Hôtellerie. Les promoteurs hôteliers mettent les bouchées doubles pour sortir de terre plus d'une quinzaine d'hôtels à Casablanca. Qui sont-ils ? Pourquoi un tel engouement ? par Adama Sylla I l y a de cela trois semaines à Casablanca, les investisseurs regroupés au sein de l'Association nationale des investisseurs touristiques (ANIT) et les banquiers réclamaient un plan Marchal pour l'investissement touristique. Et, leur constat donnait froid au dos : 40 % des 18 milliards de DH d'encours des crédits bancaires octroyés au secteur sont classés en souffrance. Ce qui laissait entendre que les projets hôteliers étaient en mal de rentabilité. Pourtant, à Casablanca, tel ne semble pas être le cas. En effet, dans la capitale économique, les promoteurs hôteliers ne se font pas prier pour investir. Pour preuve, ils sont 13 à lancer actuellement des projets. Derrière cet engouement, se cache une rentabilité quasi-garantie. Les hôteliers ne s'y trompent pas. Les recettes du tourisme d'affaires sont en moyenne trois fois plus élevées que celles dégagées par la clientèle des loisirs. Résultat : tous les hôteliers veulent y être présents. «S'il y avait du foncier disponible à Casablanca, sa capacité d'hébergement exploserait et dépasserait même celle de Marrakech», estime un opérateur touristique. Quoi qu'il en soit, les hôteliers mettent le paquet pour sortir de terre de nouveaux établissements, augmentant par ricochet la capacité litière de Casablanca. 17 hôtels totalisant près de 4 500 lits sont en construction ou dont les projets sont sur le point d'être lancés. Cette nouvelle capacité d'hébergement viendra s'ajouter aux 17 500 lits déjà existants. Rien que pour ce dernier semestre de cette année, ce sont pas moins de 3 nouveaux hôtels qui vont ouvrir leurs portes. C'est le cas de la chaîne hôtelière «Kenzi hotels group», qui a signé récemment un accord avec la société Salima holding (société arabe libyo marocaine holding), afin d'ouvrir un nouvel hôtel au quartier des affaires de Casablanca, Sidi Maarouf. Ainsi, le Kenzi Sidi Maârouf qui sera doté de 130 chambres, dont 8 suites junior, 2 suites sénior et 7 duplex, ouvrira ses portes en septembre 2015. La chaîne Ryad Mogador Hôtels du groupe Chaâbi, elle, va bientôt intégrer le quartier des grands hôtels de la capitale économique qui accueille déjà Hyatt Regency, Sofitel Tour Blanche, Royal Mansour, Sheraton et Golden Tulip. Situé exactement sur l'Avenue des FAR, le groupe hôtelier d'Ynna Holding est en train de régler les derniers détails pour une ouverture en grande pompe de son complexe. En effet, la chaîne Ryad Mogador Hôtels déclinera deux établissements hôteliers : le Grand Mogador Casablanca (5 étoiles luxe) et le Mogador Marina Casablanca (4 étoiles). Selon une source très proche d'Ynna Holding, Ryad Mogador Hôtels devrait procéder à l'ouverture de ses établissements casablancais dès la rentrée prochaine. Ceux-ci devront porter le nombre d'hôtels de la chaine à une douzaine d'unités. Depuis un peu plus d'une année, c'est le groupe hôtelier d'Ynna Holding qui gère lui-même ses hôtels. En effet, en décembre 2013, suite à un accord commun, le groupe Chaabi a rompu le contrat de gestion et d'exploitation hôtelière qui le liait à Louvre Group (sous sa marque Golden Tulip). Four Seasons devra emboiter le pas au Groupe Chaabi. Son établissement 5 étoiles situé à Anfa Place, qui devrait ouvrir ses portes avant la fin du premier trimestre 2015, a enregistré un retard de livraison de certains corps de métiers. L'hôtel qui disposera de 186 chambres, sera finalement opérationnel pour la fin de l'année 2015. 13 autres établissements sont aujourd'hui dans le pipe, notamment deux hôtels du Groupe M'fadel qui ont fait l'objet de deux contrats de gestion signés entre Accor Maroc et le promoteur immobilier. Il s'agit d'un Novotel et d'un Ibis qui ouvriront leurs portes à Mohammedia dans deux ans. Le premier, Ibis (3 étoiles), sera opérationnel en mai 2017. Il proposera 98 chambres. Quant au Novotel (quatre étoiles), qui ouvrira 6 mois plus tard, il renforcera la capacité d'accueil de Mohammedia de 108 chambres. A l'instar de M'fadel, Abadi, un autre opérateur marocain, est en train de finaliser la construction de son hôtel 4 étoiles dont l'ouverture est prévue au début de 2016. Guermai, qui opère dans le secteur de la santé, devrait en faire autant. Son hôtel 4 étoiles, est également en phase de finition sur le Bd Moulay Rachid (mitoyen de l'enseigne Fauchon). Le modèle que veut généraliser l'ONCF Un autre quartier, le plus cher et le plus prisé