Globalisation des services et compétitivité obligent, l'offre offshoring du Maroc se devait de rester en pointe. Etat des lieux avec un expert du secteur. Challenge Hebdo : que pensez-vous du positionnement actuel du Maroc dans les métiers de l'offshoring ? Naoufal El Heziti : d'abord, je crois que l'ambition du Maroc d'avoir une position de leader en matière de nearshoring francophone et hispanophone est sur le chemin de la concrétisation. En effet, plusieurs sociétés ont fait confiance au Maroc et se sont installées avant même le démarrage de CasaNearShore et de Rabat Technopolis. Ce constat étant fait, nous pouvons affirmer aujourd'hui que le Maroc a fait le bon choix au bon moment. Toutefois, il y a une autre réalité incontestable mais que nous discutons rarement : c'est que cette stratégie répond aussi à une demande cruciale des sociétés francophones et hispanophones qui n'ont pas, dans un contexte international de plus en plus compétitif, d'autre choix que d'externaliser leurs processus métiers vers des pays où elles peuvent produire à des coûts réduits. Il s'agit donc à mon sens d'une opération win win où les deux partenaires trouveront leur compte, et non pas d'une simple offre du Maroc afin de développer une niche déterminée. C. H. : le Plan Emergence a prévu des mesures incitatives pour le secteur, que pouvez-vous nous en dire ? N. E. : les mesures incitatives de l'offre offshoring Maroc sont certes compétitives : citons à titre indicatif la réduction de l'impôt sur le revenu, la contribution aux frais de formation, la mise en place de sites dédiés… Toutefois, les procédures de mise en place de cette série d'avantages doivent être clarifiées : au niveau de la réduction de l'impôt sur le revenu, la limitation de la charge fiscale à 20% de la masse salariale a entraîné des difficultés d'interprétation de la base de calcul du plafond de 20% (revenu brut ou revenu net imposable ?). En ce qui concerne la formation, le système de remboursement n'est pas encore clair (intervenants, délais de remboursement, etc). À cela s'ajoute l'exonération de la TVA sur les acquisitions d'immobilisations, limitée par la loi de finance pour l'année 2006 à 24 mois suivant la création de la société. A mon sens, le gouvernement est vivement appelé à accélérer la mise en place des procédures permettant de bénéficier de ces avantages, en dehors de toutes contraintes d'ordre réglementaire. C. H. : l'Inde est désormais reconnue comme intervenant majeur dans les métiers de l'offshoring, le Maroc pourrait-il suivre la même voie ? N. E. : il ne faut pas se tromper lors de cette comparaison. A mon sens, le rapprochement entre le Maroc et l'Inde est stérile, du moins pour le moment, et cela, pour deux raisons essentielles. D'abord, l'Inde a lancé sa stratégie d'offshoring et de développement des métiers : TMA, Call Center et BPO dans les années 90 et même bien avant; elle devance donc le Maroc d'environ deux décennies, avec aujourd'hui un effet de capitalisation très important. Deuxièmement, l'Inde s'est positionnée sur le marché anglo-saxon qui reste beaucoup plus large que le marché francophone. C. H. : quels critères à votre avis feront pencher la balance en faveur du Maroc pour les métiers liés à l'offshoring ? N. E. : on peut les résumer en deux mots «qualité» et «productivité» : les clients qui choisissent le Maroc comme destination sont fortement demandeurs de qualité et de productivité (et je crois que c'est leur droit !). Je reste aussi convaincu que c'est une affaire de tous les intervenants. Certaines multinationales ont déjà commencé à mettre en place des process en vue d'assurer à leurs clients un niveau élevé de productivité et de qualité. A titre d'exemple, chez la société Logica Maroc, l'année 2007 a été marquée par deux événements majeurs : la mise en place des process d'industrialisation, ce qui s'est traduit par l'obtention du certificat CMMI 3 et le démarrage de l'Université Logica Maroc, dont l'objectif est d'assurer le suivi des ingénieurs dans leur plan de formation, en matière technique et managériale.