La réforme du cadre légal et institutionnel des partenariats public-privé (PPP) est sur de bons rails. Le projet de loi 46-18 relatif aux PPP a été adopté à l'unanimité en commission fin décembre à la Chambre des Représentants. Il vise à redonner une nouvelle dynamique aux PPP dans le Royaume. Interview avec Xavier Reille, directeur de l'IFC pour le Maghreb. Challenge : La nouvelle loi sur les PPP devrait voir le jour dans les prochains mois. Sachant que le Maroc a déjà mené plusieurs grands projets réussis en mode PPP, quelle lecture faites-vous de ce nouveau cadre légal qui devrait entrer en vigueur avec la nouvelle loi? Xavier Reille : Ce nouveau cadre légal est une avancée décisive dans la mise en place des Partenariats Public/Privé (PPP), qui sont, rappelons-le, un outil impactant permettant à la fois de garantir une gestion saine des finances publiques (facilitant l'atteinte de l'objectif fixé par la loi de Finances de 3.5% de déficit budgétaire en 2020) et d'assurer aux citoyens un niveau de services publics de qualité. Cette réforme est une avancée, car elle prévoit d'adresser deux points qui étaient jusqu'à présent des défis majeurs dans la mise en place des PPP, à savoir l'absence des Collectivités Territoriales des commanditaires de PPP, l'absence d'un schéma de gouvernance et de coordination clair facilitant la planification des projets de PPP, le pilotage de la mise en œuvre et la prise de décision. Elle les adresse via, à la fois, l'inclusion des collectivités territoriales dans la mise en place des PPP, et la création d'une commission nationale du partenariat public privé chargée d'arrêter les orientations générales et la stratégie nationale en matière de partenariat public/privé. Ce faisant, cette loi ouvre de nouvelles possibilités à l'échelle nationale mais également territoriale et permettra au Maroc d'être, à l'instar d'autres pays en voie de développement, un leader dans le développement de services publics de qualité dans des secteurs clés tels que les transports, l'Energie, et les grands projets d'infrastructure y compris pour le dessalement et la gestion des déchets. Néanmoins, bien que la loi soit une étape nécessaire, la mise en place réussie des PPP passera par le renforcement des capacités nationales dans l'identification, structuration et exécution des projets de PPP. IFC est, à ce titre, la seule Institution Financière de Développement à détenir une expertise interne de conseil en PPP avec à son actif la structuration de plus de 250 projets y compris au Maroc avec le projet d'adduction et de distribution d'eau d'irrigation de Guerdane. Comment IFC, fervente défenseure des PPP, aide le gouvernement marocain dans la structuration et la mise en place de cette nouvelle loi qui vise à permettre au Maroc de capturer davantage d'investissements privés ? IFC accompagne depuis plus de 30 ans les gouvernements à l'identification, structuration et mise en place des PPP à travers une offre de conseil intégrée et adaptée aux besoins de chaque partenaire public. IFC intervient dans divers secteurs des infrastructures, mais aussi des secteurs sociaux qui contribuent à la fois à l'optimisation des finances publiques et la qualité des services publics. A titre d'exemple, le projet de l'aéroport Queen Alya a permis de générer plus de 250 millions de dollars par an pour le gouvernement de Jordanie et de mieux desservir le pays, avec donc des retombées sociales et économiques pour les citoyens. Au Maroc, IFC accompagne étroitement les autorités publiques et les appuie dans l'appropriation du projet de loi. IFC a ainsi organisé et animé, conjointement avec la Banque Mondiale et en partenariat avec le ministère de l'Economie et des Finances, plusieurs ateliers pour partager son expérience dans le domaine des PPP. D'autres sessions de formation sont prévues dans les prochains mois avec différents acteurs nationaux et territoriaux. Le Maroc réfléchit actuellement à la mise en place d'un nouveau modèle de développement. Cette nouvelle loi sur les PPP peut-elle être un catalyseur dans la nouvelle dynamique de développement du Royaume ? Cette nouvelle loi est capitale dans la mise en place d'un nouveau modèle de développement, car elle permet de financer des grands projets d'infrastructures trop coûteux à l'heure actuelle pour l'Etat marocain. Je rappelle, à ce propos, que le Maroc aura besoin de 8 à 14 % de son PIB pour satisfaire ses besoins en infrastructures. A condition qu'ils soient bien identifiés, structurés et mis en place, ces projets d'infrastructures peuvent permettre de réduire les inégalités régionales mais également sociales, et ce, à travers un accès au marché de l'emploi plus facile et des services publics de qualité, y compris pour les citoyens les plus vulnérables. Le partenariat public/privé peut aussi garantir une croissance économique plus stable et pérenne grâce à une meilleure attractivité des investissements internationaux dans des secteurs productifs clés, et maintenir une gestion financière saine des comptes publics tout en assurant des services publics de qualité.