Mohamed M'Jid, président de la Fédération royale marocaine de tennis, revient sur la confrontation Maroc-Argentine en Coupe Davis qu'il qualifie de «grande victoire». Dans la foulée, il évoque, le malaise du tennis et du sport national en général. ALM : Quel commentaire faites-vous de la récente défaite du Maroc face à l'Argentine en Coupe Davis ? Mohamed M'Jid : Tout d'abord il ne faut en aucun cas la qualifier de défaite, ce n'en est pas une. Le Maroc y a participé, il figure parmi le peloton des quinze premiers sur deux cent pays et c'est plus qu'une victoire. C'est un succès éclatant, une victoire écrasante, un triomphe. Nous avons tenu compte du temps et choisi une salle à Agadir. Nous avions ramené une surface spécifique de Barcelone et aucun aspect de l'organisation n'a été laissé au hasard. De plus, nous nous sommes bien préparés et nous étions bien partis pour un couronnement grandiose de l'aspect organisationnel. Malheureusement, Younès El Aynaoui était affecté par une lésion au niveau du talon et son compatriote, Hicham Arazi, a eu une subite déchirure musculaire, en plein match, c'était le coup de grâce car il était dans l'incapacité de continuer. Nous avions perdu là nos principaux atouts. Nous avions alors engagé deux jeunes talents, Mounir El Aârej et Mehdi Tahiri, qui ont affiché une combativité exemplaire, ils se sont libérés du joug de la pression, ils étaient déchaînés et ont livré une très belle prestation, en dépit de leur évolution face à deux fines raquettes du tennis mondial. D'ailleurs, les techniciens de la fédération Internationale de Tennis nous ont félicité pour le talent des Marocains et m'ont personnellement témoigné le profond respect qu'ils ont éprouvé pour les deux jeunes Marocains. Mais la coutume veut que tout le monde réclame des résultats. Or, il faut mettre à notre disposition les moyens nécessaires, à savoir les infrastructures, les moyens techniques et financier et autres, à ce moment, l'on pourra exiger une obligation de résultat. Cette situation a mis en exergue le problème de relève qu'accuse le tennis national. Comment pourrait-on y remédier dans l'avenir? Mis à part les deux jeunes talents que j'ai cités précédemment, nous avons encore trois ou quatre autres sous la main. Mais il faut signaler que préparer une relève n'est pas chose difficile en soi. Sauf qu'un jeune champion ne se prépare pas en deux ans, il faut une prise en main sur les plans psychologique et technique. Forger un champion nécessite une dizaine d'années et un budget annuel de 40 000 dollars. Ce dont on a besoin c'est une politique rationnelle et structurelle. Si vous avez des parlementaires qui ne font rien, il ne faut pas se leurrer. Lorsque les budgets réservés aux sports représentent 0,000 % du budget global de l'État, et en plus, on ose vous demander des comptes à rendre, qu'est-ce que cela signifie ? Alors que l'Éducation nationale dispose de 24% de ce même budget, nous avons en contre-partie 64% d'analphabètes dans la population ! Pourrait-on un jour sortir de cette impasse? Bien sûr et cela a déjà été amorcé. L'ancienne politique néfaste des Communes, qui exploitaient toutes les infrastructures du pays, est en train de céder la place avec l'avènement du Conseil de la Ville. Nous sommes en train de récupérer diverses structures tel le Complexe Al-Amal, nous allons regrouper un maximum de jeunes, frapper aux portes des écoles, mobiliser les jeunes cadres techniques et le résultat ne manquera pas au rendez-vous. (…) Vous savez, le sport doit échapper aux fluctuations politiques. Il faudra mettre en place un Haut Commissariat compétent, intègre et ambitieux, avec un plan quinquennal et à ce moment, on serait en mesure de demander des comptes. Le tennis semble également souffrir d'autres malaises… Le tennis ou le sport, en général, est malade de ses dirigeants ignorants et arrivistes. Le tennis se porte très bien, nous avons un staff technique formidable. Mais au sein du comité, nous avons des tocards à qui cela ne plait pas car leurs intérêts personnels en pâtissent. Des énergumènes qui traînent dans les bars et au bout de quelques verres, ils commencent à démolir le tennis et se lancent dans un dénigrement systématique, pour de basses velléités de succession. Quelles mesures prenez-vous face à ce comportement ? Mettre les gens à la porte, une bonne fois pour toutes ! Et qu'on parle à ce moment de dictature si on le souhaite. Le sport semble cependant occuper de plus en plus d'importance au Maroc, qu'en pensez-vous ? Le Maroc est un pays jeune et, en effet, ce n'est que maintenant que l'on vient de réaliser l'importance du sport. Le succès signé par les Lions de l'Atlas en témoigne. Zaki et ses poulains ont réussi à mobiliser et à faire sortir 80% de la population dans les rues. Citez-moi le nom d'un parti politique capable de mobiliser ne serait-ce qu'une centaine de personnes, sans avoir recours aux billets alléchants, aux sandwichs et autres « générosités »…