Changement culturel majeur au sein de la Douane, qui veut s'inscrire désormais dans la chaîne logistique des entreprises en devenant un levier de compétitivité. Son patron en a dressé les enjeux. Concilier la facilitation des échanges et la chaîne logistique, telle semble être la «nouvelle» casquette de la Douane marocaine. En effet, l'explosion des flux des échanges commerciaux change les règles du jeu, une croissance exacerbée par les accords de libre-échange et rend donc critique la chaîne logistique. «Pour répondre à ce défi, non seulement il faut aménager de nouvelles infrastructures, mais prévoir en face des services qui tiennent la route pour accompagner les entreprises», souligne Abdelatif Zaghnoun, directeur général de l'Administration des Douanes et des Impôts Indirects, invité le 20 mars dernier par la Chambre Française de Commerce et d'Industrie du Maroc (CFCIM) à traiter d'un sujet aussi brûlant que «La douane du 21ème siècle et sa relation avec l'entreprise». Selon lui, «en tant que maillon le plus important dans le processus du commerce extérieur, la douane s'inscrit dans cette logique faite de partenariat qui prend en charge les préoccupations de part et d'autre». En effet, le programme de catégorisation de la Douane est une des réponses à cette exigence nouvelle de partenariat avec les entreprises. Mis en place il y a un peu plus d'une année, ce dispositif concerne les entreprises qui, sur la base d'un score, bénéficient d'un traitement spécial. Aujourd'hui, il y a près de 155 entreprises qui bénéficient de ce statut sur la base d'un référentiel élaboré en concertation avec les professionnels notamment l'AMITH (Association Marocaine des Industries du Textile et de l'Habillement) et la CGEM, et d'audits réalisés par des cabinets de conseil indépendants. « Le système fonctionne bien et nous avons plus de 320 nouvelles entreprises qui demandent à en bénéficier », précise le patron de la Douane. Au bas mot, ce dispositif consiste à concéder une palette de facilités aux opérateurs, qui auront rempli une batterie de critères draconiens. En contrepartie, elles bénéficient de certains avantages comme le dédouanement à domicile, ce qui leur permet de gagner du temps et donc en compétitivité. Très important aussi :une entreprise catégorisée n'a plus besoin de présenter de cautions bancaires, sa simple caution morale suffit. C'est un dispositif basé sur la confiance avant tout. Pour preuve, ces entreprises ne sont pas contrôlées sauf quand il s'agit de contrôles aléatoires décidés par le système. C'est dire si les missions de la Douane ont amorcé un certain glissement pour s'intégrer dans la chaîne logistique des entreprises. Les entreprises deviennent des clientes à part entière dans cette nouvelle configuration. Une révision des fonctions de la Douane Cette évolution entraîne également une révision des fonctions de la Douane. Si sa mission financière est encore importante, la Douane marocaine s'est focalisée ces dernières années sur la lutte contre la concurrence déloyale. «La douane est appelée à aider les entreprises à se conformer aux standards internationaux pour mieux les insérer dans le commerce mondial. Ceci passe par le renforcement des techniques de contrôle, surtout en ces temps de crise où la tendance à la fraude augmente», affirme Zaghnoun. L'objectif recherché par cette décision est de contrecarrer les pratiques illicites qui peuvent porter préjudice aux entreprises sérieuses et favoriser une concurrence déloyale. «Les accords de libre-échange sont adossés à des normes, dont les règles d'origine qu'il y a lieu de respecter. C'est une mission qui devient importante parce que nous constatons une tendance à la fraude au niveau de l'origine des produits de la part de certains importateurs malhonnêtes qui essaient de bénéficier de certains avantages préférentiels», dit-il. Pour le patron des Douanes, toutes ces évolutions imposent aussi bien pour la douane que pour l'entreprise un certain nombre d'exigences et de défis qu'il y a lieu de relever. D'une part, la douane est appelée à contribuer à l'amélioration de la collecte des recettes douanières, qui représentent aujourd'hui 37% des recettes totales de l'Etat. D'autre part, elle doit également continuer à assurer cet équilibre entre la facilitation et la sécurisation. «Ce sont deux facettes d'une même médaille», lance-t-il.