Ecrit par la Rédaction I La typologie des 32 territoires marocains au regard de l'attractivité économique qu'ils exercent permet de ressortir cinq classes principales, et ce conformément aux indicateurs de résultats retenus en lien avec la population, l'emploi, les entreprises et le tourisme. Dans une étude, la DEPF analyse également les leviers de renforcement de cette attractivité voire faire du « City Branding ». L'attractivité territoriale doit être à la fois productive et résidentielle pour assurer un développement soutenu, inclusif et durable. L'attractivité productive consiste en la capacité du territoire à attirer des activités nouvelles et des facteurs de production. Alors que l'attractivité résidentielle réside dans la capacité du territoire à attirer des revenus à travers la présence permanente ou provisoire de certaines personnes. Cette double attractivité des territoires est le gage d'un développement équilibré et harmonieux. Quid du Maroc ? C'est l'exercice sur lequel s'est attelée la DEPF en faisant une radioscopie des 32 territoires marocains, dont se dégagent cinq classes principales. Casablanca et Rabat : Zones à forte attractivité productive Cette classe comprend les deux pôles productifs urbains par excellence, à savoir les préfectures de Rabat et de Casablanca. Rabat est à connotation administrative d'où l'importance de l'emploi public (29% de la population active occupée), tandis que Casablanca exerce une forte attractivité pour le secteur privé (60% de la population active occupée). Ces deux destinations profitent de la littoralisation accrue des activités productives et de l'urbanisation. En conséquence, ces deux pôles drainent fortement les actifs qualifiés à hauteur de 33% et 22%, respectivement, de la population active occupée, les hauts emplois, respectivement 6% et 4% de l'emploi total, ainsi que la population active occupée de nationalité étrangère, respectivement 2,6% et 1% de la population totale. Ces deux zones restent des territoires où les entreprises choisissent de développer leur activité dans la mesure où elles se hissent en tête du classement, attestant d'une forte création des entreprises à Casablanca qu'à Rabat, soit respectivement 14.195 (1ère place) et 3.133 (4ème place) entreprises créées en 2018. Il importe, toutefois, de noter que la préfecture de Tanger, comparable par l'importance des créations des entreprises à Rabat, soit 4.092 entreprises (2ème place) créées en 2018, ne s'inscrit pas dans ce groupe, en raison de l'installation d'actifs qualifiés moindre qu'à Rabat et à Casablanca en 2014. Marrakech et Agadir : Zones à forte attractivité résidentielle pour les touristes Les territoires concernés sont principalement les deux préfectures de Marrakech et d'Agadir qui disposent d'atouts touristiques attrayants. L'héliotropisme est, entre autres, l'un des facteurs favorables à l'installation des touristes au niveau de ces deux destinations. Par conséquent, elles se singularisent par la forte fréquentation touristique parmi les régions du Maroc, soit 2,6 et 1,1 millions de touristes, et par l'ampleur de l'emploi dans le secteur du tourisme, soit respectivement 9,7% et 7,5% de l'emploi total. Ces deux préfectures se distinguent par la forte concentration de la population étrangère ayant 60 ans et plus, avec des parts respectives de 1% et 2% de la population totale. Tanger et Fès : Zones à attractivités productive et touristique moyennes La ville du Détroit et la capitale spirituelle du Maroc sont deux territoires qui enregistrent des performances très semblables en 2014 par rapport à la majorité des indicateurs de résultats choisis. Elles se distinguent par une attractivité moyennement forte aux actifs qualifiés, en réalisant des parts respectives de 12% et 15% de la population active occupée, et aux hauts cadres (autour de 2% de la population active occupée). Tanger s'offre, toutefois, le deuxième pôle productif du Royaume grâce à une forte création des entreprises en 2018, après Casablanca. Cependant, ses performances enregistrées par rapport aux autres indicateurs reflétant l'attractivité productive ne lui permettent pas de se hisser parmi « la classe 1 ». Ces deux préfectures sont à attractivité moyennement forte pour les touristes, et se hissent directement derrière le trio Marrakech, Agadir et Casablanca en la matière, comme en témoigne le nombre moyen des arrivées touristiques qui s'y implantent (694.000 pour Tanger et 589.000 pour Fès), la part de l'emploi touristique qui s'y crée (4,5% et 5% de l'emploi