Ce sont aujourd'hui un peu moins d'une trentaine d'entreprises qui composent la filière de l'électronique au Maroc. Le premier objectif visé par la nouvelle stratégie, en cours de finalisation, sera de multiplier ce chiffre par quatre pour atteindre une centaine d'entreprises. Cette évolution devrait en générer une autre touchant cette fois-ci à l'emploi. Pas moins de 40.000 nouveaux emplois devront être créés rejoignant ainsi les 10.000 déjà existants. Bientôt, l'électronique aura sa propre offre taillée pour répondre aux exigences d'un marché international en quête de structures de production délocalisées. Il s'affichera ainsi fièrement aux côtés de filières comme l'offshoring ou encore l'aéronautique pour ne citer que celles-là. Ce n'est en effet l'affaire que de quelques mois, le temps d'opérer quelques retouches à la présente feuille pour que ladite offre voie le jour. La date prévue de finalisation de ce projet pour aboutir à la copie finale de l'offre électronique a été fixée à l'été 2008. Le temps aussi pour le tout nouveau gouvernement de s'installer et pour Ahmed Chami, successeur de Salah Eddine Mezouar au poste de ministre du Commerce et de l'Industrie, de se familiariser avec ses nouvelles prérogatives et de prendre le recul nécessaire pour arbitrer les dossiers en cours. Un Chami dont la nomination est vue d'un bon œil par les professionnels du secteur puisqu'il «vient du monde l'entreprise et comprendra donc la logique de cette dernière», comme le déclare spontanément le directeur général d'une multinationale spécialisée dans les semi-conducteurs. Mais quelle que soit la position de Chami, les «réglages» qu'il pourra apporter ne seront pas majeurs car la stratégie Emergence est déjà tracée et la logique qui a servi pour tracer la voie des autres filières visées par le plan McKinsey devrait être adoptée pour l'électronique. Une idée soutenue d'ailleurs par la Fenelec (Fédération Nationale de l'Electricité et de l'Electronique). Selon son président Salaheddine Kadmiri, «on ne va pas s'éloigner de ce qui s'est fait dans les autres secteurs dans la mesure où le socle est le même pour toute la sous-traitance industrielle». Référence faite entre autres aux avantages fiscaux (une exonération totale de l'IS durant les cinq premières années et de 50% au-delà, un IGR plafonné à 20%, une prise en charge des charges de la formation…). Mais en quoi consiste cette offre dont les contours sont aujourd'hui en cours de polissage au ministère du Commerce et de l'Industrie ? «Elle part d'une question simple : que peut offrir le Maroc qui puisse répondre aux besoins précis du marché international et qui tienne compte aussi bien de ses atouts que de ses capacités réelles?», souligne Salaheddine Kadmiri. C'est dire que l'offre doit être raisonnable et non bâtie sur des rêves ou des spéculations trop optimistes. Les atouts du Maroc Un des éléments clés sur lesquels se base le Maroc pour se vendre en Europe est sa proximité géographique avec le vieux continent. Mais là n'est pas le seul marché que le Maroc compte attaquer. Les Etats-Unis ne sont pas écartés de son champ d'action. D'ailleurs, l'offre électronique entend profiter de toutes les opportunités que comportent les accords de libre-échange, qu'ils aient été conclus avec l'Union européenne ou avec le pays de l'oncle Sam. En outre, les entreprises américaines sont d'ores et déjà en pourparlers avec des partenaires potentiels marocains pour se lancer dans des niches très pointues comme la nanoélectronique. Des contacts qui sont à un stade trop embryonnaire pour qu'il s'en dégage des idées d'associations claires dans l'immédiat. Une chose est pourtant sûre. Le Maroc est bien placé pour se positionner dans les petites et moyennes séries, par opposition par exemple aux pays de l'Asie qui ont une position dominante dans les grandes séries. Est-ce à considérer cela comme un point de faiblesse ? «Etre spécialisé dans les petites séries n'est pas péjoratif. Cela correspond tout simplement aux spécificités du Maroc et présente un marché accessible à notre capital et à nos capacités de production», précise le président de la Fenelec, par ailleurs PDG de la société Schiele Maroc. 50.000 emplois ciblés Aujourd'hui, ce sont un peu moins d'une trentaine d'entreprises seulement qui composent la filière de l'électronique au Maroc. Le premier objectif est ainsi clairement déclaré : multiplier ce chiffre par quatre pour atteindre une centaine d'entreprises. Cette évolution devrait en générer une autre touchant cette fois-ci à l'emploi. Ce sont en effet pas moins de 40.000 nouveaux postes de travail qui devront être créés, rejoignant ainsi les 10.000 déjà existants. Le volume des exportations, lui, dépendra de la configuration qu'épousera le secteur dans l'avenir. «La course aux volumes ne doit pas nous obséder. L'objectif est d'aller vers la création de valeur ajoutée et non pas de se focaliser sur la sous-traitance pure et simple», dixit Salaheddine Kadmiri. Autrement dit, en plus de l'exécution, les entreprises marocaines doivent être capables de désengager les donneurs d'ordres étrangers de certaines tâches qui les empêchent de se concentrer sur la recherche et le développement. Il s'agit, par exemple, des fonctions achats et logistiques. Les plateformes que l'offre en préparation doit permettre de mettre en place répondront particulièrement à ce besoin. La première dans le genre n'est autre que le cluster électronique de Mohammédia. Visant à valoriser la prestation de sous-traitance, cette nouvelle plateforme sera aménagée par Med-Z, filiale du groupe CDG (Caisse de Dépôt et de Gestion). Elle devra accueillir les nouveaux arrivants dans le secteur dans des conditions proprement adaptées au secteur de l'électronique et permettra de concurrencer (enfin!) la Tunisie qui attire les gros capitaines de l'industrie électronique désireux de sous-traiter dans la région maghrébine. Cependant, pour ne pas perdre de son attrait, la nouvelle offre sera perfectible. Elle devrait faire l'objet de réajustements en fonction des changements au niveau des marchés émetteurs et des avantages nouveaux que pourront accorder les concurrents et ce, sur la base de benchmarks actualisés en permanence. En un mot, faire le guet pour ne pas se déclasser par rapport à ses rivaux. Multinationales : un cas à part ? Alors que le Maroc prépare son offre électronique, le redéploiement de certaines multinationales donne matière à réfléchir, voir à s'inquiéter. Certes, d'un côté, de grands investissements ont été opérés par des multinationales comme Alcatel, Thalès…, mais d'un autre côté, un vent de désengagement n'a pas épargné le Maroc, initié par des opérateurs du calibre de ST Microelectronics. «Les multinationales sont des cas à prendre à part. Leurs stratégies sont strictement dépendantes de leurs maisons mères, des marchés finaux qu'elles ciblent et des redéploiements de ces mêmes marchés», souligne un professionnel, ajoutant qu'«il ne faut pas analyser leur désengagement comme un signal ou un préambule de quelque nature que ce soit. De par leur nature, elles sont autonomes et leurs investissements sont relativement volatiles, contrairement aux PME qui, elles, feront la force du secteur à moyen et long termes».