Des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité ont été commis depuis 2016 en Libye, a conclu une mission d'enquête d'experts de l'ONU, après une enquête sur place et dans les pays voisins. «Il y a des raisons de penser que des crimes de guerre ont été commis en Libye, tandis que les violences perpétrées dans les prisons et contre les migrants dans le pays peuvent s'avérer être des crimes contre l'humanité», soulignent ces experts, qui ne font que confirmer des faits dénoncés de longue date. Cette mission indépendante a toutefois décidé de ne pas publier «la liste des individus et groupes (aussi bien libyens qu'étrangers) qui pourraient être responsables pour les violations, les abus et les crimes commis en Libye depuis 2016». «Cette liste confidentielle le restera, jusqu'à ce que se fasse jour le besoin de la publier ou de la partager» avec d'autres instances pouvant demander des comptes aux responsables. Les auteurs du rapport notent que la justice libyenne enquête également sur la plupart des cas évoqués par la mission de l'ONU, mais notent que «le processus pour punir les gens coupables de violations ou de maltraitances est confronté à des défis importants». La mission composée de trois experts, Mohamed Auajjar, Chaloka Beyani et Tracy Robinson, a rassemblé des centaines de documents, interviewé 150 personnes et menée l'enquête en Libye même, mais aussi en Tunisie et en Italie. Civils et migrants : principales victimes La mission souligne que «les civils ont payé un lourd tribut» aux violences qui déchirent la Libye depuis 5 ans, notamment en raison des attaques contre des écoles ou des hôpitaux. «Les raids aériens ont tué des dizaines de familles. La destructions d'infrastructures de santé a eu un impact sur l'accès aux soins et les mines anti-personnels laissées par des mercenaires dans des zones résidentielles ont tué et blessé des civils», souligne le rapport. Les migrants, qui tentent de trouver un passage vers l'Europe en Libye, sont soumis à toutes sortes de violences «dans les centre de détention et du fait des trafiquants», a dénoncé Chaloka Beyani. «Notre enquête montre que les agressions contre les migrants sont commises à une large échelle par des acteurs étatiques et non étatiques, avec un haut degré d'organisation et avec les encouragements de l'Etat – autant d'aspects qui laissent à penser qu'il s'agit de crimes contre l'humanité». Les experts soulignent aussi la situation dramatique dans les prisons libyennes, où les détenus sont parfois torturés quotidiennement et les familles empêchées de visiter. La détention arbitraire dans des prisons secrètes et dans des conditions insupportables est utilisée par l'Etat et les milices contre tous ceux qui sont perçus comme une menace. «La violence est utilisée à une telle échelle dans les prisons libyennes et à un tel degré d'organisation que cela peut aussi potentiellement constituer un crime contre l'humanité», a souligné Tracy Robinson. Le rapport doit être présenté au Conseil des droits de l'homme à Genève – la plus haute instance de l'ONU dans ce domaine – le 7 octobre.