La révision des textes réglementant le locatif donnera un nouveau souffle au segment. La cherté de la location diminue fortement la mobilité des populations actives et rend le coût de cette mobilité très important pour les entreprises. Le point avec Ahmed Rahhou, PDG du CIH. Finances News Hebdo : Les mesures que le gouvernement compte lancer peuvent-elles booster le segment du locatif ? Ahmed Rahhou : Le secteur locatif a effectivement besoin d'une révision des textes qui le règlementent aujourd'hui. Tout le monde est conscient actuellement que les rapports entre locataires et propriétaires sont très largement défavorables à ce dernier. Des cas nombreux, et vécus dans tous les milieux sociaux, montrent que louer un logement présente de sérieux risques pour le propriétaire qui, dans le cas où il n'est pas payé, doit traîner des procédures judiciaires longues et coûteuses pour pouvoir récupérer son bien. Cela décourage l'investissement locatif et augmente le parc de logements inoccupés, certains propriétaires préférant garder des maisons ou des appartements inoccupés plutôt que de courir le risque de les louer. Par ailleurs, beaucoup de biens loués sont récupérés dans un état déplorable une fois libérés par leur occupant locataire, sans possibilité d'indemnisation pour le propriétaire. On pourrait penser que cela ne touche que les classes aisées. Cela n'est pas vrai, parce que les victimes principales du système actuel se trouvent également dans la classe moyenne qui, parfois, ont besoin d'un complément de revenus apportés par un appartement qu'elles ont mis en location et qui tombent dans des problèmes inextricables du fait des impayés. Il faut vraiment toiletter la législation sur le logement locatif et revoir les règles de gestion des copropriétés pour éviter les dégradations des biens dans la durée. F. N. H. : Le développement de l'habitat locatif peut-il réduire la pression sur le logement, surtout dans les grandes villes ? A. R. : Louer dans les grandes villes à des tarifs abordables relève aujourd'hui d'une mission impossible. La rareté de l'offre locative renchérit bien évidemment les prix. Les promoteurs immobiliers construisent pour l'essentiel en vue de vendre à des personnes qui vont habiter les logements qu'ils réalisent. Si des investisseurs s'intéressaient au marché locatif de façon plus importante, cela augmenterait la production de logements et du coup, ferait baisser les prix. C'est la seule dynamique réellement efficace, et cela est lié au problème abordé dans votre précédente question. Il faut noter également que la rareté des biens à louer peut avoir des conséquences économiques à l'échelle du pays. La cherté de la location diminue fortement la mobilité des populations actives et rend le coût de cette mobilité très important pour les entreprises. De ce fait les ajustements sur le marché du travail d'une région à l'autre ne se font pas de façon fluide, et poussent parfois les gens à aller vers les logements construits souvent dans l'illégalité. F. N. H. : Une location avec option d'achat (LOA) dans ce segment peut-elle être attractive ? A. R. : La location avec option d'achat en bout de période existe déjà, cela s'appelle le leasing immobilier. Cet achat, par contre, n'est pas optionnel. La réglementation en matière de TVA et de droit d'enregistrement oblige dès le départ de fixer les termes de la vente future. Mais il faut dire que ce mode de financement concerne aujourd'hui plutôt les locaux à usage professionnel. F. N. H. : Pensez-vous que les institutionnels, notamment les banques, les compagnies d'assurances, les caisses de retraites puissent investir ce créneau et se porter propriétaire d'un certain nombre de logements qu'ils pourront louer ? A. R. : C'est ce qu'il faut rechercher. Cela donnerait un élan certain au développement du marché locatif parce que cela peut drainer des capitaux importants vers ce secteur, lesquels capitaux s'investissent aujourd'hui essentiellement dans les marchés financiers. Une loi, organisant la financiarisation de ce type de placement peut également avoir un effet accélérateur. Cela consiste à créer des sortes de SICAV ou de Fonds communs de placement qui s'investiraient pour l'essentiel dans le mobilier locatif. Mais là encore, il faut sécuriser davantage le propriétaire.