Ce projet qui entre dans le cadre de la convention de coopération (volet culturel) entre la région du Doukkala Abda au Maroc et de la région Nord - Pas de Calais en France, est présenté sous la forme de huit puits à images et sonorisés, de deux écrans, de quatre acteurs, de quatre musiciens et d'un chœur d'enfants. Deux artistes de cirque, en complicité avec l'Ecole de Musique Al Mawcily Academia d'El Jadida et l'Ecole Nationale de Cirque Shems'y à Salé complètent ce tableau multifome.
Le regard plongé dans un puits, les oreilles recouvertes d'un casque, le spectateur s'immerge dans un récit visuel et sonore. Son ressenti est amplifié grâce aux interventions scéniques qui créent une relation intense et vivante entre l'installation et les spectateurs. Non seulement elles mettent en relief certains aspects des thèmes exploités, mais elles permettent de vivre l'événement de manière collective et ouverte.
Sur les deux écrans dont les images en miroir similaires et inversées dialoguent, sont projetées images, musiques et sons ambiants délivrant les clefs de l'esthétique développée par l'installation : l'eau- miroir de l'histoire d'El Jadida - déclenche la rêverie, et suscite des interrogations ontologiques quant au devenir de la société marocaine."Comme l'on se penche par l'oculus, sur le toit de la Citerne Portugaise, pour en scruter les profondeurs, ici le spectateur se penche par-dessus les puits à images et à sons, contemple l'eau qui miroite et plonge dans le passé d'El Jadida.
La Citerne, lieu de rêverie, lieu de mémoire, témoin du passage des peuples, des cultures et des quatre religions principales qui ont irrigué cette ville, est notre source d'inspiration" soulignent les initiateurs de ce projet. En ajoutant que "Son histoire, invisible mais campée dans des parois multi centenaires et imposantes, nous impose une immersion souterraine, une vision nocturne. L'action des auteurs peut se comparer à celle qui se trame dans un laboratoire, où l'action du photographe révèle un négatif pour passer au positif. Ici la mise à jour du passé, par l'utilisation du miroir, de la réverbération, de l'écho et du contraire, révèle les questions qui se posent aux Jdidis d'aujourd'hui. Car d'aucuns pressentent que la Cité Portugaise est à l'aube d'un nouveau cycle d'abondance, qu'il s'agit de négocier au mieux, et que le Maroc est à l'aube d'un nouvel élan culturel et sociétal."Le metteur en scène Thierry Poquet était venu en repérage à El Jadida en juillet 2007 avec une délégation du Nord - Pas de Calais. Il avait encadré un premier atelier de formation théâtrale en décembre 2007 à l'Eglise de la Cité Portugaise avec l'atelier théâtre d'El Jadida.
En mai 2008, il a rencontré le plasticien Laurent Mulot qui exposait son projet "Middle of Nowhere" (2), avec des partenaires brésiliens, français et marocains. Les deux artistes ont alors décidé de monter un projet de résidence, de formation et de monstration en trois étapes. Ce projet pluridisciplinaire comprenait une formation théâtrale et initiation aux techniques vidéographiques (octobre 2008), une formation, enregistrement et tournage vidéographique, de musiques, de danses, d'acrobaties et de récits et une dernière formation et démonstration, une installation audiovisuelle et scénique, (automne 2010) intitulée "Mazighan ou l'Eau du Ciel". Née de ce projet ambitieux, "Mazighan ou l'Eau du Ciel" propose une installation de dimension et de forme variable initiée à partir de trois matériaux : le travail d'atelier effectué depuis 2007, des images et des sons récoltés en 2009 dans la Citerne portugaise et des interviews réalisées à El Jadida.
Ces interviews, réalisées en français en 2008 et 2009 ont été effectuées auprès de jeunes, de scientifiques, de responsables politiques et associatifs, d'artistes et de personnes âgées. Certains textes ont ensuite été sélectionnés et traduits en arabe classique et en dialecte marocain. L'arabe classique, le marocain dialectal et le français sont les trois langues audibles lors des monstrations. A ces interviews se sont ajoutés des textes de poètes, d'hommes de théâtre, d'historiens et de philosophes, tels Gaston Bachelard, Paul Claudel, Héraclite, Carl Jung, Maurice Maeterlinck, Thierry Poquet, Rainer Maria Rilke, Schopenhauer, Paul Valéry, Laurent Vidal. Certains ont également été traduits. Par ailleurs, certains textes sont extraits de l'ouvrage collectif : Lettres à un jeune Marocain, choisies et présentées par Abdellah Taïa, (Paris 2009). Il est notamment constitué de textes de Tahar Ben Jelloun, Faouzi Bensaïdi, Omar Berrada, Hajar Issami, Rachid Benzine, Rachida Lambaret, Mounir Fatmi, et Sanaa Elaji. Une nouvelle série d'interviews et d'enregistrements de sons ambiants (rues, places, cafés, souks, etc.) a été réalisée en juin 2010, notamment pour interroger des personnes sur leur perception de la situation actuelle au Maroc et sur leurs envies de devenir. L'inclusion de ces ressentis et de ces projections au cœur des récits permet de dépasser le simple cadre de la situation locale d'El Jadida, tentant de brosser un "tableau", subjectif, un instantané sensible d'un pays au cœur de son questionnement identitaire. Elle tend ainsi à une certaine universalité, notamment relative au territoire marocain. 1. Exposition "Mazighan ou l'Eau du Ciel", enceinte de la Citerne de la Cité portugaise à El Jadida au Maroc, du 30 octobre au 7 novembre 2010 2. Projet "Middle of Nowhere", la Citerne de la Cité Portugaise et à la galerie Chaïbia Talal