Hier mardi, Abdelilah Benkirane était devant les parlementaires. Pour une fois, il n'y a pas eu de clash, l'exercice démocratique a pu se passer dans les règles de l'art, même si la présence n'était pas massive, les rangs clairsemés en disent long sur l'engagement des élus. Cependant, il y a plus grave. La première question concernait le système financier. Les groupes parlementaires, dans leurs interventions, mélangeaient système financier et finances publiques de manière réellement ridicule. Abdelilah Benkirane a raison de dire que nous disposons d'un système financier qui tient la route. En dehors de l'Afrique du Sud, le Maroc a les meilleurs ratios sur le continent noir. Cependant, il y a un problème de financement de l'économie. En dix ans, l'encours des prêts à l'immobilier a été multiplié par 7, passant de 30 milliards de dirhams à 210 milliards. Face à l'illiquidité permanente du marché, cela signifie moins de ressources pour les autres secteurs et ce, de manière automatique. L'accès au crédit est très difficile pour les PME. C'est une réalité récurrente, dont on ne peut accuser Benkirane d'être la cause. La seule chose que peut développer l'exécutif, c'est un système de garantie pour les PME. Parce que si le système bancaire tient, c'est aussi parce que la gestion du risque est prudente. L'autre question posée est celle de la lutte contre la corruption. Le Chef du gouvernement a reconnu que la tâche était difficile et qu'elle requiert l'engagement de tous. C'est pour la première fois que ces séances de questions au Chef du gouvernement se passent dans le calme et le respect. On ose espérer que cela va continuer. Mais il faut bien se rendre compte que la qualité du personnel politique fait défaut. Dès qu'il s'agit de parler chiffres, de discuter de dossiers techniques c'est la débandade. Les partis politiques doivent devenir plus attractifs pour les profils pointus et surtout proposer des modules de formation à leurs militants et cadres. Le populisme ambiant interdit la réflexion sur les moyens humains, les compétences à mettre au service des groupes parlementaires. Pourtant, si l'on veut bâtir une démocratie vivante, il faut doter la représentation nationale d'expertise. Sinon, le gouvernement grâce à l'administration aura toujours le dernier mot, sur les dossiers techniques.