Le président israélien Isaac Herzog a défendu avec force mercredi devant le Congrès américain la démocratie dans son pays malgré la controverse autour d'une réforme judiciaire, mettant en garde ceux qui critiquent Israël au risque de tomber dans l'antisémitisme. « Je ne suis pas insensible aux critiques entre amis, y compris celles exprimées par des membres respectés de cette Assemblée », a-t-il affirmé dans un discours devant les deux chambres du Congrès réunies en session plénière. « Mais les critiques à l'égard d'Israël ne doivent pas aller jusqu'à la négation du droit à l'existence de l'Etat d'Israël. Remettre en question le droit du peuple juif à l'autodétermination n'est pas de la diplomatie légitime, c'est de l'antisémitisme », a-t-il ajouté sous les applaudissements nourris des parlementaires. Le président Herzog, figure respectée au rôle essentiellement protocolaire, est bien moins clivant que le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou, mais sa visite aux Etats-Unis n'en suscite pas moins des remous au sein du parti démocrate du président Joe Biden. Des élus démocrates ont ainsi dénoncé la « dérive » démocratique en Israël ainsi que la politique d'expansion des colonies juives dans les territoires palestiniens occupés. Certains ont d'ailleurs boycotté le discours du président israélien, et neuf d'entre eux ont voté mardi contre une résolution adoptée à la Chambre des représentants, à majorité républicaine, condamnant l'antisémitisme et assurant le soutien sans faille des Etats-Unis à Israël. Cette résolution avait été soumise au vote par le chef républicain à la Chambre, Kevin McCarthy, en réponse à une élue de l'aile gauche du parti démocrate Pramila Jayapal, qui a récemment qualifié Israël d' »Etat raciste ». Sous pression, elle s'est rétractée et s'en est excusée, mais les républicains sont vent debout et exigent qu'elle soit démise de la tête d'un groupe parlementaire progressiste à la chambre basse. «Trouver un consensus» La visite de M. Herzog intervient alors que des milliers d'Israéliens se mobilisent presque au quotidien pour dénoncer le projet de réforme judiciaire porté par le gouvernement de M. Netanyahou, vu comme une menace pour la démocratie, et que Washington observe avec inquiétude. Le président américain Joe Biden, qui a reçu la veille M. Herzog à la Maison Blanche, a lui-même encore exhorté mercredi le gouvernement israélien à ne pas « précipiter » ses réformes et à procéder avec prudence. « Trouver un consensus sur des sujets politiquement controversés exige de prendre le temps nécessaire. Pour des changements importants, c'est crucial. Ma recommandation aux dirigeants d'Israël est donc de ne pas précipiter » la réforme, a énoncé Joe Biden, cité dans un éditorial du New York Times. Lors de sa visite de deux jours, Isaac Herzog n'a eu de cesse de vanter la « force » de la démocratie dans l'Etat hébreu, sans nier des difficultés. Dans son allocution au Congrès, il a encore parlé d'un « débat intense » dans son pays, « hommage le plus clair à la force d'âme de la démocratie israélienne ». « Bien que nous soyons confrontés à des problèmes douloureux, tout comme vous, je sais que notre démocratie est forte et résistante. La démocratie est inscrite dans l'ADN d'Israël », a-t-il dit. Sa visite, alors qu'Israël fête son 75e anniversaire, a été l'occasion pour le tout Washington de mettre en avant son soutien « indéfectible » à l'allié israélien, ce dont M. Herzog s'est félicité. En marge de la visite, les Etats-Unis et Israël ont annoncé être parvenus à un accord de principe permettant à terme aux citoyens israéliens d'être exemptés de visa pour de courts séjours, en échange qu'Israël garantisse « un traitement équitable » pour tous les citoyens américains, y compris les Palestiniens ayant la nationalité américaine. « C'est la première fois qu'Israël consent à de telles mesures », a déclaré un haut responsable américain sous couvert de l'anonymat, se félicitant de cette « percée » dans ce dossier qui empoisonne les relations entre les deux pays. Israël souhaite depuis des années bénéficier de ce programme d'exemption de visa mais les Etats-Unis refusaient jusqu'alors en raison des restrictions imposées aux Palestiniens ayant la nationalité américaine. L'accord reste provisoire et Washington se donne jusqu'au 30 septembre pour décider ou non de l'entrée d'Israël dans le programme d'exemption de visa, a indiqué à la presse le porte-parole du département d'Etat, Matthew Miller.