Au cours des vingt dernières années, le Maroc a réalisé de considérables progrès économiques et sociaux par le biais d'importants investissements publics, de réformes structurelles ainsi que de mesures garantissant la stabilité macro-économique, indique la Banque mondiale. La croissance qui résulte des progrès économiques s'est traduite par d'importantes avancées dans l'éradication de l'extrême pauvreté, l'augmentation de l'espérance de vie, l'accès plus large aux services publics essentiels et le développement de nombreuses infrastructures publiques. Ces améliorations ont permis au pays de réduire l'écart entre les conditions de vie de sa population et celles des pays du sud de l'Europe. Toutefois, le choc soudain de la COVID-19 a entraîné l'économie dans une abrupte récession, la première depuis 1995, souligne la Banque mondiale. L'économie risque de subir le double impact des chocs économiques intérieurs et extérieurs. Selon le scénario de base, le PIB réel diminuera de 4 % en 2020, bien loin de l'augmentation de 3,6 % prévue avant l'irruption de l'épidémie. Bien que peu de secteurs soient épargnés, cette contraction est notamment due à la chute de la production des biens et services, la réduction des exportations, la perturbation des chaînes de valeur mondiales ainsi qu'au déclin du tourisme sous l'effet de la fermeture des frontières et des mesures restreignant la mobilité. Le marché du travail fait face à un choc aux proportions historiques, les travailleurs vulnérables, notamment ceux du secteur informel, sont particulièrement touchés. Les entreprises sont affectées par les perturbations des chaînes de valeur, la réduction de la mobilité des travailleurs, les fermetures temporaires ainsi que le ralentissement de la demande mondiale. Les effets négatifs combinés ont conduit à des pertes d'emplois et de revenus. Selon le HCP, l'aide gouvernementale a permis d'atténuer partiellement la perte de revenus de 19 % des ménages. Les déficits jumeaux du Maroc devraient se creuser, mais rester gérables. En dépit de la baisse des importations, le déficit du compte courant s'accentuera pour atteindre 8,4 % en 2020, en raison du fort déclin des exportations, des recettes touristiques et des transferts de fonds. Sur le plan budgétaire, en 2020 et 2021, les recettes seront plus basses que prévu tandis que les dépenses augmenteront, notamment celles consacrées à la santé, à la protection sociale et à d'autres mesures de riposte contre les conséquences de la COVID-19. En conséquence, le déficit budgétaire global se creusera et atteindra 7,5 % du PIB en 2020, un pourcentage supérieur de près de quatre points aux prévisions antérieures à l'épidémie. Enfin, les dettes publique et extérieure augmenteront, mais demeureront soutenables. À ce jour, la réponse du gouvernement a été rapide et décisive. Cette réaction proactive a permis au pays d'éviter une épidémie de grande ampleur et donc de sauver des vies. Outre la fermeture rapide des frontières et le renforcement du système de santé, le GdM a établi un fonds spécial afin d'atténuer les impacts économiques. Les mesures de riposte incluent l'indemnisation des ménages touchés par l'épidémie, y compris ceux du secteur informel (une véritable innovation), et la préparation d'une loi de Finances rectificative, la première en 30 ans. La poursuite de mesures allant dans ce sens, y compris l'élaboration d'une feuille de route détaillée sur la reprise des activités économiques, est essentielle pour écourter et atténuer la dépression économique, sociale et sanitaire et accélérer le redressement. Selon les prévisions, avec toutefois un degré d'incertitude inhabituel, le redressement économique qui suivra l'épidémie sera long, la croissance ne revenant à sa tendance antérieure à l'épidémie qu'en 2022. Le rythme prévu du redressement est incertain, car il est étroitement lié à de nombreux facteurs, comme la découverte de traitements efficaces contre la COVID-19, les mesures futures des décideurs, ou l'évolution de l'économie mondiale. Ce rythme dépend également et très fortement du comportement des ménages et des entreprises qui, au vu du degré d'incertitude extrême, risquent de recourir à l'épargne de précaution, ce qui pourrait être un frein considérable à la consommation et l'investissement privés. Face au risque d'épidémie prolongée, il est essentiel de passer d'une phase d'atténuation à une phase d'adaptation pour garantir la résilience, le caractère inclusif et la croissance de l'économie marocaine. En dépit de la probable volatilité de la phase de redressement économique, le Maroc trouve ici l'opportunité de bâtir une économie plus durable et plus résiliente en développant une stratégie d'adaptation similaire à son approche sur le front de l'environnement.