L'introduction d'un taux d'IS à 15% pour les TPE n'a pas attiré beaucoup d'opérateurs en 2011, comparativement aux objectifs. Certains opérateurs ont toujours peur de l'Administration et de la transparence. Même avec un taux encore plus réduit ou nul, ils ne vont pas basculer vers le secteur organisé. Les efforts en matière de sensibilisation et d'information, et aussi de contrôle pour lutter contre l'informel, restent limités. Les incitations fiscales introduites dans le cadre de la Loi de Finances 2011 pour séduire le secteur informel ont attiré peu de monde. A peine 6.500 personnes ont accepté de jouer le jeu de la transparence. Le gouvernement voulait lutter contre l'informel à travers l'application d'un taux d'IS de 15% pour les TPE des entreprises réalisant un chiffre d'affaires de moins d'un MDH. Il s'agit d'un dispositif incitatif pour l'intégration du secteur et d'un traitement préférentiel en faveur des entreprises restructurées. Le but recherché est d'encourager une TPE à devenir une PME à travers des moyens lui permettant son expansion. Salaheddine Mezouar, l'ex- ministre de l'Economie et des Finances, avait annoncé à l'époque que d'autres mesures et instruments d'accompagnement pour encourager ces entreprises pour les insérer dans le secteur organisé et les inciter à l'investissement allaient suivre. Au programme figurait également la facilitation des procédures. Mais les changements politiques qu'a connus le Maroc ont différé ces décisions. Pour certains spécialistes «les mesures fiscales ne sont pas suffisantes». «Il y a une peur ancrée chez le Marocain de tout ce qui est administratif. D'autant plus que les entreprises opérant dans l'informel craignent que leur insertion dans le secteur organisé leur coûte cher par la suite. Il faut donc tenir une comptabilité et justifier les dépenses et déclarer les ressources. C'est une question de culture, même avec un taux très réduit ou nul, certaines TPE ne peuvent opérer que dans l'informel», a souligné Youssef Oubouali, professeur de droit fiscal. «Pour dissiper cette peur, l'administration doit améliorer son image de marque et son relationnel avec les contribuables», a indiqué Oubouali. Les mesures d'harmonisation et de simplification des procédures vont faciliter les choses, séduire les contribuables et instaurer un climat de confiance, surtout que le niveau d'analphabétisme est persistant. Oubouali a expliqué qu'«il faut renforcer les mesures de contrôle et lancer des campagnes de promotion de grande envergure dans les médias. Certes, la direction des impôts lance des spots télé et radio mais ils restent insuffisants pour toucher l'ensemble de la population ciblée». Le problème de contrôle n'a pas uniquement pour objectif le rendement mais aussi l'équité. La charge fiscale doit être répartie équitablement sur les contribuables. «Les ressources humaines dont dispose actuellement l'administration fiscale sont insuffisantes pour contrôler le secteur organisé, alors comment faire face à l'informel ?», s'est interrogé Oubouali. «Il y avait un projet pour faire appel aux personnels des collectivités locales pour aider l'administration en matière de recouvrement, mais cette initiative n'a pas abouti pour des rasions non encore divulguées», a-t-il noté. «Il y a beaucoup d'opérateurs qui ignorent qu'il y a des mesures incitatives. L'administration doit leur montrer ce qu'ils peuvent gagner en se conformant à la loi. La sensibilisation et la communication font encore défaut surtout que l'économie informelle est fortement présente dans le tissu national», a souligné Oubouali. Pour rappel, le secteur informel au Maroc représente une part importante dans l'économie nationale avec plus de 14% du PIB et 37% de l'emploi non agricole. Le nombre des unités informelles dépasse 1,5 million. Il faut dire que le commerce concentre près de la moitié du secteur, suivi des services et des activités manufacturières. Dans le volet fiscal, la lutte contre l'informel passe également par l'élaboration de nouvelles formules d'imposition plus simples comme le forfait, ou bien s'inspirer des expériences réussies de certains pays. Par Charaf Jaidani Un taux d'IS réduit pour les PME La lutte contre l'informel ne concerne pas uniquement les TPE mais également plusieurs PME qui ne déclarent pas la totalité de leur activité. L'idée d'un taux d'IS de 25% dédié à ces sociétés est toujours défendue par la CGEM qui milite pour qu'elle soit insérée dans les prochaines Lois de Finances. L'argument du patronat est qu'avec la baisse du taux de l'IS ces dernières années, les recettes ont sensiblement augmenté. Un taux réduit est un moyen attractif pour inciter ces entreprises à la transparence. Plus de 80% des recettes de l'IS proviennent des 100 grosses entreprises du Maroc. Alors que 70% des PME déclarent pratiquement un déficit chronique et ne payent que la cotisation minimale. Les fausses déclarations, notamment l'achat des factures pour gonfler les charges, sont toujours pratiquées par certaines entreprises. Il faut reconnaître que le poids fiscal à l'encontre des entreprises est encore lourd au Maroc. Si l'on compare avec les autres pays notamment similaires, les sociétés marocaines sont pénalisées. Il y a beaucoup d'efforts à faire dans ce sens, non seulement en matière d'IS mais aussi pour les autres impôts et taxes qui concernent l'entreprise.