Il a gardé de beaux restes de son passé de sportif de haut niveau. Cet homme d'affaires a multiplié les formations, est passé de carrière en carrière, pour devenir un entrepreneur social qui allie action associative et sensibilisation au développement durable. Par Noréddine El Abbassi Le deuxième round du sommet du climat se prépare à Marrakech. La COP 22 fait écho à la COP 21 qui s'est tenue à Paris. Au Maroc, l'évènement va à nouveau mobiliser les acteurs du développement durable. Signe des temps, le Maroc n'est pas une patrie de Paul Watson et d'éco-extrémistes tendance Children of Gaïa ou Green Peace. C'est plutôt une volonté Royale, affirmée lors du discours de la Fête du Trône du Souverain, qui a mis la problématique sur la table, et ouvert la voie à toute une génération d'activistes «soft» pour le développement durable. Mehdi Alaoui Mdaghri, est de ceux là. Grand et athlétique trahissant son passé de tennis man de haut niveau, une barbe «roots» et un style bobo parisien, permet de situer le personnage. C'est un enfant de la campagne, et son attirance pour la protection de la nature, on la trouve dans ses premières années au grand air. Il est né en 1972, à Casablanca. Aîné des six enfants d'un haut fonctionnaire multicartes, et d'une enseignante universitaire, il retrace son passé avec beaucoup d'humour: «mon père était directeur de l'ISCAE. Du coup, notre adresse était «km 9,5». Nous étions en dehors de Casablanca, et à cette époque c'était réellement la campagne, avec trois forêts autour de nous. Chaque jour, je revenais avec un animal recueilli dans la nature, depuis le chat au serpent», se remémore-t-il dans un rire spontané. Le jeune Mehdi arpente la grande école marocaine, entre les terrains de tennis et la bibliothèque familiale que son père étoffe. L'occasion pour lui de dévorer les romans de science fiction, et de découvrir les classiques de la littérature française du XIXe et du XXe siècle. Débuts dans les affaires Hyperactif, ses parents essaient de canaliser son énergie dans le sport. Il pratique alors le judo et le tennis, et c'est dans ce dernier sport qu'il excelle. Il sera même classé au championnat national, et participe à l'organisation de ce qui deviendra le tournoi Med Avenir. Prémonitoire cette première expérience, à l'âge de 14 ans, puisque l'organisation d'évènements deviendra, plus tard, son métier. Il passe de classe en classe, de lycée en lycée, et passera son Baccalauréat au Lycée Descartes de Rabat. Ce sera un bac B, en 1991. Après quoi, il s'envole pour Montréal poursuivre ses études. Là, il décroche un certificat en anglais, avant de revenir à une destination plus classique pour l'époque. Il use les bancs de l'Ecole Lincoln International Business School, qui sera reprise par le groupe ESG de Paris. Avant de revenir au Maroc. Il n'est alors pas question de commencer dans le salariat. Mehdi lance une première entreprise, Alabel, avec son ami M. Belarbi, et les deux associés commercialisent des modems US Robotics, dont tous les internautes de plus de 30 ans se souviennent encore. Nous sommes en 1995, et Internet pointe au Maroc. C'est encore un service loin d'être généralisé, et pour ouvrir une fenêtre, il faut attendre de longues minutes avant d'accéder à la toile. C'est également la période de l'émergence des «chats» et «l'apparition» du «village planétaire». Mehdi diversifie son activité. Avec le même associé, ils se lancent dans la téléphonie mobile et les kiosques téléphoniques. Nouveau développement de leur activité, ils se lancent dans la formation. Les affaires se portent plutôt bien. Cadre puis doctorant Arrive 2001, Mehdi aspire à développer ses compétences. Il s'envole pour l'Espagne préparer un Master en Gestion Interculturelle à la New Arab Management School. L'école compte alors des professeurs émérites, tels que feu Mohamed Arkoun. Ce dernier penseur de l'islam dispense ses cours en