Nabil Benabdellah et ses camarades doivent trancher : le PPS peut-il rester dans le gouvernement après l'éviction de Charafat Afilal ? Dès le lendemain de la décision du Conseil des ministres d'enlever le secrétariat d'Etat chargé de l'Eau, le secrétaire général du PPS disait « Saâdeddine El Otmani n'a même pas eu la politesse de m'informer et là, je ne peux plus convaincre les camarades, qu'est-ce que je vais leur dire ? ». Pourtant Nabil Benabdellah, alors qu'il a été lui-même limogé, ainsi que son camarade El Ouardi à qui les marocains reconnaissent la baisse des prix du médicament, a tenu bon. Le PPS est resté au gouvernement refusant de créer une crise politique. Saâd Eddine El Othmani a attisé le feu en assumant seul l'éviction de Charafat Afilal et son non-remplacement. C'est maintenant une crise entre le PJD et le PPS. Ce qui n'était qu'un problème d'entente entre un ministre et une secrétaire d'Etat, est devenu un problème politique majeur. Les conflits sur le champ des compétences ont existé de tous temps. Lors du premier gouvernement Youssoufi, la guerre entre Lahlimi et Ben Atik, pourtant issus du même parti était de notoriété publique. Mais là, la solution choisie est radicale. On a supprimé le secrétariat d'Etat à l'eau, privant le PPS d'un portefeuille au passage. Il ne faut pas croire, cependant, que c'est une bataille de boutiquiers et que le PPS est vent debout pour récupérer un strapontin, un secrétariat d'Etat. Brel chantait « on fait ce qu'on peut, mais il y a la manière » et le Chef du Gouvernement n'a vraiment pas respecté le PPS. Nabil Benabdellah, et nombre de ses amis le lui ont reproché, a fait le choix stratégique de s'allier au PJD en 2012. Abdelilah Benkirane respectant ce choix traitait le PPS, au-delà de son poids électoral, en allié sûr. Lors de la fameuse et funeste séquence du blocage, l'alliance a tenu bon, malgré les enjeux. Lors de l'épisode de ce que l'on a appelé le séisme politique, tous les cadors du PJD ont rappelé leur attachement à la présence du PPS au sein de la coalition. Ils ont expressément demandé à la direction du PPS de contenir les bases et de rester, ce qui a été fait, mais difficilement. Cette fois, les militants du PPS se sentent humiliés et c'est leur allié qui assume la décision. Cela change le paradigme et pose de manière crue la question du retrait de l'alliance. Le PPS se sent visé depuis des années par une sorte de vendetta contre ses choix de 2012. C'est un sentiment ancré chez ce parti qui dit se battre pour son autonomie, mais là c'est le Chef du Gouvernement, son allié, qui porte l'estocade. Mais la décision n'est pas facile. Aller dans l'opposition pourquoi faire ? Le PPS a une présence peu significative au Parlement et devra chercher des alliances pour exister. On ne voit pas clairement lesquelles sont possibles. Plus globalement si le PPS ferme cette séquence, il ne peut le faire qu'en redéfinissant un projet politique. Il y a un boulevard ouvert, celui de la défense de la démocratie, de l'autonomie des partis, de la séparation des sphères. Le PPS peut prendre la tête d'un mouvement qui existe dans la société, qui porte de plus en plus bruyamment ces revendications et qui n'a pas de cadre représentatif institutionnel politiquement. Mais il faut construire une crédibilité là-dessus et surtout être prêt à affronter, frontalement, ceux qui lui ont fait payer son choix de 2012. Le PPS choisira-t-il cette voie ? Challengenews Le meilleur de la rédaction sélectionné par Challenge :