Après la Tunisie, la Libye, le Maroc, c'est sans grande surprise que les islamistes accèdent au pouvoir en Egypte. Issu des Frères musulmans, Mohamed Morsi qui se proclamait comme le défenseur des objectifs de la révolution est devenu le nouveau président de l'Egypte. Il a remporté avec 13,2 millions des voix (soit environ 51,7%) cette élection présidentielle, la première à se tenir sous l'ère de la révolution. Ainsi autant se répète le scénario selon lequel le Printemps arabe a fait place au raz-de-marée des islamistes, autant les principaux ingrédients d'un tel triomphe sont à quelques détails près les mêmes, estiment les analystes. Ainsi parmi les facteurs globaux on cite l'affaiblissement dans les pays arabes du front progressiste et démocratique. «Ces derniers que ce soit en Tunisie, au Maroc, ou en Libye, Egypte ont à chaque élection dispersé leurs forces et du coup leur masse électorale en se présentant sous diverses formations politiques», explique l'islamologue Said Lakhal. Et d'ajouter : «Le courant islamiste, mieux organisé et plus discipliné depuis des décennies en opposition, a affronté ses adversaires idéologiques et a rassemblé la masse électorale qui, dans le pire des cas, a été scindée en deux courants : salafiste et islamiste pour ce qui est de l'Egypte particulièrement». On note également parmi les facteurs d'un tel triomphe des islamistes dans tous les pays arabes, le déficit de popularité des partis qui ont exercé le pouvoir et dont le mandat a été marqué par leur mauvaise gestion de la chose publique qu'ils soient modernistes, de gauche, socialistes, ou libéraux et de droite. Ainsi la seule alternative pour les électeurs restait les islamistes. Mais l'arrivée des islamistes au pouvoir est-elle pour autant synonyme de changement ? Pour les observateurs, ces partis islamistes récents au pouvoir ne peuvent pas radicalement, à court et moyen termes, changer leur manière de gestion par rapport aux anciens Exécutifs. Les islamistes autant que ceux qui les ont précédés sont tenus de préserver leurs relations internationales, leurs conventions et accords signés. Ils sont aussi soumis à des contraintes internationales. «Si Mohamed Morsi ne s'éloigne pas des slogans radicaux qui ont fait sa popularité avant les élections, notamment «le combat contre l'impérialisme», «l'application de la charia »…, il fera courir à son peuple des risques énormes tels que des sanctions économiques ou des embargo. Ce qui peut créer une révolte populaire», estime M. Lakhal. Ainsi dès l'annonce des résultats des élections présidentielles, le nouveau président égyptien a envoyé plusieurs messages pour rassurer aussi bien l'étranger que les citoyens à l'intérieur du pays. «Ceux qui m'ont dit «oui» et ceux qui m'ont dit «non» sont tous des enfants d'Egypte, et donc mes proches. Nous devons avancer, les habitants de notre pays auront tous les mêmes droits», a annoncé le Président dès sa nomination. Il a aussi indiqué qu'il veillera à la constitution d'un gouvernement d'unité nationale rassemblant diverses tendances politiques. Tout en soulignant qu'il n'envisageait pas une quelconque vengeance ou règlement de comptes, il a notamment promis de réformer les organes du pouvoir affectés par la corruption, de nommer plusieurs adjoints et conseillers représentant différents courants de la société et de mettre en adéquation les droits des musulmans et des chrétiens coptes. Le nouveau président a également fait allusion au fait qu'il ne renoncera pas aux accords de Camp David, il n'entrera pas en guerre ouverte avec Israël, il restera en relation avec l'Occident. Par ailleurs, notons que l'Egypte, à l'instar de plusieurs pays qui ont été touchés par le Printemps arabe, vit une véritable crise économique avec un niveau d'endettement qui atteint 13% du PIB. Ainsi le pays vit une phase transitoire délicate dans la mesure où le pays est encore sous le joug de plusieurs acteurs de l'ancien régime que ce soit au niveau économique ou encore l'armée qui promet un véritable bras de fer avec les islamistes. Par ailleurs, soulignons que le chef de gouvernement et secrétaire général du PJD, Abdelilah Benkirane a adressé lundi ses félicitations à l'islamiste Mohamed Morsi, premier président civil élu en Egypte. Dans des déclarations à la presse, M. Benkirane a qualifié cette élection de «victoire de la démocratie, de la volonté du peuple égyptien et du choix des réformes».