Le chef de la diplomatie israélienne Yaïr Lapid a inauguré mardi aux Emirats arabes unis la première ambassade d'Israël dans le Golfe, lors d'une visite officielle inédite pour un ministre de l'Etat hébreu depuis la normalisation des relations l'an passé. «En train de couper le ruban d'inauguration de l'ambassade d'Israël à Abou Dabi avec la ministre émiratie de la Culture Noura al-Kaabi», a tweeté M. Lapid avec une photo de lui et de la responsable émiratie. «Israël veut la paix avec [...] tous ses voisins [...] Nous sommes chez nous au Moyen-Orient. Nous sommes là pour rester. Nous appelons tous les pays de la région à reconnaître cela. Et à venir nous parler», a-t-il dit lors de la cérémonie. Arrivé dans la matinée dans la capitale Abou Dabi, M. Lapid a rencontré son homologue, cheikh Abdallah ben Zayed Al-Nahyane, tweetant une photo des deux responsables se serrant la main après la cérémonie. Plus tard, le ministère israélien des Affaires étrangères a fait état de la signature par les deux responsables d'un accord portant sur une coopération économique et commerciale. Cet accord prévoit «un libre-échange de marchandises et de services». Les gouvernements doivent encore l'approuver avant qu'il entre en vigueur. Le secrétaire d'Etat américain Antony Blinken, dont le pays est un grand allié d'Israël, a salué une inauguration «historique». «Voir le bleu et le blanc (couleurs du drapeau d'Israël, NDLR) ici à l'aéroport d'Abou Dabi [...] c'est exaltant !», avait tweeté dans la matinée l'ambassadeur d'Israël aux Emirats, Eitan Na'eh. Visite discrète Le mouvement islamiste palestinien Hamas, au pouvoir à Gaza, a lui dénoncé l'ouverture de l'ambassade, après avoir accusé les Emirats d'avoir commis un «péché» en signant les accords de normalisation. M. Lapid devait aussi se rendre à Dubaï pour les ouvertures officielles du consulat d'Israël ainsi que du pavillon de son pays à l'Exposition universelle (du 1er octobre 2021 au 31 mars 2022). Le ministre n'a pas été accueilli sur le tarmac par un haut responsable et sa visite a été très peu couverte par les médias côté émirati, une discrétion qui tranche avec les grandes annonces et les slogans dithyrambiques durant les premiers mois de la normalisation entre les deux pays. Sa visite intervient dans un contexte de montée des tensions dans les territoires palestiniens occupés par Israël. Les pays arabes, parmi lesquels les Emirats et Bahreïn, avaient critiqué la répression en mai de manifestations de Palestiniens par les forces israéliennes à Jérusalem-Est, occupé par l'Etat hébreu. Et les frappes israéliennes sur Gaza qui avaient suivi en riposte à des tirs de roquettes sur Israël depuis l'enclave palestinienne avaient mis les nouveaux partenaires commerciaux arabes de l'Etat hébreu dans l'embarras, face à une population arabe très critique dans la rue et sur les réseaux sociaux. «Trahison» Bahreïn, une autre monarchie du Golfe, ainsi que le Maroc et le Soudan, ont également signé ces derniers mois des accords de normalisation avec Israël, sous l'impulsion de l'ancienne administration américaine de Donald Trump. Mardi, Manama a nommé un ambassadeur pour représenter son pays auprès d'Israël. Les Palestiniens ont dénoncé ces accords, les qualifiant de «trahison». La résolution du conflit israélo-palestinien était jusqu'alors considérée comme une condition sine qua non à toute normalisation. Ces derniers mois, les Emirats et Israël ont multiplié les accords de coopération dans divers domaines, notamment commerciaux. En mars, les Emirats avaient annoncé la création d'un fonds d'investissement de 10 milliards de dollars américains destiné à des secteurs stratégiques en Israël. Fin août, l'avion effectuant le premier vol commercial direct entre les Emirats et Israël s'était posé à Abou Dabi en provenance de l'aéroport international David Ben Gourion de Tel Aviv, avec à son bord une délégation américano-israélienne officielle. En mars, la première visite officielle aux Emirats du premier ministre israélien d'alors, Benyamin Nétanyahou, avait été annulée en raison d'un «différend» avec la Jordanie sur le survol de son espace aérien, selon l'Etat hébreu. M. Lapid est l'architecte de la coalition ayant mis fin au règne de Benyamin Nétanyahou et devrait devenir premier ministre ultérieurement, en alternance avec le nouveau chef du gouvernement Naftali Bennett.