Le bilan de Younes Sekkouri, ministre de l'inclusion économique, de la petite entreprise, de l'emploi et des compétences au Maroc, est examiné de près alors que le gouvernement dirigé par Aziz Akhannouch entame la seconde moitié de son mandat. Le ministre «se trouve confronté à deux défis de taille : la lutte contre le chômage, dont les chiffres actuels sont les plus alarmants depuis vingt ans, et la réforme du droit de grève, un chantier qui stagne depuis plusieurs années», note en substance le magazine Jeune Afrique. Le taux de chômage s'élève à 13,1 %, un chiffre particulièrement préoccupant qui n'a pas été observé depuis deux décennies. Ce phénomène «touche en particulier les femmes, qui ne représentent qu'un cinquième de la population active, leur taux d'emploi étant 50 % inférieur à celui des hommes», a-t-on indiqué. L'économie marocaine, malgré des investissements massifs dans l'industrie automobile et aéronautique, peine à créer suffisamment d'emplois. En 2023, l'industrie, pourtant perçue comme un moteur de croissance, «n'a généré que 7 000 nouveaux postes, artisanat compris.» Cette faiblesse est attribuée à une trop grande focalisation sur des secteurs spécifiques au détriment de secteurs à forte valeur ajoutée. La crise de l'emploi au Maroc s'accompagne de la précarité des jeunes, en particulier les NEET (jeunes ni en emploi, ni en éducation, ni en formation), qui représentent 1,5 million de personnes âgées de 15 à 24 ans. Cette situation, rappelle la publication panafricaine, a été dénoncée dès le printemps 2023 par le Conseil économique, social et environnemental (CESE), alors même que le gouvernement avait promis la création d'un million d'emplois durant la campagne électorale de 2021. Or, chaque année, 210 000 personnes arrivent sur le marché du travail, «tandis que l'économie ne crée en moyenne que 70 000 emplois annuellement», laissant deux tiers des nouveaux demandeurs d'emploi sans perspective. Sekkouri fragilisé La situation est aggravée par la baisse de l'emploi dans le secteur agricole, frappé par une sécheresse prolongée qui a conduit à la perte de 157 000 emplois en 2023, essentiellement en milieu rural. Dans ce contexte de crise, les efforts de Younes Sekkouri pour relancer l'emploi et répondre aux attentes sociales se révèlent insuffisants, a-t-on dévoilé. En parallèle, la réforme du droit de grève, un autre projet phare du ministre, est dans l'impasse. Bien que ce droit soit inscrit dans la Constitution de 1962, il manque encore un cadre législatif précis. Une tentative de réforme avait été entreprise en 2016 sous le gouvernement d'Abdel-ilah Benkiran, mais l'opposition des centrales syndicales avait mis un terme au projet. Depuis 2022, Younes Sekkouri a organisé une trentaine de réunions avec les partenaires sociaux pour tenter de relancer la réforme, sans succès. Le gouvernement est accusé par les syndicats de céder aux pressions du patronat en proposant un projet de loi qui reprend les points contestés de la version précédente. Le CESE, saisi en juillet 2024 pour un avis consultatif, a critiqué le texte pour son manque de clarté et son déséquilibre. Le projet consacre 22 des 49 articles à l'encadrement du droit de grève dans le secteur privé, contre seulement 4 pour le secteur public, et est jugé répressif avec douze articles coercitifs. Cette double impasse sur les fronts de l'emploi et du droit de grève ébranle la position de Sekkouri au sein du gouvernement. Des rumeurs de remaniement ministériel circulent, et des voix au sein même de la coalition gouvernementale, notamment celle de Moncef Toub, député de l'Istiqlal à Tétouan, se sont élevées pour critiquer son bilan et celui de son collègue Ryad Mezzour, ministre de l'Industrie, accusant l'exécutif de ne pas répondre aux aspirations des jeunes et de ne pas créer un environnement propice au développement économique et social, confirme Jeune Afrique.