total) et la population étrangère ayant 60 ans et plus qui s'y installent (0,5% et 0,1% de la population totale). Dans son analyse, la DEOF note que quatre villes marocaines susmentionnées se hissent en tête du classement en termes d'attraction des IDE en Afrique sur la période 2003-2016, en particulier, Tanger au 3ème rang avec 10.542 millions de dollars, suivie par Casablanca (5ème rang, 8.370 millions dollars, Rabat (11ème rang, 4.737 millions de dollars) et Marrakech (12ème rang, 4.258 millions de dollars). La dynamique de croissance s'avère, également, en faveur de deux villes marocaines, à savoir, Tanger et Casablanca, soient des taux de croissances respectifs de 23,9% et 9,4% entre 2003 et 2016, devancées, notamment, par Accra (34,7%), Abidjan (25,4%) et Nairobi (25%). Nouaceur, Salé, Skhirate-Témara, Mohammedia et Inzegane : Zones à attractivité résidentielle pour les salariés travaillant en dehors de leur zone de résidence Ce groupe rassemble cinq territoires marocains, en particulier, Nouaceur, Salé, Skhirate-Témara, Mohammedia et Inzegane Ait Melloul se situant à proximité des grands pôles productifs, principalement Casablanca, Rabat et Agadir. Ces provinces profitent, en conséquence, du dynamisme de l'emploi des pôles productifs voisins, de l'offre résidentielle locale et d'une infrastructure de base les reliant aux grands pôles. Leurs spécificités intrinsèques ont permis de façonner l'image d'une attractivité qualifiée de résidentielle. La part des salariés travaillant hors leur zone de résidence a atteint son maximum à Nouaceur, soit 31% de la population active occupée de la province, suivie de la préfecture de Salé (29%) et des provinces de Skhirate-Témara (28%), de Mohammedia et d'Inzegane Ait Melloul (23% chacune). Casablanca, quant à elle, atteste d'une part non négligeable des navetteurs dans la population active occupée (19% de la population active occupée), en raison de l'existence des pôles industriels à sa périphérie, entre autres, Nouaceur. Settat, Khémissat, Taza, Khénifra, Safi... : Zones à attractivité productive pour les travailleurs indépendants Cette classe englobe majoritairement les provinces de l'intérieur du Maroc qui accueillent plus d'un tiers des travailleurs indépendants de la population active occupée, entre autres, Settat (43%), Khémissat (40%), Taza (39%), Khénifra (38%), Nador (37%), Safi (36%), El Jadida et Fquih Ben Salah (35% chacune), Larache (34%), Béni Mellal (32%), Taroudannt et Berrechid (31%). Cette forme d'attractivité productive tournée vers les travailleurs indépendants demeure, toutefois, faiblement génératrice d'emplois qualifiés. Ces territoires sont moins attractifs pour les actifs qualifiés, soit des parts variant entre 5,2% et 9,7% de la population active occupée, combinée à une faible création des entreprises axées principalement sur les secteurs de l'agriculture et du commerce. Ceci s'explique en partie par le fait que la plupart de ces provinces sont à dominance rurale ou ont un taux d'urbanisation en dessous de la moyenne nationale. Quels leviers de renforcement de l'attractivité ? Pour que les territoires marocains soient attractifs, ils devraient rassembler un certain nombre de facteurs déterminants d'attractivité qui représentent les moyens d'action sur lesquels il faudrait agir pour favoriser et fortifier cette attractivité. Selon la DEPF, le prix de l'immobilier joue un rôle déterminant dans le choix du lieu de résidence de la population. Les provinces de la classe 4 affichant une forte concentration des navetteurs se singularisent, en effet, par un coût de l'immobilier relativement bas comparé à celui des grandes préfectures limitrophes. Pour Casablanca, le prix du m2 oscille entre 7.000 et 35.000 dirhams, à contrario, les provinces qui l'entourent présentent un prix nettement moins élevé, entre autres, Mohammedia (entre 7.000 et 13.000), Nouaceur (entre 7000 et 12.500) et Berrechid (entre 4.500 et 8.500). Le niveau de vie et le souhait d'accéder à la propriété ont poussé les actifs occupés à venir s'installer dans ces provinces, tout en conservant leur emploi. L'installation de la population active occupée au niveau de ces territoires, contribuent au dynamisme de leur tissu économique local dans la mesure où ces territoires deviennent des lieux de consommation de cette tranche de la population. Le deuxième levier réside dans la qualité des infrastructures. Le Maroc compte 25 aéroports dont 19 internationaux. L'aéroport de Casablanca conforte la 1ère place en termes de trafic commercial