Entretien avec Jad Aboulachbal, notaire à Casablanca, titulaire du Diplôme d'aptitude aux fonctions de notaire de Paris Tout type de transaction immobilière inclut des frais et des taxes. Le propriétaire d'un bien peut dans certains cas bénéficier d'exonérations fiscales lors d'une vente.
Propos recueillis par Badr Chaou
Finances News Hebdo : Qu'est ce qu'un prêt hypothécaire ? Quelles conditions doit il remplir pour être régulièrement inscrit à la conservation foncière ? Jad Aboulachbal : Un prêt, le plus souvent bancaire mais pas toujours, peut être assorti d'une sûreté sur le bien immobilier dont l'emprunteur fait l'acquisition. L'hypothèque permet donc au créancier de se faire payer sur le produit de la vente de ce bien après sa saisie, et ce prioritairement à tous les autres créanciers, en cas de défaillance de l'emprunteur ou de la caution hypothécaire dans le cadre du remboursement du prêt. Cette hypothèque, dès lors que le bien immobilier donné en garantie est immatriculé à la conservation foncière, doit obligatoirement être inscrite sur le Titre foncier pour être régulièrement constituée. Cette inscription est assujettie au paiement de droits auprès de la conservation foncière selon le barème suivant : "0,5% sur la tranche de 0 à 250.000 dirhams faisant l'objet de l'hypothèque, 1,5% sur la tranche de 250.001 à 5.000.000 de dirhams faisant l'objet de l'hypothèque, 0,5% sur la tranche supérieur à 5.000.000 de dirhams faisant l'objet de l'hypothèque". A titre d'exemple pour un prêt à 5.500.000 Dhs les frais d'hypothèque s'élèveront à 1.250 dhs +71.250 dhs + 2500 dhs soit un total de 75.000 dhs
F.N.H. : De quelle manière l'acquéreur d'un bien immobilier s'acquitte t'il des droits d'enregistrement et de conservation foncière ? J.A : Lorsque la vente est reçue par un notaire les droits d'enregistrement et de conservation foncière sont acquittés directement par celui ci auprès du receveur de l'administration fiscale pour les premiers et de l'Agence Nationale de la Conservation Foncière du Cadastre et de la Cartographie pour les seconds. Pour ce faire, le notaire adresse un état des frais à l'acquéreur afin qu'il lui verse le montant total des frais dus aux administrations concernées avant de recevoir l'acte de vente. Les frais d'enregistrement doivent être acquittés dans les 30 jours qui suivent l'acte de vente sous peine de pénalité. C'est seulement quand la vente est enregistrée qu elle peut être déposée à la conservation foncière. Quand l'acte est validé par le conservateur foncier, le notaire paie les droits de conservation foncière rendant possible l'inscription de l'acheteur et de l'éventuelle hypothèque sur le Titre Foncier. Le certificat de propriété délivré par la conservation foncière atteste du nom du nouveau propriétaire et des éventuelles charges qui pèsent sur le bien. L'acquéreur peut toujours demander au notaire quittances justifiant le paiement des frais d'enregistrement et de conservation foncière.
F.N.H. : De quelle manière le vendeur d'un bien immobilier s'acquitte t'il des impôts locaux pesant sur le bien immobilier vendu ? J.A : Le vendeur est obligé de justifier du paiement des impôts locaux, à savoir la taxe d'habitation et la taxe de services communaux au moment de la vente. Lorsqu'il est à jour, il lui est délivré par la Trésorerie générale du Royaume une attestation de paiement des impôts et taxes grevant l'immeuble conformément à l'article 95 du code de recouvrement des créances publiques. Si ces taxes ne sont pas acquittées l'acquéreur en devient débiteur. Le notaire qui aurait passé une vente sans cette attestation est solidaire du paiement des impôts. Il doit donc exiger du vendeur la régularisation de la situation et peut même l'assister dans ses démarches. Pour ces deux taxes, le délai de prescription en matière de paiement est de 4 ans.
F.N.H. : Quelles sont les modalités de paiement de la Taxe sur le Profit Immobilier ? J.A : L 'impôt sur le revenu au titre des profits fonciers (TPI) doit être acquitté par le vendeur sur la base du profit foncier qui est égal à la différence entre le prix de cession du bien vendu et le prix d'acquisition. Toute personne physique mais aussi toute personne morale relevant de l'impôt sur le revenu doit déclarer la vente et payer l'impôt dans les 30 jours qui suivent celle ci qu'elle ait été inscrite ou non sur le Titre foncier, sous peine de pénalité. Cette déclaration ne peut plus être faite manuellement mais seulement en ligne. Elle nécessite en outre un identifiant fiscal. Lorsque la société qui vend est soumise à l'impôt sur les sociétés la plus-value immobilière doit être mentionnée au bilan. Si le vendeur n'est pas exonéré l'administration fiscale contrôle la sincérité du prix de vente en se fondant sur un référentiel établi par la Direction Générale des impôts qui fixe le prix au m2 par zone.Ce référentiel est accessible sur le site internet de la DGI et sert de base aux éventuelles réévaluations du prix de vente et de la plus-value taxable. Ce référentiel ne s'impose pas au vendeur au moment de la déclaration mais peut justifier postérieurement un retour vers lui de l'administration fiscale au sujet de cette opération.
F.N.H. : Pensez vous qu'un allègement des taxes permettrait la relance du marché immobilier ? J.A : Tout d'abord, il faut insister sur le fait que les droits d'enregistrement et de conservation foncière ont tous deux augmenté ces dernières années et qu' à titre d'exemple un particulier qui souhaite acheter un appartement en empruntant la totalité du prix doit payer 7 % du prix de vente de taxes diverses sans compter les honoraires du notaire. Un retour à la situation antérieure aux dernières augmentations permettrait de revenir aux alentours de 5%. Les droits d'enregistrement s'élevaient alors à 3% et non à 4% pour du bâti, l'inscription de la vente et de l'hypothèque à 1% chacune au lieu de 1,5% chacune aujourd'hui pour des biens immobiliers standards. Cela serait sans doute une incitation à l'achat Pour ce qui est du vendeur,avant de réviser à la baisse le taux de l'impôt sur la plus value, peut être faut il envisager de corriger le référentiel de la DGI. En effet si le principe même de l'existence d'un référentiel me semble pertinent, il est très important que celui ci soit connecté à la réalité du prix du marché. Hors référencer des prix supérieurs au prix effectivement pratiqués est de nature à dissuader le vendeur de vendre de crainte d'être taxé sur la base d'une plus value qu'il n'a pas réellement réalisée. Je crois cependant que les pouvoirs publics sont conscients de ce risque et envisagent une correction des référentiels afin de permettre la relance d'un secteur immobilier qui en a bien besoin.