Le besoin en fonds de roulement constitue l'un des freins majeurs post création pour les PME et les TPE. Les retards de paiement menacent la survie des entreprises et influencent leur compétitivité. La loi sur les délais de paiement est vivement attendue par le tissu entrepreneurial. Face à une conjoncture économique toujours morose, où règnent incertitude et attentisme, les PME et les TPE marocaines continuent leur combat au quotidien pour survivre et faire face aux moult obstacles auxquels elles sont confrontées. La crise financière de nos principaux partenaires commerciaux, les difficultés d'accès au financement, le manque de formation, le manque d'organisation et de structuration,... font que ce segment qui constitue pas moins de 96% du tissu économique marocain demeure vulnérable. Il faut dire que cette catégorie a joui ces dernières années d'une attention particulière aussi bien de la part du gouvernement, par la mise en place de programmes d'appui (Moukawalati, Imtiaz, Rawaj...), que des sociétés de financement. Jusque-là pointées du doigt par les porteurs de projets et par les ONG et associations de PME et TPE, ces dernières ont dû revoir leur politique de financement. Les nouveaux dispositifs de Bank Al-Maghrib témoignent, d'ailleurs, de la volonté du secteur à financer davantage ce segment du tissu économique. Rappelons que, parmi les mesures prises dans ce cadre, figurent : l'allongement de la durée des allocations de liquidité, passant de trois mois à deux ans minimum, l'élargissement des critères d'éligibilité en augmentant le plafond du crédit à 50 millions de dirhams (renouvelable sur un an), la pénalisation des banques pour chaque diminution des encours de crédit aux TPME... Pratique vs théorie Après un long processus pour la création d'une entreprise, les jeunes entrepreneurs ne sont pas au bout de leur peine. Et pour cause. En effet, après le démarrage de l'activité, ils réalisent que la pratique est bien plus différente que la théorie. Parmi les obstacles majeurs auxquels font face les PME et TPE post création, les problèmes de trésorerie figurent au premier rang. C'est au bout de quelques mois d'exercice que les chefs d'entreprises se rendent compte que la mise en œuvre de leur business plan, de leur feuille de route et de leur objectif ne dépendent pas uniquement de leur performance, mais bien d'autres facteurs. Dans un marché qui ne respecte pas les délais de paiement, le rêve peut rapidement devenir un cauchemar. Les jeunes entrepreneurs sont rapidement en manque de liquidité avec des fonds de roulement négatifs ou quasiment nuls, à cause des retards de paiement. «Au bout du 5ème mois, je me suis trouvé dans un labyrinthe. Je suis traiteur et pour pouvoir décrocher des marchés, il faut être très souple avec les clients. Du coup, à cause des retards de paiement, je n'avais plus de fonds de roulement et donc je ne pouvais plus décrocher de nouveaux marchés. Ma banque m'a soutenu au début en m'autorisant le découvert, mais en voyant que la situation ne se redressait pas rapidement, elle a arrêté le financement», nous confit Soufiane. B, jeune entrepreneur. Cette situation n'est pas isolée, puisque la grande majorité des PME et TPE n'arrive pas à financer son fonds de roulement. Beaucoup ont recours à des emprunts à court terme ou font appel à la famille et à l'entourage pour maintenir leur flux d'activité. «A cause des retards de paiement, j'ai dû mettre la clé sous le paillasson. J'ai été dépassé et je n'arrivais pas à trouver l'équilibre», déplore Morad. Mais qu'en est-il des banques ? Financent-elles les besoins en fonds de roulement ? D'après Abdellah Elfergui, président de la Confédération Marocaine de TPE-PME, «les banques n'accordent des crédits qu'aux riches. Les TPE ne bénéficient pas de prêts pour financer le BFR. Leurs comptes sont généralement vides, tout en sachant que ces banques ont presque toutes créé un service pour les TPE». En effet, si certaines PME arrivent à garder la tête hors de l'eau, les TPE, quant à elles, n'arrivent pas tirer leur épingle du jeu. Abdellah Elfergui précise qu'avec la crise, la situation est dramatique, en particulier pour les TPE. «De plus en plus de TPE ferment leurs bureaux ou ateliers faute de financement. Et ceux qui survivent ont recours à leurs propres économies ou aux crédits fournisseurs, ou travaillent avec des chèques sans provisions... », précise-t-il. Pour sauver ce segment d'entreprise de la faillite, le président de la Confédération Marocaine de TPE-PME suggère, d'une part, la création d'une Agence Nationale de TPE, la création d'un fonds spécial TPE ou d'une société de Cautionnement mutuelle pour garantir les crédits. Ceci dit, pour améliorer la situation financière des PME et des TPE et renforcer leur compétitivité, il est impératif de changer les pratiques commerciales au Maroc. Le retard de paiement constitue aujourd'hui un fléau très dangereux pour la survie des entreprises. Ce qui bien évidement impacte directement la dynamique de l'économie nationale. C'est donc dans une optique d'amélioration du climat des affaires que les chefs d'entreprises revendiquent depuis longtemps l'adoption de la loi sur les délais de paiement. Pour rappel, l'application de cette loi a été suspendue par décret jusqu'en janvier 2014, peu après son adoption à cause d'incohérences, notamment sur le plan fiscal. En attendant le réaménagement de la loi 32-10 et sa mise en application, les PME et les TPE marocaines continueront à fonctionner avec les moyens du bord.