Open Sky International ouvre ses portes à Casablanca dès septembre prochain. Le groupe scolaire compte investir au Maroc 500 MDH étalés sur 5 ans. Entretien avec Emmanuel Fayad, PDG et co-fondateur d'OSI.
Propos recueillis par Ibtissam Z.
Finances News Hebdo : Tout d'abord, parlez-nous un peu de vos méthodes pédagogiques ? Emmanuel Fayad : Nous avons la passion de l'éducation. Comme mon épouse, Rose, qui a rêvé cette école et travaillé chaque jour à mes côtés pour la concrétiser et la traduire en programmes pédagogiques, il est en notre pouvoir de réaliser ce rêve avec notre équipe. Une équipe dévouée, des enseignants passionnés comme nous par l'éducation et dont l'obsession quotidienne est la meilleure éducation, les meilleures pédagogies, la meilleure équipe et, nous l'espérons, le meilleur esprit. C'est un point particulièrement important. Bien sûr, avec Open Sky International, nous avons construit nos cours à partir du terrain, en cherchant partout, en France et en Angleterre, mais également en Egypte, au Maroc, en Australie, à Singapour et dans de nombreux autres pays, les meilleures méthodes d'enseignement que nous avons pu identifier pour mener nos élèves vers l'excellence académique. Mais nous avons toujours préservé, conservé à l'esprit une dimension essentielle, consubstantielle de l'éducation : l'épanouissement dans la joie. Parce que l'éducation, le fait d'apprendre, d'apprendre à faire, reproduire, inventer, cet épanouissement est une joie. Et dans nos écoles, nous insistons sur ce point, nous voulons que nos enfants viennent chaque matin avec ce merveilleux sourire, ce large sourire car ils savent que nous allons passer un moment joyeux ensemble.
F.N.H. : OSI est présent en France, au Maroc et en Egypte. Votre choix s'est porté sur le Maroc pour lancer votre premier établissement. Pourquoi ? E. F. : L'éducation est une passation, une transmission. De valeurs, d'esprit, d'âme, de connaissance. En cela, nous sommes alignés avec les valeurs et les attentes des familles marocaines. Nous avons la passion de l'éducation. C'est le meilleur moyen solutions dont elles auront besoin. Nous essayons de le faire dans une approche innovante, trilingue, dans la complémentarité magnifique de nos différentes langues d'enseignement. Partout dans le monde, des familles partagent la même quête : ouvrir les portes, ouvrir le champ des possibles sans négliger sa propre culture. Aujourd'hui, pour ouvrir le champ des possibles, parce que l'anglais est devenu la «langue commune du business», les familles souhaitent que leurs enfants pratiquent couramment l'anglais. Cela pose au Maroc un 1er problème, puisque ce désir se heurte à un premier choix «cornélien» : choisir l'anglais, jusqu'à ce jour, veut dire abandonner l'étude avancée du français. Il faut choisir. C'est l'un ou l'autre… Bien sûr, l'enseignement du français est toujours largement majoritaire au Maroc. Outre nos liens historiques et l'amitié franco-marocaine, le 2ème partenaire économique du Maroc demeure la France, et le Maroc occupe une place de leader dans un continent très largement francophone et appelé chaque jour à l'être davantage. La démographie est une réalité que les familles marocaines comprennent parfaitement, la demande d'un enseignement bilingue français-anglais est donc forte. Inassouvie, mais forte. L'anglais «pour les affaires», c'est certes nécessaire, mais je comprends l'attachement des familles marocaines pour le français... Au-delà des valeurs qui nous réunissent, la francophonie est une réalité géopolitique essentielle pour le dialogue maroco-africain, pour l'économie et l'emploi au Maroc. Le choix de l'anglais contre la francophonie, pratiquée par de plus en plus de parents marocains, est donc pour nombre d'entre eux un crève-cœur. Notre offre d'enseignement est conçue pour répondre à ce besoin, un besoin fort, fait de raison et de cœur: celui d'un enseignement bilingue français-anglais, «à parité» 40/40, et 20% pour l'arabe lu et écrit.
