Cinq sociétés existantes et deux consortiums nouvellement créés sont désormais chargés de redorer le blason de l'artisanat marocain sur l'international en attendant d'autres entrants. D'ici cinq ans, ces sept acteurs de référence s'engagent à réaliser un chiffre d'affaires cumulé de l'ordre de 2,4 milliards de dirhams. Jamais dans la politique économique nationale, un secteur d'activité n'a été jalonné de stratégies comme celui de l'artisanat. Seulement, jusque-là, pas un seul plan n'a vraiment réussi à faire décoller le secteur de l'artisanat. Mais depuis le 20 février 2007, une stratégie nationale de relance à travers un contrat programme mobilisant les acteurs publics et privés a été formalisée. Celle-ci tient à rompre avec le passé. La nouveauté réside dans le fait qu'elle vise à aider à l'émergence et au développement d'un tissu d'acteurs-producteurs de référence, mais aussi à développer le chiffre d'affaires des artisans individuels (urbains et ruraux). «Jusque-là, nous avions une approche d'accompagnement non adossée à une politique de croissance. Aujourd'hui, il est plutôt question de contrats de croissance avec des locomotives», souligne Adil Douiri, ministre du Tourisme et de l'Artisanat en charge de ce département depuis bientôt plus de deux ans. Quoi qu'il en soit, le constat est aujourd'hui frappant : parti avec une longueur d'avance, l'artisanat marocain n'a pas su se créer une marge forte sur le marché international ni suivre les tendances de ce marché. C'est pourquoi il s'agit actuellement de créer des acteurs nouveaux ou de faire grandir certains acteurs-producteurs qui seront capables de produire en volume et en qualité suffisante. Pour réaliser cet objectif au plus vite, et après l'identification à la fois des produits les plus demandés par les segments de clientèle concernés et des acteurs à même de fournir en volumes élevés et en qualité, la priorité consiste à focaliser d'abord sur certains réseaux de distribution. Dans ce sens, sept futures locomotives de l'artisanat en mesure de répondre à la demande des réseaux de distribution ont été sélectionnées par voie d'appel à manifestation d'intérêt. Lancé en juin 2006, celui-ci a donné lieu à la présélection, en novembre 2006, de 14 candidats (parmi 31 dossiers étudiés) qui ont été invités à participer à la phase de sélection finale qui a eu lieu en avril dernier. Au terme de l'évaluation des dossiers de soumission à cette sélection, sept candidats (voir encadré) ont été présélectionnés : cinq sociétés existantes (Diversam Comaral, Maison Méditerranéenne, Majka, Mocary et Meublatiss) et deux nouvelles sociétés dédiées à l'artisanat (le consortium Maroc Souvenirs & My Artisanales et le consortium Dolidol & Layalits). À en croire un membre de la Commission mixte de notation qui a participé au processus de sélection de ces acteurs de référence, «la sélection s'est faite en fonction notamment de la solidité financière de l'entreprise, de sa taille, de la qualité de son management, et surtout de son orientation vers l'export…». Ainsi depuis leur sélection en avril dernier, l'Etat a entamé avec chacune des 7 entreprises des discussions afin d'affiner leur plan de développement. Ce 13 juin 2007, le partenariat fut ensuite formalisé par la signature d'un contrat dénommé «Contrat de Croissance» entre chaque acteur et l'Etat. Il précise les engagements de chaque signataire (obligations de résultats chiffrés pour les opérateurs sélectionnés/soutien à la production et à la commercialisation pour l'Etat à travers des campagnes de marketing et de promotion). Globalement, les sept acteurs de référence s'engagent à réaliser, sur cinq ans, un chiffre d'affaires cumulé de l'ordre de 2,4 milliards de dirhams (273 millions de dirhams dès la première année) dont les trois quarts à l'export (194 millions de dirhams dès la première année). L'investissement cumulé des 7 entreprises en infrastructures de production s'élèvera à environ 80 millions de dirhams. Quant à la création d'emplois, elle contribuera également à hauteur de 2.800 postes sur les cinq ans à venir. «Un comité de suivi composé du public et du privé a été mis en place pour veiller à tous les engagements pris aussi bien par les acteurs de référence que par l'Etat. Il se réunira une fois tous les deux mois», rassure Ghalia Sebti, présidente de la Fédération des entreprises d'artisanat. Aujourd'hui, l'objectif de ces contrats est d'assurer des débouchés de vente pour les produits, et de permettre d'adapter le produit marocain aux goûts et tendances de la clientèle surtout internationale. Deux filières porteuses ont été arrêtées pour la phase de démarrage : la décoration et l'ameublement en raison de leur potentiel de croissance et de la présence d'acteurs structurés dans ces filières. Mais d'autres appels d'offres pour la sélection de nouvelles «entreprises championnes» seront lancés prochainement. À l'horizon 2015, le nombre d'opérateurs devrait atteindre 15 à 20 acteurs de références. En effet, ces acteurs seront à même de maîtriser l'ensemble de la chaîne de valeur (design, processus de production, commercialisation), pouvant répondre aux exigences des marchés de l'export. Ils constitueront des modèles et devraient faire bénéficier les autres PME du secteur et les artisans individuels de leur dynamique, à travers notamment le recours à la sous-traitance.