pour l'immobilier résidentiel et les franchises, le Bd Massira, est en train d'accueillir un hôtel 5 étoiles qui sera adossé à un projet de galeries commerciales et de résidences haut standing. Ce chantier sur le site de la Cité de la Police vient d'être lancé par des investisseurs marocains et émiratis. Aujourd'hui, si tous ces projets hôteliers sont en train d'être concrétisés sur le terrain, six autres ont fait l'objet d'un appel d'offres. C'est le cas notamment, du marché relatif à la construction de trois hôtels (2 et 3 étoiles ainsi qu'un appart-hôtel totalisant 500 lits) à Casa-Port. En effet, l'appel d'offres lancé en février 2014 par le groupe CDG Capital pour le compte de l'ONCF en vue de sélectionner un ou plusieurs partenaires dans les secteurs de la construction, du développement et de la gestion d'unités hôtelières et de commerces, a porté ses fruits. Le marché vient d'être attribué à un groupement marocain constitué d'investisseurs, de développeurs et d'exploitants, dont l'identité est tenue confidentielle en attendant son annonce avec une cérémonie de signature officielle. Selon l'ONCF, les travaux de construction devraient démarrer en 2016. Les trois établissements seront déclinés sur une superficie de quelque 8 000 m2 dans le périmètre de Casa-Port. L'Office gardera bien sûr la propriété des terrains. C'est ainsi qu'il a accordé une concession de 40 ans sur le foncier, moyennant une redevance fixe et variable. C'est, d'ailleurs, un modèle que l'ONCF compte généraliser à toutes ses gares. Non loin de Casa Port, sur le boulevard des Almohades, en front de mer, la société New Marina Casablanca a également lancé un appel d'offres pour la réalisation de trois hôtels au niveau de la Marina. Le premier, est un hôtel 5 étoiles qui sera géré par Oberoi, la chaîne hôtelière indienne spécialisée dans le luxe. Oberoi Casablanca aura une capacité litière de 150 clés sur 5 étages. Le deuxième projet est une tour-hôtel 5 étoiles qui portera l'enseigne de prestige «Marriott». Cette future Tour disposera d'une capacité de 300 clés sur 40 étages (150 m de haut, soit la plus haute tour de Casablanca). A noter que Marriott gérera également le futur Palais des congrès de Casablanca, d'une superficie de 15 000 m2 adossé à la Tour Hôtel Business, soit aussi le plus grand du Maroc. Si ces deux projets de la filiale de la Compagnie Générale Immobilière (CGI) ont trouvé gestionnaire, ce n'est pas encore le cas pour le troisième, un hôtel 4 étoiles qui aura une capacité de 180 clés sur 6 étages. Selon une source proche de New Marina Casablanca, les négociations sont en cours pour déterminer l'enseigne qui gérera l'hôtel. Sursaut en matière d'investissements touristiques Du côté de Bouskoura, la maison-mère New Marina Casablanca et le groupe Addoha s'y sont mis également. La première, la CGI, a lancé un appel à manifestation d'intérêt pour la recherche d'un investisseur et d'un gestionnaire pour la valorisation d'une parcelle d'une surface de 52 930 m2 destinée à recevoir un hôtel de luxe au projet «Casa Green Town» à Bouskoura. Le but étant de sélectionner un investisseur et/ou un gestionnaire, ou un couple investisseur-gestionnaire. Quant à Addoha, il en a fait autant via sa filiale Prestigia, pour céder une parcelle d'équipement autorisée pour la construction d'un hôtel à Bouskoura Golf City. Un établissement qui pourrait profiter de la proximité de l'aéroport et de la disponibilité d'un golf 18 trous. Aujourd'hui, comment expliquer ce sursaut en matière d'investissements touristiques, jusque-là plutôt timides à Casablanca. La réponse, c'est Marc Thépot, ex-président d'Accor Maroc, actuellement Consultant et Senior Advisor chez Burj Finance qui la fournit : « Ce nombre d'hôtels en construction à Casablanca peut paraitre beaucoup, mais il faut garder en tête que de nouvelles zones ont été créées, nécessitant la mise en place de structures hôtelières adaptées. Je pense en particulier à toute la dynamique créée par Casa Finance City. Le grand Casablanca est en plein essor depuis plus de 10 ans. C'est le moteur économique du Maroc avec des zones qui sont en plein développement : Casanearshore et la zone de Midparc à Nouaceur pour ne citer que certaines ». A côté de cela, le formidable développement des infrastructures, Morocco mall, Anfa Place, la nouvelle gare de Casa Port, l'aménagement réussi de la Corniche, les ambitions de la Marina: tout cela tire la ville vers le haut et en fait, en plus d'une destination d'affaires appréciée, une destination loisir qui commence à s'affirmer».