Le secteur du BTP montre en ce début d'année 2016 des signes de reprise, matérialisés par la progression des ventes de ciment de 6% à fin mars 2016. Les professionnels se montrent optimistes et espèrent que cette embellie se confirmera dans les mois à venir, notamment pour la composante logement. Par ailleurs, le chantier du port de Kénitra Atlantique, qui démarrera bientôt, constitue une réelle bouffée d'oxygène pour le secteur. Le secteur du bâtiment et travaux publics (BTP) serait-il sur le chemin de la reprise, après plusieurs années moribondes ? C'est en tout cas ce que présage la DEPF (Direction des études et des prévisions financières), relevant du ministère des Finances, dans sa dernière note de conjoncture qui parle «d'orientations favorables pour le secteur à fin février», dans le sillage du redressement des ventes de ciment, principal baromètre du secteur du BTP. Lesquelles, «après leur bonne tenue affichée lors du dernier trimestre 2015 ( 9,9%) ont enregistré un raffermissement de 7,9% en variation annuelle à fin février 2016, après 2,4% une année auparavant». Nous avons interrogé David Toledano, président de la Fédération des industries des matériaux de construction (FMC), sur la réalité et la durabilité de cette reprise. Ce dernier confirme l'amélioration constatée lors du premier trimestre 2016. Les ventes de ciment ont en effet démarré l'année tambour battant avec une progression de 12%, avant de se tasser un petit peu. Au final, les ventes de ciment au premier trimestre s'améliorent de 6%, à 3,75 millions de tonnes à fin mars 2016. On est certes loin de l'euphorie des années 2000 où les ventes de ciment enregistraient des croissances à deux chiffres, mais c'est tout de même un score important. «Nous avons arrêté la spirale de régression. 6%, c'est une progression considérable», estime David Toledano. Mais cette embellie ne serait-elle pas seulement conjoncturelle et liée à la sécheresse de cet hiver qui a permis aux chantiers de se poursuivre sans interruptions ? «Nous avons eu un début d'année printanier avec peu de précipitations. Les gens ont donc travaillé un peu plus que d'habitude», admet le président de la FMC. Pour autant, il espère que durant les deux à 3 mois qui arrivent, cette tendance se poursuive. Selon lui, «il y a un certain nombre d'éléments qui plaident pour l'optimisme». Car si l'année 2015 a été une année de stabilisation où tout le monde, en particulier les gros promoteurs immobiliers, était occupé à mettre de l'ordre dans ses activités, 2016 pourrait connaître un léger mieux, notamment sur la composante logement. «Nous espérons voir se lancer des programmes de logements bien ancrés», confie D. Toledano, «que ce soit pour les villes nouvelles, les engagements de Al Omrane, ou encore le moyen standing». Par ailleurs, le secteur des matériaux de construction pourra se développer cette année grâce à l'activité de finition de chantiers sur des programmes déjà lancés. La seule contrainte à laquelle il doit faire face concerne la période du Ramadan durant laquelle les chantiers tournent au ralenti. Toujours est-il que le président de la FMC compte aussi sur le retour des MRE pour activer ou reprendre leurs chantiers afin de redonner une impulsion au secteur. L'approche des élections législatives, en octobre 2016, est un autre motif d'incertitude pour les professionnels du BTP. Les Budgets de l'Etat seront-ils bloqués ou du moins ralentis, comme on le constate historiquement? Sur ce point aussi, David Toledano se montre optimiste : «en 2015, il y a eu un effet élections positif», souligne-t-il. «Les Budgets non utilisés l'ont été juste avant les élections, ce qui a créé un certain dynamisme. Peut-être que cette année cela sera la même chose», espère-t-il. Le Port de Kénitra en catalyseur Il est vrai que l'Etat demeure l'une des principales locomotives du secteur, que ce soit pour sa composante logement que celle relative aux travaux publics et aux grands ouvrages, comme le précise Hicham Bensaid Alaoui, de l'assureur crédit Euler Hermes Acmar. «Les marchés de l'Etat (70% de la commande globale environ) pour l'exercice 2016 sont estimés à 32 milliards de dirhams, contre 27 milliards de dirhams en 2015, le différentiel étant essentiellement porté par le projet non récurrent (et non encore entamé) de la première tranche du port de Kénitra Atlantique», nous fait-il savoir. Ce qui lui fait dire que «les signes précurseurs d'une reprise tardent à voir le jour dans le secteur du BTP». Car, à l'exception de ce projet spécifique dont les études préalables et la sélection des prestataires sont toujours en cours de finalisation, il n'existe pas de réelle révolution dans les carnets de commandes émanant de l'Etat. «Même s'il est vrai que ce projet, d'une valeur globale de 8 milliards de dirhams, constitue une réelle bouffée d'oxygène pour les opérateurs du secteur», souligne notre interlocuteur. Conjoncture favorable au second semestre Au cours du second semestre, des perspectives très intéressantes pour le secteur pourraient voir le jour, grâce à la montée en gamme du projet de Kénitra Atlantique, en plus d'autres ouvrages importants. «Cependant, tient à préciser H. Bensaid Alaoui, pour que l'embellie soit complète, il conviendrait également de voir le rythme de règlement des factures, de la part des donneurs d'ordres publics, substantiellement accéléré». Pour ailleurs, pour que ce projet ait un surplus de répercussion sur la sphère économique nationale, «il faudrait en maximiser le sourcing local, en faveur notamment de quelques opérateurs marocains historiques quelque peu mis à mal par les 3 ou 4 dernières années», explique-t-il.