F.N.H. : Vous adoptez le 40/40 entre le français et l'anglais, mais au Maroc comme en Egypte, vous avez intégré l'enseignement de l'arabe pour 20% de vos enseignements. A travers cette démarche, est-ce un message pour préserver la culture et les racines ? E. F. : La langue est une clé d'accès à la culture. Nous ne pouvions imaginer l'ouverture d'un établissement au Maroc sans penser notre enseignement avec une même exigence vis-à-vis de la langue arabe classique. Nous savons tout l'apport de la culture arabe aux cultures du monde entier. Nous ouvrons donc une école où les cours, non seulement apporteront à nos élèves une pratique courante du français et de l'anglais, mais qui donneront la place qui lui est due à la pratique de l'arabe, écrit et lu. C'est un principe fort. Nous l'exerçons avec la conscience qu'il n'est pas possible de former les générations futures en leur demandant de négliger leur langue maternelle. Pour savoir où l'on va, il faut savoir d'où l'on vient. Nous devons donc former notre jeunesse dans le respect profond de ses racines, de sa propre culture. Nous sommes un groupe familial et ces valeurs, cette filiation sont essentielles. Ce lien est indissoluble, il doit être préservé et nous sommes convaincus que, si sa Majesté Mohammed VI, que Dieu l'assiste, a fait de l'éducation l'un de ses chantiers prioritaires, alors nous nous inscrirons pleinement dans Sa vision si nous mettons en œuvre notre premier savoir-faire au service de Sa volonté – l'enseignement de la culture par les langues. C'est notre mission : transmettre la culture davantage encore que le savoir, car, vous connaissez, l'adage : le savoir, des pierres dans un sac; la culture, une graine dans un pot…
F.N.H. : Parlez-nous de votre projet éducatif. Et qu'en est-il du programme pour le Maroc ? E. F. : Notre programme d'enseignement est unique. Sûrs de l'excellence de notre pédagogie, nous ne pratiquons pas de sélection à l'admission dans nos établissements car notre engagement est de conduire nos élèves à révéler leur potentiel, en confiance et dans l'épanouissement. Nos langues d'enseignement sont l'anglais, le français et l'arabe et nous aurons pour chacune d'entre elles le même niveau d'exigence. Il s'agit, ni plus ni moins, de nous assurer que nos élèves maîtrisent les 3 langues, avec un haut niveau grammatical et de vocabulaire, dès la fin du primaire. Sur notre programme, ajoutons quelques points forts. • Le respect de l'histoire, savoir d'où l'on vient pour savoir où l'on va; • Les valeurs familiales, porteuses d'équilibre et des seules joies qui comptent vraiment; • Une habilité mathématique pour l'agilité de l'esprit, l'animation des projections; • La confiance dans la science, qui nous élève peu à peu; • Le sport et la compétition positive; • Le théâtre pour l'expression, une saine gestion de l'émotion et la maîtrise du langage corporel; • Les échecs pour la concentration et la construction d'une stratégie à long terme. Nous créons nos cours pour qu'ils révèlent le potentiel de chacun de nos élèves. J'ajouterai encore un mot sur la littérature. Nous aimons la lecture et la littérature. C'est un point essentiel, caractéristique de notre enseignement. Nous sommes très attentifs aux lectures de nos enfants, elles les élèvent. Ainsi, toutes les familles qui viennent nous voir sont-elles en quête de ce petit supplément d'âme, de cet enseignement français qui, de Montaigne à Camus, de Hugo, Voltaire, Rostand (nous ouvrons notre établissement de Casablanca «rue Rostand», la belle image en vérité), Molière à Prévert, en passant par la poésie rimbaldienne ou baudelairienne, irrigue une culture francophone qui, à son tour continue, à nourrir des intellectuels du monde entier. Notre approche trilingue correspond en vérité à une sagesse des peuples qui savent toujours au plus profond de leur âme ce qui les lient entre eux. Oui, l'anglais est la langue du business (elle n'est évidemment pas que cela, c'est aussi une culture, des auteurs extraordinaires et 1.000 inventions), mais le français est celle de l'universalisme, de l'égalité, de l'esprit des Lumières, de la rationalité contemporaine, de grandes avancées scientifiques et médicales, de l'amour et de l'amour de la littérature, de Nice et Paris, du Festival de Cannes et de SaintGermain des Prés, du Mont Saint-Michel et de Notre-Dame... Arabe, français, anglais, nos langues d'enseignement ne sont pas seulement une clé vers la connaissance, mais surtout la clé de la culture. Et la culture apporte la compréhension. Quel meilleur moyen de partager une compréhension commune, de bâtir et conserver un monde commun, des vérités communes, la grande aventure du XXIème siècle, que d'être capable de partager une même culture en apprenant trois langues ? En apprenant le français, l'anglais et l'arabe avec ce même niveau d'exigence, nous voulons que nos élèves grandissent et réalisent leurs rêves, libres et indépendants, dans l'amour de la culture et de la lecture. Il s'agit d'outiller, d'équiper, pour la vie. Nous voulons fabriquer des adultes sereins et confiants, capables de prendre pour eux et leur famille les meilleures décisions.
