Le procureur général près la cour d'appel de Fès a ordonné l'ouverture d'une enquête à la suite d'une plainte déposée par Saïd Zniber, wali de la région de Drâa-Tafilalet, à l'encontre d'El Habib Choubani, ancien ministre, membre influent du Parti de la justice et du développement (PJD) et président du conseil régional de Drâa-Tafilalet entre 2015 et 2021. Ce dernier fait l'objet de graves accusations de détournement de fonds publics et de gestion frauduleuse des finances régionales, remontant à la période où il présidait la région. L'enquête, qui a été confiée à la brigade régionale de la police judiciaire de Fès, constitue la deuxième investigation de ce genre à l'encontre de Choubani, après une première enquête menée il y a quelques années, déjà centrée sur des accusations similaires concernant sa gestion de la région. La plainte repose sur un rapport circonstancié rédigé par l'Inspection générale de l'administration territoriale, relevant du ministère de l'intérieur. Ce rapport a été transmis au parquet de Fès il y a une semaine, et c'est désormais la brigade compétente qui a pour mission de mener les enquêtes nécessaires. Accusations de gestion irrégulière et de mauvaise administration des fonds publics Les accusations qui pèsent sur l'ex-président du Conseil régional sont multiples et portent notamment sur des dépenses jugées irrégulières, telles que des frais de restauration et de transport scolaire excessifs, des marchés publics douteux ainsi que des malversations concernant une affaire de dattes destinées à des institutions sociales locales, mais déclarées impropres à la consommation. L'affaire a alimenté de vives polémiques dans les médias locaux, lesquels ont mis en lumière l'utilisation de fonds publics pour financer des activités partisanes, familiales et personnelles. Parmi les accusations les plus graves figurent l'assignation de fonds publics pour le financement de voyages personnels à l'étranger, notamment au Qatar, en Turquie et à Tokyo. De plus, l'ancien président du Conseil régional aurait perçu un total de 2,7 millions de dirhams en indemnités sur une période de cinq ans, dont 15 000 dirhams mensuels spécifiquement alloués à son logement. L'utilisation de ces fonds a soulevé des questions sur la transparence des finances publiques et sur le respect des procédures administratives. Problèmes de gouvernance et de transparence dans les marchés publics Par ailleurs, l'opposition a soulevé de graves irrégularités concernant un marché public d'acquisition de 150 véhicules de transport scolaire, d'une valeur totale estimée à 60 millions de dirhams. Bien que ce projet ait été approuvé par le Conseil régional, des accusations de contournement des procédures administratives ont émergé. L'opposition a dénoncé l'absence d'un appel d'offres pour ce marché, et a affirmé que Choubani avait procédé à l'achat des véhicules en dehors des règles de la mise en concurrence, ce qui aurait permis de favoriser certains fournisseurs sans respect des principes de transparence et d'équité. Les dépenses publiques en matière d'hébergement et de restauration ont également été pointées du doigt, les groupes d'opposition dénonçant des frais considérables – évalués à cinq millions de dirhams – versés à divers établissements hôteliers sans justification adéquate des services rendus. Parmi ces dépenses, certaines auraient été allouées à des hôtels situés à Meknès et à Safi, sans explication claire sur les raisons de ces choix et leur légitimité. Absence de planification régionale et priorités partisanes Un autre point de friction concerne l'absence de planification régionale cohérente et de programme de développement structuré. L'opposition a accusé Habib Choubani et son équipe de privilégier des intérêts partisans au détriment de la mise en œuvre de politiques de développement véritablement au service des citoyens de la région. Ce constat d'absence de vision stratégique s'est trouvé amplifié par des accusations selon lesquelles les projets royaux, notamment ceux visant à réduire les disparités territoriales, auraient été instrumentalisés à des fins personnelles et partisanes, détournant ainsi des fonds colossaux destinés à des projets d'envergure régionale. Dans ce contexte, une conférence de presse a été organisée à Errachidia par les groupes d'opposition afin de dénoncer ces dysfonctionnements financiers et administratifs, et d'exiger des comptes sur la gestion des fonds publics durant la présidence de Choubani. Enquête judiciaire tentaculaire à rebondissements Les autorités judiciaires, prenant la mesure de la gravité des accusations et de les retombées potentielles de ces révélations sur la gestion des finances publiques, ont ouvert une enquête approfondie. Cette enquête pourrait donner lieu à de nouvelles poursuites judiciaires et à des sanctions si les faits dénoncés sont avérés. Le développement de cette affaire reste suivi de près par l'opinion publique et les observateurs, qui attendent les conclusions de l'enquête et les décisions des autorités compétentes sur cette affaire qui pourrait avoir des répercussions politiques et administratives considérables.