L'industrie agroalimentaire (IAA) représente la deuxième branche industrielle du pays. Plusieurs freins entravent le développement de cette activité. La branche agroalimentaire est en pleine mutation, notamment avec l'instauration de la loi 28-07. Dans un souci de produire mieux et de se conformer aux standards internationaux, le Maroc s'est engagé ces dernières années dans un processus de modernisation de l'industrie agroalimentaire, de l'agriculture à la distribution. En effet, pour renforcer le développement du secteur, les pouvoirs publics ont fourni d'énormes efforts, dont notamment la mise en place du Plan Maroc Vert (PMV), l'intégration du secteur dans la stratégie industrielle du pays, l'engagement de mesures dans le cadre du Pacte pour l'émergence industrielle et la création de l'ONSSA (l'Office National de Sécurité Sanitaire des Produits Alimentaires), en plus de la mise en place de la fameuse loi 28-07 pour la sécurité alimentaire. Pour rappel, l'industrie agroalimentaire (IAA) est la deuxième branche industrielle du pays avec près de 30% de la production industrielle totale, dont 16 à 17% sont exportés annuellement. Avec près de 2.000 entreprises et 100.000 emplois en 2008, d'après le ministère du Commerce et de l'Industrie, l'IAA occupe une place stratégique dans l'économie nationale, représentant 25% du total des établissements industriels constitués principalement de PME à hauteur de 95%. D'ailleurs, ce dernier a généré pour la même année 86 milliards de dirhams de production et plus de 13 milliards à l'export. Ce secteur présente des capacités de développement énormes vu les potentialités agricoles et agroindustrielles du pays. Toutefois, il reste, dans son ensemble, caractérisé par un système productif fragile et structurellement faible, notamment au niveau des exportations. Bien qu'étant un pays à vocation agricole, le Maroc reste partiellement dépendant en ce qui concerne ses besoins alimentaires. L'industrie marocaine, qui a largement bénéficié du «confort» du protectionnisme, se doit d'être maintenant compétitive pour affronter les espaces économiques performants avec lesquels le Maroc a signé des accords de libre-échange. Cependant, l'industrie agroalimentaire marocaine fait face aujourd'hui à trop de freins qui l'empêchent de s'épanouir et de croître. En effet, si au niveau de plusieurs branches quelques entreprises, généralement de création ancienne mieux intégrées ou filiales de multinationales, réalisent des résultats satisfaisants, les performances du secteur demeurent globalement en deçà de ses potentialités. Freins au développement Les faibles taux d'investissement et le retard technologique, la sous-qualification du capital humain et la prédominance du travail précaire, la faiblesse de l'innovation et de la qualité ainsi que les carences de l'organisation managériale des entreprises caractérisent l'évolution structurelle de cette industrie. L'autre frein conséquent est l'aspect fiscal. Le Maroc fait partie des pays qui taxent le plus les entreprises, agroalimentaires. Quel que soit le type d'impôt (IS, TVA), le Maroc est le moins compétitif. Cette situation entraîne deux distorsions : d'un côté, elle pénalise les entreprises structurées et transparentes, de l'autr,e elle pousse à la prolifération de l'informel, privant les caisses de l'Etat d'entrées considérables. Cela sans parler du signal négatif envoyé aux investisseurs étrangers. L'outil fiscal intervient également dans la différenciation au niveau de la TVA appliquée au secteur agricole et celle appliquée à l'industrie agroalimentaire. L'écart est de 0 à 20% (0% sur les produits agricoles et 20% sur les produits industrialisés). «Le gouvernement a favorisé davantage la préservation des acquis des agriculteurs que l'émergence d'une industrie agroalimentaire», souligne à cet effet Amine Berrada Sounni, président de la FENAGRI (Fédération Nationale de l'Agroalimentaire au Maroc). Cette situation n'encourage pas à transformer les produits de l'agriculture et, en conséquence, n'incite pas au développement de la branche agroalimentaire. L'autre frein qui pèse assez lourdement sur le secteur est sans conteste le marché informel. En effet, les produits alimentaires de contrebande se vendent un peu partout au Maroc, au coin de toutes les rues à des prix moindres, impactant ainsi de manière négative le développement du secteur. Instauration de la loi 28-07 Pour faire face à tous ces freins et se mettre à niveau des standards internationaux, le Maroc a fait un saut industriel impressionnant en matière de sécurité sanitaire. C'est l'objet de la loi 28-07 qui instaure le contrôle et la traçabilité des produits alimentaires. Cette loi touche l'ensemble de la filière agroalimentaire, le commerce et la distribution; et tout manquement aux dispositions de cette loi se traduira par des sanctions assez lourdes. Cette mutation vise à moderniser et à assurer une montée en qualité de la filière agroalimentaire. Mais il ne faut pas oublier que le marché de l'agroalimentaire est un marché à deux vitesses : si les leaders à l'export sont déjà en conformité avec les standards internationaux et donc n'auront aucun mal à s'adapter à ladite loi, les PME, quant à elles, auront du mal à suivre. Pour ce faire, une convention-cadre de partenariat a été signée récemment avec le ministère de l'Industrie, du Commerce et des Nouvelles Technologies, l'Agence Nationale pour la Promotion de la Petite et Moyenne Entreprise et la Fenagri. «Cette convention a pour objectif de définir les conditions et les modalités de collaboration entre les quatre partenaires en vue d'accompagner les entreprises de l'agroalimentaire, notamment les petites et moyennes entreprises (PME), dans les différentes phases de mise en œuvre des dispositions de la loi n° 28-07 relative à la sécurité sanitaire des produits alimentaires et ses textes d'application», souligne Hamid Benazzou, Directeur général de l'ONSSA. Il faut compter environ 18 mois pour la publication des textes d'application. Espérons que d'ici là les entreprises arriveront à se mettre à niveau et contribueront ainsi au développement du secteur. Dossier réalisé par W. M. & L. B.