Les créances aux PME et TPE feront maintenant partie, au côté des bons du Trésor et des titres de créances négociables, des garanties que peuvent apporter les banques sur leurs emprunts auprès de la Banque centrale. Ce dispositif, dont la durée initiale a été fixée à deux ans, s'inspire d'autres pratiques internationales et favorise encore plus les industriels et les exportateurs. Décryptage. Le dispositif mis en place par BAM paraît simple et cohérent. Il concerne ce qui est communément appelé le collatéral, cet ensemble de garanties apportées par les banques pour emprunter auprès de BAM. Normalement, ces garanties sont faites de bons du Trésor, pour des raisons de sécurité et de liquidité. Depuis quelques temps, le collatéral a été élargi aux titres de créances négociables pour fluidifier le circuit interbancaire. Aujourd'hui, les banques pourront également apporter des créances sur les très petites et moyennes entreprises en collatéral. Ces entreprises doivent avoir un chiffre d'affaires de 175 MDH au maximum et des demandes de crédits ne dépassant pas 50 MDH pour être éligibles au dispositif. Cette mesure rendra bien plus liquide ce type de créances et donnera aux banques une plus large palette de moyens de refinancement, tout en encourageant les prêts aux PME. BAM n'en est pas à son premier essai. Un ancien dispositif en faveur des PME existait déjà en 2012, mais n'avait pas autant d'ambition que celui-là. Il restera d'ailleurs en vigueur jusqu'en décembre. Les modalités de cet ancien dispositif consistent en des prêts garantis: normalement, la Banque centrale utilise des opérations de pensions livrées (transfert physique du collatéral vers la Banque centrale en contrepartie d'emprunt). Mais les banques qui donnent des crédits aux TPME peuvent en donner en collatéral à la Banque centrale par un simple engagement en signature, et se refinancer pour une durée de trois mois grâce à ces créances. Les secteurs éligibles sont nombreux mais ne comprennent pas le secteur de la promotion immobilière et les métiers libéraux. Trois appels d'offres ont été réalisés dans le cadre de ce dispositif. Le premier appel d'offres, en décembre 2012, portait sur un montant de 2,4 Mds de dirhams, cinq banques ont soumissionné et la demande a été entièrement satisfaite. Le deuxième a porté sur une somme de 4 Mds de dirhams sur 5 Mds demandés. Pour le troisième appel d'offres, les banques ont demandé plus de 8 Mds de dirhams, alors que BAM n'en a servi que 6 Mds. Le dispositif existant a pu injecter dans l'économie, à lui tout seul, quelque 12,4 Mds de dirhams, mais il comportait une limite gênante: il portait sur une durée de trois mois ce qui donnait que très peu de visibilité aux banques, sachant que leurs prêts portent sur des durées bien plus importantes. L'équipe de BAM ne l'a pas clairement expliqué, mais il semble que ce dispositif ne répondait plus aux nouveaux critères prudentiels rentrés récemment en vigueur. L'exemple britannique Pour rectifier le tir, la Banque centrale s'est inspirée d'un dispositif semblable mis en place par la Banque d'Angleterre, lui aussi consacré aux PME. C'est ainsi qu'un nouveau dispositif a été mis en place «tout en respectant nos propres spécificités», assure l'équipe chargée du projet. Dorénavant, l'engagement de la Banque centrale se fera sur deux ans. Sur cette période, les opérateurs seront sûrs que le dispositif est fonctionnel. Ensuite, la durée des prêts sera d'un an au lieu de trois mois actuellement. Enfin, les critères d'éligibilité deviennent bien plus flexibles. Pour les entreprises avec un chiffre d'affaires de 175 MDH, les prêts assortis passeront à 50 MDH, au lieu de 15 MDH actuellement. Le dispositif est déjà opérationnel La mesure contient ce que l'équipe de BAM a appelé «une allocation initiale». Cette dernière accorde dès maintenant le droit aux banques de se refinancer à hauteur de 10% de leur encours global des crédits octroyés aux TPME arrêté au 30 juin dernier. Toute hausse supplémentaire de l'encours à partir de cette allocation sera automatiquement refinancée par BAM. Si ces entreprises sont exportatrices ou industrielles, l'allocation initiale sera doublée, et les refinancements additionnels également. Tout cela se fera au taux directeur de 3%. Par ailleurs, le dispositif contient une sorte de sanction pour les banques qui ne jouent pas le jeu mais cette sanction est facilement contournable. En effet, les banques peuvent se financer a priori auprès de BAM et au bout d'un an, lorsque les comptes sont faits et que la banque n'a pas octroyé autant de crédits aux PME que ceux demandés à BAM, elle sera sanctionnée de quelque 150 pbs supplémentaires sur ses prochains financements, soit un taux de 4,5% sur le différentiel non alloué. Cela dit, les banques peuvent d'abord attendre de récolter les demandes de leurs clients pour aller voir BAM et s'assurer que tout ce qui sera demandé au régulateur sera transformé en crédits et être sures d'éviter toute sanction. Quoi qu'il en soit, le dispositif paraît clair et incitatif ne comportant aucune zone d'ombre. Les banques n'auront aucune raison de ne pas jouer le jeu car, in fine, cela impactera favorablement leur rentabilité et leur exposition en fonds propres.