Al Boraq fête son premier anniversaire avec des réalisations qui couvrent le coût d'exploitation. Grâce à l'emprunt obligataire, l'ONCF a versé au mois d'octobre 1 Md de DH aux fournisseurs. Avec 10 Mds de DH de dettes, l'Office envisage la restructuration de la dette durant 3 ans. Il y a environ trois ans, le lancement d'une ligne à grande vitesse au Maroc relevait de l'utopie. Aujourd'hui, c'est une réalité qui souffle sa première bougie et qui confirme une stratégie visionnaire grâce à laquelle le Maroc figure désormais dans la liste des pays les plus développés en matière d'infrastructures ferroviaires. C'est ce qu'a affirmé Rabie Khlie, Directeur général de l'ONCF lors d'un point presse organisé ce mercredi 20 novembre pour présenter les réalisations et les performances de cette fierté nationale. « Le TGV n'est pas un éléphant blanc mais un projet bien rentable », a-t-il souligné. Le DG de l'Office a fait référence au coût d'exploitation que le TGV arrive à couvrir en une seule année. Et d'ajouter que parmi les facteurs clés du succès, il y a le financement optimisé du projet ainsi que la frugalité de l'investissement avec un coût au kilomètre le plus compétitif au monde. Toutefois, avec des tarifs accessibles, la question de la viabilité de l'investissement ne cesse de se poser. R. Khlie rassure en affirmant que grâce au business model et au modèle d'exploitation marocain, le TGV arrive à couvrir l'ensemble des charges d'exploitation. « Nous sommes en phase par rapport à ce que nous avons prévu en termes de revenus. La marge opérationnelle qui s'inscrit dans la fourchette haute des Benchmark internationaux permet de matcher avec la charge du coût du matériel roulant. Ce qui reste une exception sur un projet pareil », tient à préciser le DG de l'Office. Pour le top management de l'Office, s'agissant d'un projet à rentabilité socio-économique, le fait de ne pas subventionner l'exploitation et d'arriver à l'équilibrer est un exploit en soi. « Plus encore, nous avons dépassé nos attentes puisque nous arrivons même à dégager une marge opérationnelle qui devra couvrir fin 2019 les charges de capital du matériel roulant », se félicite Khlie. Mais est-ce que les recettes sont suffisantes pour rentabiliser le lourd investissement ? Rappelons que le projet a coûté environ 23 milliards de DH, sur un total d'environ 50 milliards d'investissements menés par l'ONCF pour le triplement de la voie ferrée entre Kénitra et le doublement de la voie entre Casablanca et Marrakech. D'après les chiffres dévoilés, en 10 mois (de janvier à octobre 2019), Al Boraq a transporté 2,5 millions de voyageurs avec des perspectives de 3 millions de voyageurs fin 2019. Mais, bien que ce chiffre dépasse les attentes de l'Office, il va falloir beaucoup plus pour équilibrer les comptes. Le Top management n'a pas souhaité révéler le chiffre d'affaires réalisé par Al Boraq sous prétexte que les chiffres ne sont pas encore arrêtés. L'Office dans de beaux draps Si la situation financière de l'Office suscite l'intérêt, c'est parce que l'ONCF figure parmi les 4 établissements publics les plus endettés. Dans une dernière réunion avec les médias, le ministre de l'Economie et des Finances, Mohamed Benchaâboun n'a pas manqué de rappeler la situation financière alarmante de l'Office qui a poussé l'Etat à revoir son modèle économique. En effet, l'Office est arrivé à la limite de sa capacité d'endettement. Et pourtant plusieurs projets d'extension (8 projets en étude) sont dans le pipe pour étoffer le réseau ferroviaire. Le dernier en date, la ligne à grande vitesse entre Marrakech et Agadir annoncée par le Souverain dans son discours du 6 novembre 2019, à l'occasion de la commémoration du 44ème anniversaire de la marche verte. C'est pourquoi l'Etat via le ministère des Finances et celui de l'Equipement a signé le 25 juillet 2019 avec l'Office un protocole d'accord du contrat-programme Etat-ONCF. En cours de finalisation avec la signature prévue d'ici fin 2019, ledit programme vise à assainir la situation financière de l'Office et accomplir le plan d'investissement. Pour cela, l'Etat a prévu de revoir la structure de l'Office tout en gardant son unicité. Il sera question de séparer les activités exploitation et investissement. L'ONCF ne sera plus en charge de l'ensemble des investissements mais cela relèvera plutôt du rôle de l'Etat. La refonte institutionnelle du contrat-programme prévoit deux structures. L'ONCF comme étant un établissement semi-public à caractère industriel et commercial qui sera le propriétaire du réseau et où sera domiciliée la dette de l'investissement soit de l'extension du réseau. Et d'autre part, il sera question de créer l'ONCF SA qui sera en charge de l'exploitation et de la gestion d'infrastructure. Ladite entité devra être assainie financièrement. Restructuration de la dette de l'Office Le contrat-programme prévoit également l'amélioration du profil du passif de l'ONCF. En d'autres termes, il s'agira de restructurer la dette locale de l'ONCF (banques et emprunt obligataire) qui est de 10 Mds de DH sur 3 ans (2019-2021) à travers de nouveaux emprunts long terme bénéficiant de la garantie de l'Etat. « Nous avons fait une première opération d'emprunt obligataire de 3 Mds de DH sur 30 ans avec 15 ans de différé et un taux fixe de 4,02 qui était une réussite. Elle permet de restructurer les dettes mais aussi d'optimiser les conditions de ses prêts », a expliqué Rabie Lkhlie. Rappelons que le ministre de l'Economie et des finances avait émis un arrêté n° 985-19 du 27 mars 2019 fixant les modalités de conclusion des contrats d'emprunt par l'Office national des chemins de fer auprès des banques à concurrence de 2. 500 MDH publié dans le BO du 25 avril 2019. C'est grâce à cette garantie que l'ONCF a pu assainir une partie de ses dettes fournisseurs. R. Khlie nous a affirmé que l'Office a versé 1 Md de DH aux fournisseurs durant le mois d'octobre et s'engage à assainir sa situation au courant du premier trimestre de 2020. L'Office compte également sur la revalorisation de ses actifs non stratégiques et la monétisation des gares. L'objectif étant d'avoir des revenus pour assainir une partie de la dette mais aussi des engagements de l'amélioration de l'efficience opérationnelle. Khlie a précisé que l'enjeu est que la nouvelle structure ONCF SA puisse créer des filiales avec des partenaires sur un certain nombre d'activités de manière à sécuriser le trafic et améliorer l'efficience opérationnelle. Parmi les privatisations qui ont fait couler beaucoup d'encre celle de la Mamounia. Interpellé sur ce sujet, Rabie Khlie s'est limité à dire que « la Mamounia est un patrimoine national marocain et le restera ». En d'autres termes les repreneurs seront des institutionnels marocains qui entreront dans le tour de table avec l'ONCF. L'Etat avec les régions sera désormais en charge du financement des extensions et donc la partie des infrastructures. Et c'est l'ONCF qui sera le maître d'ouvrage de la réalisation des projets d'extension.