continue de prétendre quil a une vocation sociale ! On a instauré la TVA sur le beurre, le riz, le thé..et on ne souffle pas un seul mot là dessus. Et puis est venue la baisse de la TVA de 18 à 20%. Cest irresponsable ! On avait proposé, certes, de ramener la TVA à 18% mais daugmenter en parallèle le taux sur les produits de luxe à 30% tout en enlevant la TVA sur les produits de base de première nécessité. La TVA est en partie responsable de la hausse des prix. Hélas, ce gouvernement ne sintéresse quà la pression fiscale. Il veut extraire le maximum. Quand vous faites le choix dimposer un produit de grande consommation, vous êtes sûr damasser beaucoup dargent (...) Ce qui intéresse le gouvernement, cest largent du pauvre et non le pauvre. F.N.H. : Faut-il supprimer, à votre avis, la Caisse de compensation ? L.D. : Nous sommes contre la suppression de la Caisse de compensation. Parce que sinon, on va commencer à vendre la baguette à 8 DH. F.N.H. : Mais il y a dautres mécanismes plus justes pour soutenir les prix; le ciblage par exemple. L.D. : Il ny pas dautre alternative parce quon ne connaît pas le pauvre dans ce pays ! Qui connaît le pauvre au fond des montagnes de lAtlas ? Le coût de la corruption que le ciblage va générer sera trop élevé. Il est très facile de dire quil faut cibler Mais ce nest pas faisable chez nous. La pauvreté en elle-même est quelque chose de modulable. Il y a des pauvres qui ne sont pas vraiment pauvres ! F.N.H. : Mais jusquà quand va-t-on continuer à travailler avec ce système ? L.D. : Il faut dabord lutter contre les dérives qui sont à lintérieur de la Caisse. Deuxièmement : moi, je bénéficie des subventions de lEtat. Je nai pas le droit. On doit donc mimposer pour récupérer ce quon ma donné. LEtat doit récupérer largent chez les gens qui navaient pas droit à la subvention. Cela est plus rationnel. Cest ça le ciblage. On va donc rationaliser la Caisse de compensation en lui trouvant des ressources stables chez les gens qui en profitent. Il faut jouer aussi sur les impôts indirects qui sont une catastrophe aujourdhui au Maroc. Ceux-là sont instaurés en Occident parce que le pouvoir dachat des gens est élevé. Mais dans un pays pauvre, cest une aberration ! On lappelle en fiscalité lanesthésie fiscale : tu soustrais au pauvre son argent sans quil sen rende compte. Il faut tendre au maximum vers lindividualisation de limpôt indirect pour le rendre plus juste. Chacun doit payer en fonction de ses propres moyens. Cest pour cela dailleurs quon a inventé la progressivité dans limpôt pour que le riche ressente limpôt plus que le pauvre. Plus on est riche, plus le taux de limpôt doit progresser. En létat actuel des choses, tout le monde paie au même niveau. Cest de linjustice tout court ! LEtat, comme je lai dit, est intéressé par la pression fiscale et non par la justice fiscale. On ne se pose jamais la question : qui doit payer limpôt, et pourquoi il doit le payer? F.N.H. : Vous allez faire entendre votre voix sur ce point ? L.D. : Cest évident. On va leur corser les oreilles ! F.N.H. : Nombreux sont les observateurs qui prévoyaient un «raz-de-marée» islamiste lors des dernières élections législatives. Ça na pas été le cas. Pourquoi ? L.D. : Il y avait des digues. F.N.H. : Vous aviez prévu 70 sièges. Vous nen avez récolté que 42. L.D. : On aurait eu les 70 sièges sil ny avait pas eu la falsification, lusage de largent, la corruption, le problème des bulletins de vote Il y a des PV de quelques circonscriptions, comme Taroudant, quon na pas encore vus ! On a annulé en masse les bulletins de vote PJD. On a fait un petit calcul. Si on navait annulé que 10 bulletins par bureau de vote, en moyenne, on aurait eu près de 400.000 voix supplémentaires vu quil y avait 339.000 bulletins de vote au total. Bref, il y avait un complot contre le PJD. Le seul adversaire du PJD lors de ces élections était largent. F.N.H. : Les résultats des élections ont montré que le PJD nest pas présent dans le Rif, le Sud et le monde rural. Le PJD est-il un parti urbain ? L.D. : On est un parti urbain en terme de militants. Nous avons beaucoup de sympathisants dans le rural, mais nous navons pas encore les moyens de capitaliser dessus.