La crise liée au nouveau coronavirus a mis en lumière les dysfonctionnements de la santé publique. Ce secteur vital souffre du manque de moyens humains et logistiques, de la mauvaise répartition régionale des médecins, de la faiblesse de l'offre de soins, de la vieillesse des infrastructures hospitalières et de l'absence de couverture médicale. Au Maroc, le budget de la santé représente actuellement quelque 5% du budget national, contre les 12% recommandés par l'Organisation mondiale de la santé (OMS). Et le système de santé reste marqué par de “profondes inégalités géographiques et socioéconomiques”, selon l'OMS. Non seulement le Maroc a des dépenses de santé très inférieures à la moyenne mondiale, mais la part des infrastructures dans ses dépenses est très faible. Force est de reconnaître que les pouvoirs publics n'ont pas beaucoup investi dans le système de santé. Et ce, même si les dépenses relatives à l'investissement dans le secteur de la santé sont passées de 3,13 MMDH en 2012 à 7,35 MMDH en 2020. Et en ce contexte de crise épidémique, les défis liés à l'accès limité aux soins, au déficit en ressources humaines et à la qualité des services insatisfaisante entraînent de nouvelles menaces sanitaires. Aujourd'hui, et à la veille de l'élaboration d'un nouveau modèle de développement, le coronavirus a mis à plat les faiblesses du Maroc. Le Royaume se devra de modifier en profondeur sa stratégie de développement sans même attendre les conclusions de la Commission spéciale sur le modèle de développement (CSMD). Le pays a identifié ses besoins et a commencé à corriger certains de ses dysfonctionnements. Soulignons qu'un médecin généraliste du secteur public perçoit un salaire de 3.000 dirhams au début de sa carrière en tant qu'interne. Une fois titularisé, il commence à recevoir un salaire mensuel de 8.000 à 8.500 dirhams. Les émoluments d'un spécialiste de grade 1, sont de quelque 11.000 dirhams. Avec des salaires qui ne semblent pas en adéquation avec la tâche liée à la santé et à la vie des patients, et des conditions désastreuses et dangereuses de travail, le Syndicat indépendant des médecins du secteur public a précédemment tiré la sonnette d'alarme en dénonçant les conditions d'accueil et d'exercice du métier, toutes spécialités confondues. En outre, le manque de certains équipements médicaux reste chronique. En ce temps de crise épidémique, le personnel hospitalier manque toujours de protection et le dénonce, d'ailleurs, sur les réseaux sociaux. Si les unités chargées du suivi médical des patients testés positifs au covid-19 sont fournies constamment en masque FFP2, gants, … les autres services, tels que les services de garde et d'urgence, ne sont pas équipés. En première ligne dans la lutte contre le covid-19, les professionnels de santé alertent constamment le ministère de tutelle sur leurs conditions de travail. Ce manque de rigueur et de préparation de l'Exécutif met à rude épreuve la stratégie nationale de lutte contre le nouveau coronavirus. Il inquiète également les médecins qui font partie d'une population à risque : celle des médecins au sens large. En effet, certaines études menées en Chine évaluent à 40% la part du personnel médical amené à contracter le virus en prodiguant des soins. Par ailleurs, la faiblesse des capacités d'accueil en réanimation et en assistance respiratoire fait que la saturation du système de santé pourrait intervenir très vite. Selon les chiffres du ministère de la Santé, le Maroc dispose au total de 1.640 lits de réanimation, sans compter les soins intensifs. Ces lits sont répartis, entre autres, entre le secteur public y compris les CHU, le secteur privé, la santé militaire. Ces lits sont nécessaires pour traiter les patients les plus sévèrement atteints par le covid-19. Dans ce contexte, le Maroc a fait l'acquisition de respirateurs et grâce à ces nouveaux équipements, la capacité du pays va passer à 3.000 lits de réanimation au cours des prochaines semaines. Dans ce sens, il faudra redéfinir les priorités budgétaires et privilégier la santé lors de l'écriture budgétaire, améliorer les conditions de travail et la situation matérielle des professionnels de la santé. Il est aussi question de se doter d'une infrastructure sanitaire moderne, investir dans la R&D tout en concrétisant ses recherches et développer le secteur pharmaceutique et industriel connexe. Soulignons que le Souverain a insisté sur la mise en place de mécanismes de protection sociale essentiellement dans le domaine de la santé. En effet, le 7 novembre 2018, le Souverain a reçu le Chef du gouvernement, Saâdeddine El Othmani, et Anas Doukkali, alors ministre de la Santé. Au cours de cette audience, le Monarque a indiqué que le secteur de la santé doit gagner rapidement en efficacité et améliorer profondément son fonctionnement et la qualité des services rendus ; l'objectif étant que les citoyens commencent à percevoir des améliorations concrètes. Rappelons aussi, dans ce sens, que la Fédération de la gauche démocratique (FGD) avait proposé d'augmenter le budget santé dans le Projet de la Loi de Finances 2020, avant l'apparition de la crise sanitaire actuelle. Une proposition qui s'est heurtée à un refus quasi général des autres députés, à savoir 204 votes. Le covid-19 a mis à nu notre système de santé en révélant les faiblesses des infrastructures médicales et des politiques sociales marocaines. Avec la pandémie du nouveau coronavirus, l'Exécutif doit revoir son système de santé qui souffre de plusieurs maux. Il est ainsi essentiel de faire de la santé une priorité au Maroc dans les prochaines Lois de Finances. Rappelons que jusqu'à présent, et afin de combler les manques face à la pandémie, les autorités marocaines ont lancé des achats d'équipements en urgence, financés par le Fonds spécial coronavirus. Dans un communiqué, le ministère des Finances avait informé qu'un effort substantiel a été consenti au profit du secteur de la santé, notamment à travers l'allocation d'une enveloppe de 2 MMDH au renforcement du dispositif médical national. Selon le ministère, ce montant a servi essentiellement à l'achat d'équipement médical et hospitalier : 1000 lits de réanimation, 550 respirateurs, 100.000 kits de prélèvements, 100.000 kits testeurs, équipement de radiologie et imagerie … Cette manne financière a également servi à l'achat de médicaments et au renforcement des moyens de fonctionnement du ministère de la Santé. Quand il y a urgence, les fonds sont débloqués, le tirage qui n'est que normal sur la LPL à laquelle le Maroc souscrit depuis 2012, aussi. La Santé comme l'Education comme l'environnement du tissu économique -notamment les TPME- sont les grandes priorités dont la vulnérabilité a été mise en évidence en moins d'un mois.