Noureddine Médiane, premier vice-président de la Chambre des Représentants et député istiqlalien estime que le projet de décret d'application sur la levée de l'immunité parlementaire va mettre de l'ordre dans les obligations des élus. Entretien. ALM : Pensez-vous que le projet de décret d'application sur la levée de l'immunité puisse porter atteinte à l'action des parlementaires? Noureddine Médiane : L'article 39 de la Constitution est clair à ce sujet. L'immunité, dont jouissent les parlementaires, n'a été instaurée ni pour leur permettre de se situer au-dessus des lois, ni pour leur assurer une protection en cas de dérapage clair et concret. Certes, cette immunité est une garantie octroyée aux élus, mais elle ne doit pas être synonyme d'impunité. En d'autres termes, le bureau de la présidence de la Chambre des Représentants ne voit aucune objection à l'adoption de ce projet de décret d'application. Nous estimons même qu'il permettra de mettre de l'ordre dans l'action parlementaire. Car il ne faut pas oublier que certains Représentants ou Conseillers portent sérieusement atteinte à l'image de marque de notre institution. Ce projet doit être donc adopté au plus vite. En tout cas, avant la fin de la session actuelle. Que pensez-vous du délai de 15 jours prévu par le projet? En effet, le projet prévoit un délai de 15 jours pour répondre à la demande de levée d'immunité. Au-delà de cette période, et en cas de silence du bureau de la Chambre, la levée est considérée comme effective. Je ne vous cache pas que dans les coulisses du Parlement, cette disposition est sujette à un débat houleux. Certains estiment, en effet, que les 15 jours ne sont pas suffisants pour prendre la décision. En tout cas, les discussions au sein de la commission législative ne font que commencer. Combien de demandes avez-vous reçu lors de cette législature? Tout d'abord, il faut noter que le nombre de demande a toujours été très faible. Depuis le début de la législature, nous en avons reçu une seule, celle d'un parlementaire du Sud. Après l'enquête préliminaire du bureau de la présidence, il s'est avéré que le concerné s'était déjà présenté devant la Justice et a complètement réglé ses problèmes. Nous n'avons pas eu besoin de lever son immunité. La question de la levée de l'immunité nous pousse souvent à parler de l'absentéisme. Qu'en pensez-vous? Effectivement, l'absentéisme est un phénomène grave. Il existe dans plusieurs pays, mais chez nous, il atteint des dimensions inquiétantes. Nous en sommes conscients. Certains ne participent jamais aux travaux parlementaires. C'est à se demander pourquoi se sont-ils présentés aux élections. Pour en finir avec ce phénomène, il faut prendre plusieurs décisions, notamment la refonte du règlement interne. Un chantier que nous avons lancé depuis quelques mois déjà. Le bureau présentera ce projet de réforme du règlement intérieur du Parlement dans les prochains jours. Que prévoit ce projet de réforme du règlement intérieur? Tout d'abord, il met en place un certain nombre de mesures qui permettent d'inciter à la présence des parlementaires. Les absences seront, bien entendu, sanctionnées. Cela va commencer par des avertissements, pour finir, carrément sur des prélèvements sur les rémunérations des parlementaires. Pensez-vous que ces derniers accepteront d'adopter cette réforme? A vrai dire, je ne sais pas s'ils vont accepter. Nous avons déjà présenté un projet de réforme, mais il a été rejeté par la majorité des parlementaires. Leur réaction a été complètement négative. En cas de refus de leur part, allez-vous rester les bras croisés? Evidemment pas. Nous allons installer un dispositif électronique qui permettra de contrôler l'entrée et la sortie de tous les parlementaires. Pour ce faire, ils disposeront tous d'une carte magnétique. Ce système, il faut le souligner, a été accepté par tous les groupes parlementaires. Sans sanctions, le pointage est suffisant pour éradiquer le phénomène de l'absentéisme? Pour éradiquer l'absentéisme, tous les moyens technologiques du monde ne suffisent pas. Le problème se trouve au niveau des mentalités. La responsabilité des partis politiques est totale à ce sujet. Ils doivent mobiliser leurs élus et les sensibiliser au respect de l'intérêt général. Malheureusement, certaines formations octroient des accréditations selon des critères douteux. Tous les partis sont concernés. L'action parlementaire est également une question de moyens financiers. En effet, il est inconcevable de voir des députés préparer leurs questions dans les couloirs du parlement ou sur les terrasses des cafés. Sous d'autres cieux, les élus disposent de bureaux totalement équipés pour leur faciliter la tâche. Le gouvernement est sensible à cette question, mais les moyens dont nous disposons sont, véritablement, insuffisants.