■ En l'absence de mesures concrètes, le déficit budgétaire risque d'atteindre des niveaux alarmants. ■ Les propos avancés par la nouvelle équipe gouvernementale manquent de chiffres et ne sont guère convaincants. ■ Les prémices pour 2012 ne sont guère rassurantes. 42,2 milliards de DH c'est le montant du déficit budgétaire à fin novembre 2011, soit 9 milliards de plus que le montant prévu initialement par le ministère des Finances pour cette même période et soit 11 Mds de DH par rapport à la même période de l'année précédente. Tout cela met en évidence les dépenses globales de l'Etat qui augmentent plus que les recettes globales. Assurément, les dernières statistiques publiées par la Banque centrale montrent qu'au terme des onze premiers mois de l'année écoulée, les dépenses globales ont augmenté de 15,6% à 232,2 Mds de DH. La compensation à elle seule a atteint 45,6 Mds DH. La masse salariale totalise pour sa part 80,6 Mds de DH en hausse de 13% suite au dialogue social qui s'est déjà concrétisé par une hausse de 600 DH de la masse salariale. La première a eu lieu au mois de juillet 2011 et une autre est prévue pour 2012. Ajoutons à ces dépenses celle du montant décaissé au titre des subventions ayant atteint 4,2 Mds de DH à fin novembre. Du côté des recettes et en l'absence de celles liées aux opérations de privatisation, on remarque qu'elles ont crû au cours de cette période d'une manière moins rapide. Elles se sont établies à 184,4 Mds de DH, soit une progression de 8,4% par an. L'analyse des paramètres ci-dessus exhorte la nouvelle équipe gouvernementale à redoubler d'efforts pour une réduction du déficit budgétaire, voire une stabilisation. A en croire les économistes, le Maroc affiche aujourd'hui l'un des plus lourds déficits budgétaires (hors recettes de privatisations) depuis 8 ans. Ils demeurent pour autant persuadés que 2011 se soldera par un déficit budgétaire de 5,5% contre, 4,6% en 2010. Dans sa déclaration, A. Benkirane prévoit d'arriver au seuil de 3% progressivement à l'horizon 2015. Comment ? Les propos demeurent peu convaincants. «Pour la Caisse de compensation, il se contente de propositions vagues : rationaliser les dépenses et cibler les bénéficiaires. Pour ce qui est de la fiscalité, il parle d'équité fiscale, d'élargissement de l'assiette de l'impôt et de réduction des exonérations fiscales, mais sans donner de détails, sauf l'exonération du secteur agricole pour lequel il mentionne l'ouverture d'un débat. «On ne peut que regretter le manque de courage sur la réforme de la fiscalité marocaine qui doit être profonde, et qui est l'élément principal du renforcement des recettes publiques et de la réduction du déficit budgétaire», explique J. Kerdoudi, président de l'IMRI. En l'état actuel des choses et en l'absence d'une croissance assez soutenue, il est difficile de prévoir une amélioration des recettes fiscales. En mars 2012, le démantèlement tarifaire entrera en vigueur pour les produits industriels. Ce qui se traduira par une baisse des droits d'importation et de TVA y afférents. Parler d'une croissance soutenue serait illusoire sachant que l'Europe, notre principal partenaire, vit ses moments les plus difficiles. Et la France, notre principal client et fournisseur, vient de perdre son triple A. En dépit du rôle joué par la demande intérieure au cours des dernières années, il est fort à craindre que les conséquences de la crise européenne seront lourdes de conséquences pour notre économie. En regardant de près ce qui se passe et si on place le curseur sur la rubrique des dépenses, on pourrait dire que le gouvernement peut maîtriser les dépenses de fonctionnement. Mais, il ne peut toucher au budget de la Caisse de compensation au risque d'aller à l'encontre des objectifs sociaux tant revendiqués, voire de porter un coup de massue au pouvoir d'achat des populations moyennes. Aussi, nous savons très bien que le budget alloué à la compensation dépend des fluctuations des tarifs du baril de pétrole et qui, ces dernières années dépend fortement de la dynamique de croissance enclenchée dans certains pays émergents (Chine, Inde et Brésil). Donc tout reste à prévoir. ■ Par S. Es-siari Quel effet d'éviction ? Lorsqu'on examine les effets d'éviction induits par le déficit budgétaire et l'expansion de la dette publique, il est utile de distinguer, d'une part, les répercussions à court terme de celles à long terme et, d'autre part, les répercussions directes des indirectes. Dans une analyse de l'éviction à long terme, les variables qu'on suppose normalement exogènes dans le court terme - notamment les stocks d'actifs et les anticipations - peuvent devenir endogènes, ce qui permet d'apprécier les répercussions d'une modification de la politique économique une fois que ces variables ont pris leur valeur d'équilibre. Dans ce type d'analyse, la question cruciale est le comportement des facteurs appartenant au secteur privé : il s'agit notamment de savoir dans quelle mesure les titres émis par les administrations publiques pour financer une augmentation du déficit budgétaire seront considérés comme un accroissement de la valeur nette du patrimoine du secteur privé. II y a éviction directe lorsque les mesures expansionnistes prises par les pouvoirs publics sont simultanément compensées, en tout ou en partie, par une contraction de la dépense privée. L'exemple le plus évident est celui d'une situation de plein emploi, où une dépense publique supplémentaire est nécessairement compensée en totalité par les ressources soustraites à l'activité du secteur privé. Toutefois, l'éventualité qui présente le plus d'intérêt pour l'action des pouvoirs publics est celle d'une éviction directe intervenant alors même que le plein emploi n'est pas atteint.