Saham Assurance, Wafa Assurance et RMA Watanya ont, toutes les trois, misé sur l'Afrique. Un pari légitime pour un continent qui ne représente que 2,2% du marché mondial de l'assurance en 2011. Le secteur des assurances marocain a connu des avancées notables au cours de ces dernières années, lui permettant ainsi d'occuper une position privilégiée à l'échelle du continent africain. Avec un total de primes émises, toutes branches confondues, de 26,7 milliards de dirhams, en progression de 2,7% par rapport à l'an dernier, pour un taux de pénétration de 3%, il occupe la seconde place en Afrique (après l'Afrique du Sud) et la troisième au niveau du monde arabe, derrière l'Arabie Saoudite et les Emirats Arabes Unis. Ce secteur, engagé actuellement dans une dynamique d'amélioration de son cadre réglementaire, gère actuellement des actifs qui s'élèvent à plus de 114 milliards de DH. Présence remarquée en Afrique Le secteur des assurances a pris une dimension nouvelle grâce principalement à trois acteurs-clés du marché : les compagnies Saham Assurance, Wafa Assurance et RMA Watanya qui, mues par leurs ambitions, ont jeté leur dévolu sur le continent africain pour développer leurs activités. Saham Assurance a été l'une des premières compagnies marocaines à tisser sa toile à l'international, grâce à une stratégie d'acquisitions qui lui permet, actuellement, de revendiquer une présence dans une vingtaine de pays, allant du Maghreb à l'Afrique Centrale et l'Afrique de l'Ouest, sans oublier le Moyen-Orient et l'Océan indien. En cela, le pôle Assurance du Groupe Saham, qui fédère 37 filiales en Afrique pour pas moins de 1.900 collaborateurs, pèse plus de 800 millions de dollars (US), dont 52% au Maroc, 25% en Afrique Centrale (notamment en Angola), et 17% en Afrique de l'Ouest (notamment en Côte d'Ivoire). C'est donc assez logiquement que Saham Assurance brandit le statut de leader de l'assurance en Afrique (en dehors notamment de l'Afrique du Sud). Un leadership qu'il compte bien garder, voire consolider, fort des nombreux partenariats capitalistiques qu'il a signés avec des acteurs de renommée internationale, comme la SFI (filiale de la Banque mondiale), Abraaj Capital ou encore Wendel. Pour autant, ce leadership sur le marché africain, Wafa Assurance compte bien le lui contester. Quand bien même elle aura du chemin à faire. La filiale du Groupe Attijariwafa bank, déjà présente en Tunisie à travers Attijari Assurance, nourrit en effet de grosses ambitions en Afrique subsaharienne. Elle l'avait fait savoir dès 2012 avec l'accord de prise de participation majoritaire dans le capital de la compagnie Safa (Solidarité Africaine d'Assurances) à hauteur de 75%. Opération qui a finalement avorté, suite à l'incendie qui a eu lieu dans les locaux de la compagnie d'assurance ivoirienne et qui avait détruit une bonne partie de ses archives. Mais ce «sinistre» n'entame en rien la volonté de Wafa Assurance de bien se positionner en Afrique. «Wafa Assurance a des projets en Afrique subsaharienne», nous avait d'ailleurs confié Ramsès Arroub, PDG de la compagnie. Néanmoins, contrairement à la Tunisie où une filiale a été créée de toute pièce, le modèle de développement en Afrique subsaharienne devrait se faire selon un autre schéma, via le contrôle de structures existantes notamment. En gros, ce sera la même philosophie que celle développée par le Groupe Attijariwafa bank en Afrique. Mieux, Wafa Assurance va cibler les pays d'implantation du Groupe bancaire, histoire de mettre en place des synergies et capter le marché de la bancassurance. Les opportunités qui se présenteront sur ces marchés dicteraient donc ses pays de présence. C'est dire qu'en étant l'ombre d'Attijariwafa bank, elle pourrait se retrouver, outre la Tunisie, dans 11 autres pays africains (Sénégal, Burkina Faso, Guinée Bissau, Mali, Mauritanie, Côte d'Ivoire, Congo, Gabon, Cameroun, Togo et Niger). RMA Watanya, trouble-fête ? RMA Watanya n'a visiblement aucune intention de laisser le marché africain à la seule convoitise de ses deux concurrentes. Elle compte bien s'y faire une place, et pas comme simple figurante. Pour preuve, récemment, elle a fait d'une pierre trois coups, en concluant un partenariat avec le Groupe Beneficial Life Insurance Company (BLIC) après l'obtention de l'ensemble des autorisations des régulateurs locaux, régionaux et marocains. «Cet accord consacre, dans un premier temps, une prise de participation de l'ordre de 40% dans le groupe d'assurance BLIC qui exerce ses activités dans les régions CEMAC et UEMOA», précisait un communiqué de la compagnie. Aujourd'hui donc, la seconde compagnie d'assurances nationale est présente au Cameroun, en Côte d'Ivoire et au Togo, à travers BLIC qui couvre les branches Vie et non Vie depuis plus de 38 ans avec un chiffre d'affaires consolidé de plus de 31 millions USD. RMA Watanya suivra-t-elle à la trace la stratégie de développement du Groupe FinanceCom en Afrique subsaharienne, portée notamment par BMCE Bank et Bank Of Africa (BOA) ? Cette option n'est pas à écarter pour deux raisons : la première est qu'elle aura les moyens de ses ambitions, d'autant qu'elle est adossée à un groupe de référence qui dispose d'une surface financière conséquente pouvant lui permettre de se déployer en Afrique. La seconde raison est que ce continent, où la culture de l'assurance est faible, offre de réelles opportunités pour capter le marché de la bancassurance en nouant notamment des synergies avec le Groupe BOA, déjà présent dans 19 pays africains. Il faut croire donc que la prise de participation de 40% dans le groupe BLIC n'est que la première phase du processus de déploiement de RMA Watanya en Afrique. Il n'est pas ainsi exclu de voir, à terme, la compagnie se positionner dans les 19 pays de présence de BOA, voire plus, d'autant que l'ambition du président du Groupe BMCE Bank, Othman Benjelloun, est de voir son institution planter l'étendard marocain dans les 54 pays que compte le continent. Autant dire que la concurrence entre les compagnies d'assurances va désormais se jouer dans les prés africains, où ce secteur se développe de plus en plus. Mais il y a de la place pour tout le monde. L'Afrique ne représente, en effet, que 2,2% (marchés Vie et non Vie) du marché mondial de l'assurance (4.597 milliards de dollars US) en 2011, avec un taux de pénétration assez faible (proche de 1%) et un niveau des primes en pourcentage du produit intérieur brut de 3,6%, selon les données publiées par la Fédération des sociétés d'assurances de droit national africaines (Fanaf).