Les 1000 personnes les plus riches du monde ont retrouvé leur niveau de richesse d'avant la pandémie en seulement neuf mois. Jusqu'ici, tout va bien. Les personnes les plus riches du monde sortent indemnes de la pandémie de Covid-19, selon l'ONG Oxfam qui publie ce lundi 25 janvier son rapport annuel sur les inégalités, à l'occasion de l'ouverture – en ligne – du Forum économique mondial de Davos. Mieux, elles en auraient même tiré profit. Oxfam en appelle à taxer la richesse, afin de combattre le « virus des inégalités » bien persistant. Le début de la crise liée au coronavirus a pu les perturber mais les plus grosses fortunes mondiales connaissent désormais une embellie. « Les 1000 personnes les plus riches du monde ont retrouvé leur niveau de richesse d'avant la pandémie en seulement neuf mois alors qu' il pourrait falloir plus de dix ans aux personnes les plus pauvres pour se relever des impacts économiques », fait savoir Oxfam. A l'échelle mondiale, les milliardaires ont même vu leur fortune augmenter de 3900 milliards entre le 18 mars et le 31 décembre derniers, selon l'ONG qui s'appuie en particulier sur les données de Forbes et de Crédit Suisse. Les recommandations de Oxfam Pour contrer cette flambée des inégalités, Oxfam reprend les propositions des économistes Thomas Piketty et Gabriel Zucman qui consistent à taxer davantage les plus riches. « La crise du corona doit marquer un tournant dans la fiscalité des personnes et des entreprises les plus riches, estime Oxfam. Elle nous offre l'occasion d'établir enfin une fiscalité juste, de mettre fin au nivellement par le bas et d'initier un nivellement par le haut. » Selon l'ONG, cette hausse de la fiscalité « peut prendre la forme d'une augmentation de l'impôt sur la fortune, de taxes sur les transactions financières et de mesures d'éradication de l'évasion fiscale. » Oxfam cite en exemple l'Argentine, qui en décembre a adopté une loi instituant un impôt extraordinaire sur les grandes fortunes. La recette, qui pourrait rapporter quelque 3 milliards de dollars, vise à financer la lutte contre les effets du Covid-19. En France, où l'impôt sur la fortune a été supprimé en 2018, le gouvernement a exclu d'augmenter les impôts d'ici la fin du quinquennat en 2022 pour financer son coûteux plan de soutien à l'économie. À l'occasion de la sortie de ce rapport, Oxfam France lance ce lundi une campagne qui détourne la devise républicaine. Des affiches « liberté, inégalités, fraternité » seront brandies devant des lieux symbolisant la République dans 10 villes de France dont Paris, Lyon et Lille. Chaque année, Oxfam choisit stratégiquement la veille de l'ouverture du Forum économique mondial, grand rassemblement de l'élite politique et économique de la planète, pour publier son vaste rapport sur les inégalités, avec une force de frappe relative auprès des décideurs néolibéraux. Cette année, la publication pourrait avoir un autre impact en illustrant, chiffres à l'appui, l'impérieuse nécessité de changer rapidement de modèle économique. Pour la première fois depuis plus d'un siècle, les inégalités économiques risquent de s'accroître simultanément dans presque tous les pays du monde à cause de la COVID-19; un phénomène inédit depuis que ce type de données a commencé à être enregistré, il y a plus d'un siècle, souligne le rapport intitulé Le virus des inégalités. Les milliardaires ont retrouvé le niveau de richesse qui était le leur avant la pandémie en seulement neuf mois, alors qu'il faudra plus de dix ans aux personnes les plus pauvres pour se relever des impacts économiques du coronavirus. Extrait du rapport « Le virus des inégalités » S'appuyant sur des données de la Banque mondiale, Oxfam avance que 501 millions de personnes supplémentaires vivront avec moins de 5,50 dollars par jour en 2030 si les gouvernements laissent les inégalités augmenter de seulement deux points de pourcentage par an, et le nombre total de personnes vivant dans la pauvreté devrait être supérieur à celui enregistré avant la pandémie. Le concept de cette enquête annuelle menée auprès de 295 économistes dans 79 pays varie peu ou prou : des chiffres astronomiques concernant une poignée d'individus et des illustrations évocatrices pour tous. Pour la mouture 2021, l'ONG engagée contre la pauvreté n'a pas lésiné sur les comparaisons révoltantes afin d'illustrer le gouffre abyssal qui sépare les plus riches du reste de la population. Le patron d'Amazon, Jeff Bezos, par exemple, aurait très bien pu verser à ses quelque 876 000 employés une prime de 105 000 $… et demeurer aussi riche qu'il l'était au début de la pandémie, avance l'enquête. Les chefs d'entreprises les mieux rémunérés au Canada gagnent en deux jours seulement le salaire annuel d'une infirmière, illustre encore Oxfam. Autre exemple : les dix hommes les plus riches du monde ont vu leur fortune totale augmenter de plus de 600 milliards de dollars depuis le début de la pandémie, une somme qui serait amplement suffisante, établit l'enquête, pour financer le vaccin contre la COVID-19 pour toutes et tous et faire en sorte que personne ne sombre dans la pauvreté à cause de la pandémie. En outre, 112 millions de femmes ne seraient plus exposées au risque de perdre leurs revenus ou leur emploi si le taux de représentation des hommes était le même que le leur dans les secteurs affectés par la crise de la COVID-19, poursuit l'étude, qui dénonce aussi bien les inégalités économiques, de genre que raciales et sociales.