des passagers, soit plus de 855.000 passagers en 2019, suivi par celui de Marrakech (plus de 525.000), d'Agadir (163.000), de Fès-Saiss (112.000), de Tanger (110.000) et de Rabat-Salé (89.000). Les autres aéroports réalisent un trafic commercial des passagers ne dépassant pas 58.000. En outre, l'ouverture de l'espace aérien marocain aux transporteurs étrangers a permis d'améliorer la connectivité du pays aussi bien avec les villes du Royaume qu'avec les pays du reste du monde. Ainsi, la préfecture de Casablanca se hisse en tête du classement en possédant 57 liaisons avec le reste du monde et 19 liaisons avec les villes du Royaume, suivie de Marrakech (24 liaisons externes et 8 liaisons internes), d'Agadir (23 externes et 7 liaisons internes) et de Tanger (11 externes et 6 liaisons internes). Ces territoires restent à attractivité avérée aux actifs qualifiés, aux IDE, et aux touristes. En parallèle, le pays est loti de 14 ports 8 commerciaux répartis sur le littoral. Le port de Tanger-Med se hisse en tête du classement en matière de trafic de marchandises en 2019, avec plus de 65 millions de tonnes, les autres ports totalisent 88 millions de tonnes en 2019, dont les principaux sont ceux de Jorf-Lasfar (35,5 millions de tonnes) et de Casablanca (30,2 millions de tonnes). Aussi, le tourisme est-il un maillon essentiel à l'attractivité des territoires. Le Maroc compte 1.079 hôtels classés et une capacité litière qui s'établit à 152.321 lits toutes classes confondues. Six préfectures totalisent 60% de la capacité litière au niveau national, avec Marrakech en tête en enregistrant 22% de la capacité litière totale, suivie par Agadir (12%), Casablanca (11%) et dans une moindre mesure Tanger-Assilah (6%), Fès (5%) et Rabat (4%), cette dernière portée par le tourisme d'affaire. La disponibilité d'une offre touristique attrayante au niveau de ces territoires, en plus de leurs spécificités intrinsèques, oriente le choix des touristes aussi bien marocains qu'étrangers comme en témoignent les arrivées touristiques massives particulièrement sur ces territoires. L'accès de la population à l'internet haut débit constitue également un élément d'attractivité aussi bien pour les entreprises que pour les ménages. Ainsi, les grands pôles urbains à forte attractivité productive pour les actifs qualifiés et les IDE attestent d'un nombre d'internautes plus important que la moyenne nationale. Notamment à Rabat où il bat son record, soit près de 50% d'internautes en 2014, Casablanca (2ème place avec 35%) et Tanger (25%), ainsi que les territoires à attractivité résidentielle aussi bien pour les touristes, en particulier, Agadir (33%) et Marrakech (26%), que pour les navetteurs, entre autres, Skhirate-Témara, Salé (30% chacune) et Mohammedia (26%). Par ailleurs, la taille du marché est un facteur déterminant dans le choix de localisation des entreprises particulièrement les multinationales. Cette notion est souvent appréhendée par le PIB et son dynamisme. Avec une part de 15,3% de la richesse nationale en 2018, la préfecture de Casablanca conforte la 1ère place avec 170.042 millions de dirhams suivie par la préfecture de Tanger (4% du PIB et 43.982 millions de dirhams), d'El Jadida (4% et 43.892 millions de dirhams) et la province de Kenitra (y compris Sidi Slimane) (3,8% et 42.286 millions de dirhams). Les territoires de Rabat, Settat (y compris Berrechid), Mohammedia, Khouribga, Salé et Marrakech affichent des parts autour de 3%. Sur les six dernières années, les territoires les plus dynamiques sont Skhirate-Témara, avec un rythme de croissance qui a atteint 18,7%, Salé (17,2%), Oued Ed Dahab et Laâyoune (10,4% chacun) et Kenitra (10%). Force est de constater que les territoires ayant une taille de marché large exercent une attractivité productive aux actifs qualifiés, aux moyennes et grandes entreprises et aux IDE « groupe 1 y compris Tanger-Assilah » et une attractivité touristique « groupe 2, en particulier, Marrakech ». City Branding Partant du constat qui stipule, la DEPFS estime que la notoriété de la ville génère son essor économique. L'idée est de concevoir un projet urbain visant à façonner une image de marque pour les territoires à faible attractivité économique, fondée sur un syncrétisme de l'identité héritée et de l'identité projetée du territoire. Les cibles sont à la fois les habitants locaux, les touristes et les entreprises. Certaines villes du Maroc regorgent de multiples spécificités mais manquent d'un vrai « label » faisant d'elles des destinations attractives.