L'ancien chef du gouvernement marocain Saad Dine El Otmani (2017-2021) a défendu la décision de signer l'accord tripartite de 2020 avec Israël et les Etats-Unis. Lors d'une interview accordée à des médias locaux, M. El Otmani, ancienne figure de proue du Parti de la justice et du développement (PJD), a reconnu le caractère important de cette alliance conclue en décembre 2020 sous l'égide des Etats-Unis. «Cette décision est celle d'un Etat qui pèse soigneusement ses orientations stratégiques», a-t-il déclaré. L'accord, acté sous l'administration de Donald Trump (2017-2021), a permis la reprise des relations entre le Maroc et Israël et, surtout, la reconnaissance par les Etats-Unis de la souveraineté marocaine sur le Sahara. Cet accord a engendré un coût politique élevé pour le PJD, dont l'électorat a perçu cette décision comme un «reniement» des principes fondamentaux du parti. La signature du texte a marqué un tournant pour la formation islamiste, qui, après une décennie mitigée au pouvoir, a subi une défaite électorale écrasante en 2021, passant de 125 sièges à seulement 13 au Parlement. M. El Otmani a alors démissionné de ses fonctions de secrétaire général, laissant la place à Abdel-ilah Benkiran, qui n'a jamais contesté ouvertement l'accord du point de vue officiel. Aujourd'hui, psychiatre à Rabat et relativement en retrait de la politique active, M. El Otmani défend néanmoins les résultats du texte de 2020 sur le plan diplomatique. «La reconnaissance américaine a été déterminante pour encourager d'autres Etats occidentaux à soutenir la position marocaine sur le Sahara», a-t-il affirmé. Il estime que le Maroc autorise toutes les voix à s'exprimer : «Nous sommes le seul Etat musulman où les manifestations contre Israël n'ont pas cessé depuis le début [de la guerre à Gaza]», a-t-il assuré. Il a également souligné que «le nombre d'arrestations reste très faible en comparaison au volume des protestations.» Une décision longtemps mûrie La reprise des relations avec Israël s'inscrit dans une stratégie diplomatique mûrement réfléchie destinée à entériner définitivement la souveraineté territoriale du Maroc sur le Sahara et soutenir les autorités palestiniennes, deux priorités absolues. En obtenant une reconnaissance officielle de la part des Etats-Unis, Rabat a consolidé sa position sur la scène internationale, créant un précédent diplomatique qui a permis à d'autres puissances occidentales, notamment l'Allemagne, l'Espagne et la France, à revoir leurs positions sur ce dossier. Cet accord a également permis d'accroître le poids des revendications marocaines dans des enceintes internationales, tout en neutralisant, efficacement, les efforts du Front Polisario soutenu par l'Algérie. De surcroît, le Maroc a su préserver sa souveraineté décisionnelle, en assurant que cette reprise des liens avec Tel-Aviv ne compromettra ni son rôle historique de défense de la cause palestinienne ni son soutien à la solution à deux Etats. Cette approche pragmatique témoigne d'une gestion habile des équilibres géopolitiques dans un contexte régional instable.