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Serge Serdjebi, unique en son genre
Publié dans Finances news le 21 - 07 - 2011

Il se présente comme agent de la culture. Serge Serdjebi est un éternel voyageur qui a offert son cœur à l'Afrique, continent qu'il sillonne depuis l'âge de 19 ans. Au Maroc, il crée l'Amstrong, club de jazz, avec un ami marocain, puis L'Empire avec Olivier Clément. Sa devise : l'amour ! Serge Serdjebi fait partie de ces personnes au parcours assez singulier. On ne peut pas faire son portrait, mais plutôt le croquis d'un parcours qui sort des sentiers battus.
Ce Marseillais passe son enfance dans sa ville natale. C'est un enfant adorable, doux et pas bagarreur du tout. «Je suis pour l'amour et l'humour».
Il découvrira l'Afrique alors qu'il est élève du primaire. «Nous étions à l'école communale et on nous parlait d'Afrique dans les manuels scolaires. C'est à partir de ce moment-là que j'ai commencé à rêver d'Afrique, d'éléphants, de savane… Plus tard, quand on grandit, on commence à lire d'autres livres sur ce continent, que je récupérais à la bibliothèque». Il va donc nourrir par la lecture toute une passion pour le continent africain.
Et à l'âge de 19 ans, il décide d'entreprendre son premier périple pour l'Afrique et commence par le Sénégal. Mais voilà, une fois sur le sol sénégalais, l'agent de police de l'aéroport lui demande son carnet de vaccination. «Je n'étais pas vacciné et, du coup, l'agent m'informe que je ne pouvais entrer en territoire sénégalais. Puis, je l'ai regardé droit dans les yeux, et je lui ai lancé la phrase suivante : «Tu m'empêches de venir chez moi, alors si tu ne me laisses pas passer, refoule-moi !». Je pense qu'il s'est opéré une certaine magie et l'agent m'a laissé passer». N'empêche que faute de vaccin, Serge connaîtra trois fois le paludisme dont une attaque chronique qui a failli lui coûter la vie.
Une fois au Sénégal, Serge va se laisser transporter par le paysage qu'il découvre. Il était enfin en Afrique, son rêve commençait à se concrétiser…
«Je suis arrivé sans objectif précis d'autant plus que je ne connaissais personne… J'ai quitté Dakar pour aller découvrir les villages aux alentours et je suis tombé sur des militaires français qui ont proposé de me prendre avec eux. Quand ils m'ont demandé où j'allais, j'ai répondu là où ils allaient; et c'est ainsi qu'ils m'ont pris avec eux jusqu'à Ouakam. Mais je ne pouvais entrer dans ce village sans l'accord du chef de la tribu qui a fini par m'accepter au milieu des siens».
De fil en aiguille, et au fur et à mesure des rencontres, Serge finira par sillonner toute la partie nord du Sénégal. Et après trois mois de vadrouille, il rentre en France … Pour préparer son deuxième voyage en Afrique. «L'Afrique m'a marabouté ! Ma mère était très attentive à mes récits … Mon père, dès le début, ne s'est jamais opposé à ma décision de partir sachant qu'une fois qu'il aura grandi, l'oiseau finira par quitter le nid de ses parents et ce n'était là que le début. D'ailleurs, je me souviens encore qu'avant de partir pour le Sénégal, il m'avait dit : «T'es en train d'écrire les premières pages de ton histoire». Et sa deuxième destination fut le Mali, un pays commerçant et désertique, pauvre mais avec une histoire tellement riche.
Et c'est ainsi qu'il va épouser le mode «vagabond» qu'il ne trouve nullement péjoratif. Serge va donc multiplier les voyages entre les différents pays africains, la France et d'autres continents. Cela n'a pas toujours été facile, mais il n'a jamais baissé les bras.
Et le coup de foudre pour le Maroc s'opérera en 1989. À l'époque, marié et père de famille, il vient seul dans sa deux-chevaux découvrir le Maroc. «En réalité, une de mes connaissances m'avait beaucoup parlé des opportunités qu'offrait le pays, mais elle a fini par me lâcher en cours de route. Je suis tout de même venu voir ce pays. Ma femme ne s'y est pas opposée parce qu'elle m'a connu vagabond». Et trois ans plus tard, Serge ouvrira L'Amstrong, le club de jazz qui fêtera en février prochain ses vingt ans et qui est l'un des endroits les plus célèbres des nuits de la ville blanche.
«J'ai en fait rencontré un type extraordinaire et compétent que je connais depuis maintenant 24 ans. Nous avons monté ensemble cette grande aventure qu'est L'Amstrong… Nous avons ramené des groupes de jazz des Etats-Unis et d'ailleurs …».
En 1993, Serge est encore une fois derrière un événement culturel : le Festival de Dar Bouazza. Il se rappelle encore toutes les personnes qui essayaient de l'en dissuader, arguant que ce serait un flop total. «À la fin du Festival, j'ai été porté par des gens simples, ces enfants du peuple qui me remerciaient d'avoir organisé cet événement pour eux», se rappelle Serge, ému. Car l'amour est son moteur dans la vie et il n'aspire qu'à une seule chose : que les gens pensent un peu à s'aimer dans cette vie.
Serge continue, tout en pérégrinant, à assurer son rôle de père de famille en se rendant régulièrement en France ou en recevant sa famille dans le pays où il résidait. «J'ai deux filles et quatre garçons auxquels j'ai eu la chance d'inculquer l'amour, tout en étant autoritaire. Il y a une bonne communication entre nous». Mais la vie réserve parfois des épreuves très dures. «Une fois, on était au bord d'une plage de la Guadeloupe avec ma femme, et elle m'a dit qu'elle avait le pressentiment qu'elle allait mourir avant moi. Et elle s'est éteinte, il y a trois ans, d'un cancer alors qu'elle n'avait que 41 ans».
Depuis, c'est lui qui veille sur la petite tribu…
Poète, Serge Serdjebi refuse de publier ses poèmes malgré l'insistance de sa fille Audrey et de son éditeur. N'empêche qu'il a écrit plusieurs chansons pour des artistes français. «Ecrire la poésie est l'une des plus belles choses qui me soient arrivées dans la vie». Un talent qui se ressource dans la sensibilité de Serge à son environnement. Et puis, homme entier, il peut se laisser aller à la colère face à l'injustice !
En juin dernier, il a fait son come-back avec L'Empire, club qu'il vient d'ouvrir à Casablanca avec Olivier Clément, qui s'occupe de la logistique de la Formula 1. Les deux hommes s'étaient rencontrés à Barcelone… et Serge avait fini par convaincre Olivier de venir investir au Maroc.
«On n'a pas cette exubérance de faire un casting à l'entrée … J'estime que toute personne a le droit de venir dans un endroit pareil, recevoir un accueil chaleureux et passer un agréable moment».
Et ce n'est pas pour autant qu'il arrêtera de voyager … N'oublions pas que le personnage qui l'a le plus marqué par sa vie et par ses écrits demeure Arthur Rimbaud. Ainsi, Serge Serdjebi ne craint pas de se lancer dans des aventures au gré de sa vie… Envers et contre tous d'ailleurs. «Comme je ne connais pas l'inconnu, l'inconnu ne me fait pas peur…». C'est que, quelque part, Serge est aussi philosophe nourri de cette grande école qu'est la vie.


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