tolérance religieuse et le travail en milieu interculturel. Mehdi progressera jusqu'à devenir l'assistant de recherche du grand professeur Guiseppe Riverola. L'année 2001 est également celle du 11 septembre, et Mehdi est en plein milieu du fief de l'organisation conservatrice chrétienne, Opus Dei : «étant le seul arabe musulman de l'amphithéâtre, lorsque l'on diffusait les images des Twin Towers s'écraser, je me dirigeais discrètement vers la sortie. Il ne faisait pas bon être un «moro» en Espagne», relate-t-il. Il poursuit néanmoins ses études en Espagne, dans la grande école du pays, l'IESE. En parallèle, professionnellement, Mehdi prépare l'introduction du distributeur de produits de grande consommation, Persan, sur le marché marocain, connu pour sa marque de détergents Flotta. Retour au Maroc. Au courant de la même année, Mehdi intègre Xerox, dans son pôle impression. Il est chargé de commercialiser des systèmes d'impression de masse. Il y restera jusqu'en 2003, quand à nouveau, son appétit de savoir le reprend. Mehdi s'envole pour un doctorat en Italie. «J'ai décroché une bourse de recherche sur le e-business. J'ai été surpris d'être classé 3e sur les 600 candidats au concours d'admission à l'Université de Lecce. Je n'avais pourtant lu que quelques livres sur ces problématiques», explique-t-il. Commence alors un cycle d'études sur les évolution du monde des affaires, avec l'arrivée d'internet. Mehdi se penche sur le cas des entreprises touristiques du Maroc, dans le tourisme rural. C'est dans ce cadre, qu'il étudie sous la férule de David Verrill, le Directeur de Laboratoire e-business du MIT. Retour à l'écologie Nouveau changement d'horizon, pour la veille stratégique et l'intelligence économique. Mehdi intègre le leader européen de veille stratégique, Digimind, et passe son temps entre deux avions. «J'étais deux semaines à Paris, une au Maroc, et une quatrième ailleurs, quelque part dans le monde. On travaillait sur des questions intéressant autant des gouvernements que des entreprises privées.» Mehdi est alors en charge de l'Europe du Sud et de l'Afrique et pilote l'installation de la veille stratégique pour de grands groupes, tels que la CDG ou Maroc Telecom. Mais c'est également à ce moment, et dans le cadre de ses responsabilités, qu'il revient à ses premières amours, l'évènementiel. Mehdi organise des conférences et des séminaires pour Digimind et mûrit son idée de promouvoir le développement durable au Maroc. C'est en 2009, lorsque le fameux discours de Sa Majesté ouvrira la voie, qu'il peut passer à la concrétisation de sa réflexion. Mehdi lance alors l'ONG Planète Citoyenne, et participe aux festivals de Dakhla et de Lalla Takerkoust et organise différentes sorties thématiques. «Il s'agissait de promouvoir le développement durable par différents biais. Le sport, la spéléologie, ou ornithologie par exemple. Dans un sens, nous voulions faire passer le message auprès du public», explique-t-il. Commence alors une période de lobbying. En parallèle, il fonde son entreprise Eugeno, en 2014. Un an après avoir fondé le Forum de la Mer, et, l'année suivante, le Solar Festival en collaboration avec Patrick Bauer, initiateur du Marathon des Sables. Depuis, Mehdi Alaoui Mdaghri continue dans l'associatif: « je ne suis pas un écolo extrémiste», tempère-t-il. Et qui pourrait en douter? BIO EXPRESS 1972: naissance à Casablanca 1991: Bac B au Lycée Descartes 1995: Ecole de commerce Lincoln International Business School Fondation de ALABEL et Heracles 2001: Master en gestion interculturelle de la New Arab Management School Master à l'IESE Madrid Entrée à Xerox 2003: Doctorat en e-business à l'Université de Lecce 2007: responsable Europe du Sud et Afrique en intelligence économique et veille stratégique à Digimind 2009: fonde l'association Planète Citoyenne 2013: fonde le Forum de la Mer 2014: fonde Eugeno 2015: fonde Solar Festival