Les indicateurs relatifs au marché du ciment publiés à fin août (-4,98% à 9,3 millions de tonnes sur l'année) augurent d'une troisième année baissière. Mais la réalité est tout autre. Dans une étude récente, les analystes de MSIN se sont attelés sur les causes sous-jacentes du recul. Ils émettent des recommandations sur les titres des groupes phares du secteur (Cimar & Holcim). D'après les analystes de MSIN, la régression des ventes entamée depuis 2012 n'est que la résultante de plusieurs facteurs, dont notamment la baisse de la demande du logement et de la construction (qui absorbent 80% de la production), la hausse du prix de l'immobilier, le resserrement des octrois de crédits et le renchérissement des prix des matériaux de construction. Aussi, les coupes budgétaires ayant eu lieu en 2013 ne sont-elles pas restées sans impact sur le secteur en 2014, se matérialisant par une décélération de l'investissement dans les travaux publics. Ajoutons à cela l'exacerbation de la concurrence au niveau du secteur qui connaît désormais une nouvelle configuration. Avec l'arrivée de Cimat en 2010 d'une part, et la régression de la demande adressée au secteur d'autre part, cela s'est traduit par une dilution des parts de marché des opérateurs historiques et une surcapacité du marché. De l'avis des analystes de MSIN, et en dépit des signes de crise qui caractérisent l'industrie du ciment depuis deux ans, le secteur ne l'est pas vraiment. Il est plutôt dans une phase de retour à des niveaux normaux de consommation, et ce après l'essoufflement de la bulle spéculative qui a atteint son paroxysme en 2011. Des potentialités à exploiter Les écueils ci-dessus ne doivent pas occulter le fait que le secteur regorge d'opportunités et qu'il constitue un relais de croissance pour l'économie. L'adage ne dit-il pas : «Quand le BTP va, tout va». Le ciment étant une composante essentielle du secteur du bâtiment et travaux publics. On peut citer à cet égard la poursuite des chantiers en infrastructures (ports, routes, aéroports, barrages...) et des investissements touristiques, encouragés par la reprise économique de certains pays partenaires. Le déficit actuel non encore résorbé en termes de logements sociaux, évalué à 600.000 logements au 1er semestre 2014 d'une part, et la poursuite du programme visant à éradiquer les bidonvilles d'autre part, sont des signes avant-coureurs qui laissent présager que rien n'est perdu et que le secteur a un avenir prometteur. Autres indicateurs et pas des moindres qui convergent dans la même foulée : il s'agit du coefficient relativement faible en termes de consommation de ciment, évalué à 487/kg/hab/an en 2012 contre 645 kg/hab/an pour la Tunisie, et de la hausse escomptée de la demande à horizon 2030, estimée à plus de 55%. Les prévisions des ventes sur la période 2014-2018 (voir graphe) ont été faites sur la base d'une pondération de l'historique des ventes de ciment et de la corrélation entre l'évolution des investissements et celle de la consommation du ciment. Il en ressort une progression annuelle moyenne de 0,39%, soit une consommation passant de 14,2 millions de tonnes en 2014 à 15,5 millions de tonnes à fin 2018. Aussi, d'après les projections du FMI, le PIB réel devrait-il évoluer en moyenne sur la période 2014-2018 de 5% et la FBCF qui englobe l'investissement public et privé de 4,7%. Les prémisses de la nouvelle configuration On ne peut parler des scénarios de reprise sans pour autant évoquer la fusion Holcim-Lafarge qui aura une incidence sur l'évolution des parts de marché des opérateurs du secteur. «Ce nouvel ensemble devrait connaître une baisse de ses parts de marché : mécaniquement, l'ensemble devra détenir plus de 50% de parts de marché, mais serait, probablement, contraint de procéder à des cessions d'actifs (cessions éventuelles dans le cadre de la limite de vigueur imposée par le conseil de la concurrence qui est de 40%)», apprend-on dans la note de MSIN. Un scénario qui devrait profiter aux autres opérateurs du marché, notamment à Ciments du Maroc, bénéficiant d'une solide structure financière complètement désendettée, qui pourrait acquérir les actifs appelés à être cédés et améliorer de facto ses parts de marché. Une autre fusion est à l'ordre du jour : il s'agit de la mise en oeuvre de la fusion Cimar/Betomar inscrite dans le cadre de la restructuration des activités de CIMAR et tenant compte des complémentarités d'activité de leur métier, du renforcement de Betomar dans un marché de plus en plus grand et de la complémentarité de l'offre. Les investissements industriels du groupe à court terme se matérialisent par le doublement de la capacité de broyage de Laâyoune, la mise en service du centre de broyage de Jorf Lasfar pour un montant de 170 MDH et d'une capacité de production de 450 KT, l'évaluation de gisements pour le développement de nouvelles capacités de production et la construction d'un parc éolien d'une capacité installée de 10 MW, à proximité de l'usine de Safi. Sur la période 2014-2018, les ventes du groupe devraient évoluer sur la base d'un taux de 3,6%, pâtissant d'une baisse des volumes vendus au niveau de l'activité ciment qui contribue à hauteur de 80% à la création du chiffre d'affaires global et bénéficiant d'une hausse moyenne des prix du ciment de 3% sur la période prévisionnelle. Pour ce qui est du béton prêt à l'emploi, les ventes devraient rester stables. Concernant les granulats, une stagnation des ventes est prévue en 2014. S'agissant du RNPG, il est prévu un taux de croissance annuel moyen (TCAM) de 3,8%. En 2014, le résultat net devrait baisser de 2% à 792 MDH. A noter que Cimar a mieux résisté que le secteur au premier semestre 2014, avec un recul de ses ventes de 4% sur le premier semestre, contre 4,4% pour le secteur. A fin juin, le chiffre d'affaire s'est établi à 1,79 Md de DH, en baisse de 6% et le résultat net à 455 MDH, en diminution de 7%. Sur la base d'une valorisation par la méthode DCF, MSIN ressort avec un cours cible de 1.308 DH, soit une décote de 41% (calculée à partir d'un cours en bourse de 925 DH) et recommande ainsi l'achat du titre. Pour Holcim, et sur une valorisation par la même méthode, MSIN table sur un cours de 1.639 DH, soit une surcote de 14% calculée à partir du cours du 29/08 de 1.865 DH, d'où la recommandation d'alléger le titre.