Abdeljalil Likaimi, ex-président de directoire de Hanouty Shop, démissionne et Jawad Bennis prend le relais pour mettre en œuvre une nouvelle stratégie élaborée depuis plusieurs mois. La filiale de Financecom a-t-elle besoin de compétences ou d'argent ? Fin mai, Abdeljalil Likaimi démissionne de son poste de président du directoire de Hanouty Shop, la filiale grande distribution de Finance.com. Après deux mois d'hésitations, et malgré les tentatives de Jaloul Ayad de le retenir, Likaimi est convaincu que ses demandes de fonds visant à financer sa stratégie se bloquent toujours et qu'il ne lui sied pas de continuer à jouer le rôle de figurant. Ce qu'il faut savoir, c'est que l'unique raison de son départ n'est pas liée à l'état de business de la chaîne. L'actuel directeur de Coca-Cola Export, chargé de la stratégie des embouteilleurs au Maroc, a eu beau signaler aux responsables de Finance.com qu'il fallait injecter des fonds pour déployer la nouvelle stratégie, investir beaucoup d'argent pour dégager des bénéfices et atteindre une taille critique, en montant des superettes dont la superficie se situe entre 400 et 600m2, des magasins de cette taille coûtent entre 5 et 6 millions de DH hors foncier, et un petit magasin fait vivre son propriétaire mais ne rapporte pas grand-chose à une chaîne de distribution. C'est la conclusion à laquelle Likaimi et les responsables du groupe sont arrivés. Mais il a fallu que ces derniers, pour qui Hanouty est une première expérience dans la grande distribution, soient convaincus de la logique financière du secteur. Investir de l'argent pour générer du cash. Mais combien fut grande la déception de Likaimi lorsqu'il constata que le groupe s'intéressait davantage au développement de la filiale de la construction de locaux commerciaux et de Finatech, filiale dans laquelle il a injecté 600 millions de DH. Likaimi a démissionné de son plein gré Face à ces tergiversations, Likaimi a démissionné, mais avant cela, il a contribué à établir la nouvelle stratégie de la chaîne entérinée lors du conseil d'administration tenu fin mai. Mais suite à sa démission, des rumeurs se sont répandues comme une traînée de poudre, laissant entendre que la chaîne ne réalisait pas de bénéfices. A commencer par le chiffre d'affaires qui a baissé de 50%. Il n'en est rien, la chaîne a réalisé un chiffre d'affaires de 150 millions de DH en 2008 contre 46 millions une année auparavant. La chaîne dispose actuellement de 122 magasins franchisés. Le 1/3 se porte bien et dégage des bénéfices. Le deuxième tiers va commencer à gagner de l'argent, tandis que le reste ne pourra jamais en gagner, car ses propriétaires ont d'autres chats à fouetter et ne s'occupent pas de leurs magasins. Sur les 50 magasins propres, la chaîne en a passé une vingtaine à des franchisés. Le reste a été définitivement fermé. Car Likaimi avait compris très tôt qu'un petit magasin fait vivre son propriétaire mais pas une chaîne. Il a initié une nouvelle stratégie : des superettes d'une superficie oscillant entre 400 et 600 m2. La première expérience, un magasin de 200m2 situé dans le quartier Oasis à Casablanca, est une miniature de ce que devrait être le nouveau concept. Dans la grande distribution, il faut attendre 3 à 5 ans pour établir un concept définitif. L'ancienne stratégie n'était donc pas la bonne. Il fallait rectifier le tir. Et notamment en ce qui concerne l'emplacement de certains magasins franchisés, qui ne garantissait pas une rentabilité à ses propriétaires. Aussi, le problème d'approvisionnement des franchisés posait problème. En fait, le problème réside dans la part d'approvisionnement chez les fournisseurs sans passer par la centrale d'achat de Hanouty. En outre, certains franchisés achetaient des produits de chez les fournisseurs et des produits concurrents directement de la plateforme de la chaîne. Nouveau patron, «nouvelle» stratégie Le grand obstacle qu'a bravé Likaimi est le financement de la nouvelle stratégie du groupe. Cela fait un peu plus d'un an qu'il réclame l'injection de fonds pour financer la construction et l'aménagement de superettes de 400 à 600 m2. Même aujourd'hui après sa démission, la question du financement de la stratégie demeure posée. Et c'est un ex-président directeur général de la chaîne allemande d'hypermarchés Metro, Jawad Bennis en l'occurrence, à qui on a confié le déploiement d'une stratégie pauvre. Le nouveau patron a occupé ce poste jusqu'à fin décembre 2008. Il sera retenu par les Allemands comme conseiller jusqu'à sa nomination à la tête de Hanouty Shop. Le choix de cet ex-cadre de Metro n'est pas fortuit. Bennis a conduit la stratégie Metro dans le cadre du plan Rawaj. Deux autres directeurs de Metro devraient dans les prochains jours rejoindre la filiale de distribution de Financecom pour l'épauler. A ce poste, Bennis appliquera la nouvelle stratégie de Hanouty, qui consiste à ouvrir 40 magasins de 200 à 600 m2 dans les 4 prochaines années et à piloter un plan « Rawaj » propre à l'enseigne comme celui qu'il a piloté chez Metro. Mais ce qu'on n'avoue pas, c'est que les épiciers refusent de s'approvisionner à la centrale d'achat de Hanouty. Pour la mise à niveau d'une épicerie, l'Etat contribue à hauteur de 25.000 DH (un fonds perdu), Hanouty à 20.000 DH (fonds amorti) et le reste à la charge de l'épicier. Si la chaîne injecte cet argent, c'est pour l'amortir sur 4 ou 5 ans à travers les achats qui passent par sa propre centrale. C'est un problème qui se posera dans l'avenir mais aussi un obstacle que Jawad Bennis devra dépasser pour commencer. Encore faut-il qu'il dispose de l'argent pour financer une stratégie qui n'est pas tout à fait nouvelle.