F.N.H. : Il n'y a ni sélection ni tests préalables pour accéder à votre établissement. Pourquoi ce choix ? E. F. : Nous ouvrons les admissions pour 10 classes. Nous accueillerons 180 élèves à «Rostand», en septembre prochain. Nous ne réaliserons pas de sélection académique. Sélectionner n'est pas compatible avec notre vision, nos valeurs. Comment une école pourrait-elle évaluer ses propres résultats si elle fait un tri à l'entrée ? Etre la meilleure école, ce n'est pas sélectionner des élèves sur leurs résultats académiques et leur bagage antérieur. Etre la meilleure école, c'est révéler le meilleur des capacités de tous ses élèves. Nous rencontrons donc les parents, nous échangeons avec eux, nous évaluons le niveau de chaque enfant. Nos cours sont créés pour qu'ils révèlent le potentiel de tous nos élèves, vers l'excellence académique dans l'épanouissement. Nous réalisons cela en pleine confiance en notre pédagogie. Chaque enfant a un potentiel immense et il nous appartient de lui enseigner. C'est notre responsabilité. C'est notre engagement. Notre mission est de conduire nos élèves, en confiance, vers la réussite.
F.N.H. : Votre école est indépendante, et donc pas de subvention de l'Etat. Qu'en est-il de vos tarifs ? E. F. : Nous voulons les meilleurs professeurs, la meilleure équipe pédagogique, les meilleurs pédagogies et activités. Tous nos professeurs bénéficient d'un salaire aligné sur les expatriés. A même travail, même salaire. Cela nous permet d'organiser la meilleure équipe pédagogique et d'encadrement, dans la durée et la stabilité. Notre philosophie s'articule autour de 4 valeurs fondamentales : le respect, le travail, l'effort et la réflexion. Nous pensons également que l'école doit être un sanctuaire, avec ses rituels qui favorisent l'éducation. Nos enfants et nos enseignants portent des uniformes. Les technologies de pointe sont mises à la disposition des enseignants et des enseignants seulement; les enfants apprennent loin des écrans. Nous pensons qu'une compétition positive et saine est bénéfique aux élèves, les aide à développer leur confiance et leur estime de soi. Ces deux éléments se révéleront de puissants atouts dans leur vie d'adulte. Cet ensemble pédagogique très haut de gamme et nos résultats démontrent notre excellence. Cela a un coût, qui sera proche de celui d'une école américaine. Il est cependant important de noter que nous avons un système de bourse afin d'accompagner les familles. Nous les invitons à nous contacter pour en savoir davantage. Nous ne réalisons pas de sélection académique nos efforts sont identiques pour intégrer les enfants des familles qui souhaitent l'excellence, partagent nos valeurs familiales et notre vision de l'enseignement.
F.N.H. : Vous comptez ouvrir pas moins de 50 écoles dans le monde d'ici 2030. Avez-vous déjà ciblé vos pays d'implantation et quels sont les critères qui sous-tendent ces choix ? E. F. : C'est le début de notre histoire à Casablanca. Au Maroc, à Casablanca puis à Rabat, nous ouvrirons plusieurs nouveaux établissements «K12», de la maternelle au lycée dans les 3 prochaines années. Sur 5 ans, nous investirons près de 50 millions d'euros (autour de 500 millions de dirhams) au Maroc sur de nouveaux établissements. En 2026, au plan international, nous espérons ainsi accueillir 5.000 élèves dans une dizaine d'écoles. C'est le début de notre histoire au Maroc et c'est notre rêve commun à tous. Un rêve essentiel. Construire de futurs adultes sereins, capables de prendre pour eux, pour leurs familles, pour la société marocaine, les meilleures décisions pour un XXIème siècle désirable, durable... C'est la raison de notre présence ici. Et nous voulons jouer notre rôle, modestement contribuer au futur d'un pays séculaire qui a tant à nous apprendre. Nous serons très heureux de partager cet objectif ici pour créer de meilleures générations que la nôtre. Nous le ferons au Maroc, tout comme en Egypte et en France. Mais ce rêve ne devrait pas connaître de frontières. Créé en 2012 par mon épouse Rose et moi, Open Sky International est un groupe familial d'enseignement qui ambitionne de devenir le leader mondial des écoles internationales trilingues. De 2022 à 2030, ce sont ainsi une cinquantaine d'établissements OSI, implantés dans 30 à 40 pays, qui ouvriront leurs portes. Nous étudions en ce moment l'ouverture d'établissements en Inde, aux USA et au Canada, marchés sur lesquels la demande d'un enseignement d'excellence est forte. On ne doit jamais cesser d'apprendre et progresser. Ouvrir une école, c'est la meilleure manière de s'y préparer.