* Le Maroc cherche une ouverture progressive tout en tenant compte des secteurs sensibles. * LUE veut une libéralisation rapide des échanges agricoles. Le Maroc va entamer un nouveau round de négociations agricoles avec lUnion européenne à la fin de ce mois de juin à Rabat avant de présenter son offre. Bruxelles a déjà présenté la sienne et les officiels marocains sefforcent détudier le dossier en concertation avec les professionnels marocains. La partie européenne veut une ouverture rapide et généralisée des frontières. Alors que du côté marocain, la tendance est à la prudence. Il est question dinitier, par étapes, une ouverture progressive prenant en considération les intérêts nationaux sans porter atteinte aux secteurs les plus sensibles à forte implication sociale comme la céréaliculture. Il est aussi primordial pour Rabat de consolider les acquis afin de permettre un large accès des produits exportés. Loffre européenne est passée de la logique de liste positive à la logique de liste négative. Cette dernière comprend une vingtaine de produits marocains qui seront protégés alors que les autres produits ont un accès libre. Cest le premier pas vers le libre-échange. Pour Najib Akesbi, économiste et professeur universitaire «la liste négative comprend plus de 80% de produits marocains à lexport, ce qui veut dire en gros quon devrait rester dans la logique du protectionnisme ». Moha Marghi, secrétaire général du ministère de lAgriculture, du développement rural et des pêches maritimes et lun des chefs de file des négociateurs marocains, juge que « les négociations avec les Européens vont dans le bon sens. Elles sont basées sur la feuille de route adoptée à Barcelone». «La démarche de négociation, a-t-il expliqué, va passer dune logique de listes positives à une logique de listes négatives. Tous les produits agricoles seront, à terme, libéralisés sauf une liste limitée de produits dits sensibles». «Nous allons demander à nos homologues européens plus de visibilité concernant la liste négative et aussi permettre plus daccessibilité à nos produits». Les Européens ont proposé dans leur offre un démantèlement sur cinq ans pour permettre laccès de leurs produits aux marchés marocains. Du côté marocain, les professionnels demandent une visibilité au-delà de 2012, notamment pour les produits sensibles et redoutent en fait que le scénario de lALE avec les Américains ne soit répété, où seulement quelques filières ont été associées aux négociations. Marghi a indiqué que « tous les représentants des filières agricoles seront initiés à loffre de lUE. Nous cherchons un accord concerté et équilibré avec les professionnels tout en tenant compte des spécificités de chaque filière ». Pour Bruno Dethomas, ambassadeur chef de la Délégation de lUnion européenne à Rabat, « le Maroc est le plus important pays du réseau des négociations de lUE». «Cest un pays pionnier dans les négociations de la politique de voisinage engagée par lUE », a-t-il noté. Pour rappel, le Maroc réalise lessentiel de ses exportations agricoles, notamment de fruits et légumes, avec lEurope. En revanche, il importe aussi dautres produits, en particulier des céréales, des produits laitiers, des génisses Rabat a déjà conclu avec Bruxelles un accord dit win-win permettant au Maroc daugmenter son quota dexportation de tomates, en échange dimportations de blé suivant les récoltes de la campagne agricole. LAccord dassociation avec Bruxelles ne prévoit, pour les produits agricoles, que des concessions mutuelles sur une liste limitée de produits agricoles et souvent sous forme de quotas. La partie marocaine devrait aussi débattre de la question des subventions où la quasi-totalité des produits européens sont soutenus dans le cadre de la politique agricole commune (PAC). Loffre de Bruxelles concerne 300 produits qui sont subventionnés et qui sont destinés au marché marocain. La libéralisation des produits agricoles, induite par lensemble de ALE, ne manquera pas dimpulser une reconfiguration de lagriculture marocaine vers une meilleure affectation des facteurs de production (eau, terre ) et donc sa redynamisation. Des craintes ont été exprimées quant à la capacité de notre agriculture à profiter des opportunités offertes par ces accords et à affronter la concurrence de puissantes économies agricoles des pays du Nord qui subventionnent massivement leurs agricultures (UE, USA ) et des pays émergents comme le Brésil et lArgentine. La vulnérabilité des petits agriculteurs est souvent mise en relief pour supporter les thèses de ceux qui expriment ces craintes. Il est plus que jamais urgent dentamer les réformes agricoles.